Coupables, victimes, les premières conclusions de l’humiliant classico de l’OM

Il y a des soirs où tout s’écroule. Des soirs où les espoirs musclés tout au long des jours passés s’évanouissent en quelques minutes. Des soirs où tout bonnement, le rêve laisse place à la froide réalité. Ces soirées cauchemardesques, l’Olympique de Marseille en a vécu dans son passé proche. Doublement terrassé par Monaco, battu récemment par l’OL en Ligue 1, sans match référence à un tel niveau, l’Olympique de Marseille s’était mis à rêver d’un exploit face à l’un des nouveaux ogres européens : le PSG d’Unai Emery. Un PSG que l’OM n’a plus battu depuis le 27 novembre 2011.

Depuis leur victoire écrasante face au Barça, tout le monde veut le scalp d’une des équipes phares du football européen. Si la semaine passée, le Toulouse de Dupraz avait mis en échec l’attaque parisienne, ce point arraché ne faisait pas figure de réel exploit. Forts de leur nouveau statut, les Parisiens ont abordé le match d’hier comme un 1/8ème de finale de Ligue des Champions. Sauf qu’en face, il y avait une toute petite équipe de Ligue Europa (et encore).

Alors comment l’OM a pu croire pouvoir faire face à ce PSG ? Quelles sont les raisons qui ont poussé les 66000 supporters de l’OM à s’arracher les places d’un Vélodrome qui fut aussi beau au coup d’envoi que climatisé à la 6ème minute ?

Une communication à double tranchant

Depuis l’arrivée de Franck McCourt, son board, avec pour figure de proue Jacques-Henri Eyraud, a fait de la communication un des secteurs clés de ce nouvel OM. Il n’est donc pas rare de voir le Président aller de médias en médias, pour parler du présent mais surtout du futur de l’OM. Des déclarations, du rêve, de l’ambition, tels sont les crédos de ces sorties médiatiques qui se sont amplifiées à l’approche du Classico.

A Jacques-Henri Eyraud s’est ajouté Franck McCourt. L’homme de Boston a fait le tour des médias ces derniers jours, et a chauffé à blanc des supporters qui ne demandent que le retour de vrais grands joueurs et de vrais grands combats.

Et puis, comme avant chaque match très important, le « sportif » y est allé de ses petites déclarations. D’Evra à Vainqueur, en passant par coach Garcia, tout le monde a tenu à prévenir le PSG : « l’OM sera dur à battre, les guerriers seront lâchés, la bataille s’annonce magnifique ». La rage du petit contre le jeu de l’ogre, tel devait être les leitmotiv de ce match de Ligue 1. Bref, de quoi mettre de l’huile sur le brasier des attentes des supporters et des médias.

Les médias parlons-en. Eux qui ont érigé l’opposition OM-PSG comme LA rivalité numéro 1 du football français. Le rachat récent de l’OM a enflammé les rédactions. Evidemment à raison. L’OM, l’un des (voire le) clubs les plus populaires, doit redevenir une place forte du championnat de France, et ce pour des raisons qui sont, pour les médias, bien plus marketing que sportives. Ce premier Classico post-rachat était donc une première pierre posée dans l’optique de grandes confrontations OM-PSG à l’image d’un United-City, d’un Barça-Real, d’un Bayern-Dortmund…. Sauf que pour un match des étoiles, il faut deux équipes galactiques. Et que pour le moment, l’une des deux est bien loin de tous les standards d’une grande formation. Mais ça, personne n’a pris le soin d’en parler. Au contraire, tout devait être possible. Vendre du rêve, faire du clic, et autres fumisteries intellectuelles étant devenu le quotidien d’une caste de médias corporato-buzzophile.

Ces derniers jours, entre déclarations guerrières, palettes Lopez/Verratti, ambitions liées à l’arrivée du seul et unique Payet, toute l’OMosphère (supporters compris) a créé un sentiment d’espoir et de confiance. Et si l’OM pouvait le faire ? Et pourquoi pas d’ailleurs ? Mais si regardez, ils vont le faire ! Bah non, pas cette fois.

Un match aux allures de cauchemar

On avait peu entendu les Parisiens avant ce choc. Enfin, on les avait beaucoup moins entendus que les Olympiens. Et pour cause, ces matchs couperets, ils les connaissent, et cette saison, l’équipe semble avoir vraiment passé un cap (sous la houlette de Coach Unai, mais chut, on ne doit pas le dire trop fort). Ajoutez à cette expérience l’approche du retour face au Barça et l’écart existant entre le PSG et Monaco au coup d’envoi, toutes les conditions étaient réunies pour que le PSG ne prenne pas peur, malgré un Vélodrome bouillant et hostile.

Face au Barça, le PSG avait fait un grand match, de la première à la dernière minute, face à un adversaire certes loin de son époque divine, mais qui reste extrêmement compétitif. Face à l’OM, le PSG n’a pas eu besoin de faire un grand match. Les ouailles de Nasser étaient supérieurs, tant technico-techniquement que dans l’envie. Et ce sont ces deux derniers points qui sont inquiétants et sources de tristesse pour les amoureux de l’OM.

Si techniquement, bien que l’envie de revoir un OM triomphant ait tendance à rendre amnésique bon nombre d’observateurs, l’écart PSG-OM est abyssal, tout le monde était en droit d’attendre que l’OM tente quelque chose tactiquement, ou à défaut, mette de l’intensité afin de combler des lacunes techniques évidentes.

Zambo à la place de Sanson, Evra à la place de Bedimo, Rolando-Fanni en charnière, tels ont été les choix humains de Garcia. Pressing désynchronisé, marquage laxiste, prises en indiv ratées, telles ont été les clés de la très facile victoire parisienne. Garcia a raté son match. Il avait déja raté ceux très compliqués contre Monaco, et celui plus abordable contre l’OL. Alors oui, certains joueurs ne sont pas au niveau, oui la période de bricolage n’est pas terminée, mais une telle prestation est à ce niveau honteuse et gênante.

Quant à l’envie … Régulièrement pointés du doigt, les hommes de Garcia semblent tétanisés, ailleurs, pas concentrés, et ce, globalement un match sur deux. Face à moins fort, c’est dangereux, face à plus fort, c’est suicidaire. Le match a rappelé à tous ceux qui font des conférences de presse et des caméras hors terrain que la loi du football est très souvent impitoyable.

Les supporters, dommages collatéraux ?

Ils étaient 66000 au Vélodrome, et des millions devant leurs téléviseurs. Tous les amoureux de l’OM ont vécu la même descente aux enfers que leurs protégés hier soir. Une piqûre de rappel pour les plus impatients : Rome ne s’est pas construite en un jour, l’OM ne se reconstruira pas en deux mercatos.

Depuis une semaine, médias, joueurs, staff, board, cellule communication… tous ont conditionné les supporters de l’OM à une seule et même conclusion : « Dimanche, tout sera possible. Mais pas sans vous ». Alors les supporters ont répondu présents. La ferveur sur le parvis du Vélodrome, l’ambiance en tribune, les tifos, la haute dépression du lundi matin… tous ces éléments ont prouvé au football français que la passion revient à l’OM, que la source des rêves et ambitions des olympiens est intarissable.

Cette envie de redevenir une place forte du foot français est à l’origine d’un oubli fatal : cet OM est taillé pour finir entre la 5ème et la 7ème place. Pas moins, mais surtout pas plus. Et les défaites contre les membres du top 8 montrent toutes les faiblesses de cet effectif qui doit encore être considéré comme un effectif de transition. Toute la ferveur dans les tribunes ne transformera pas Fanni et Rolando en Nesta et Maldini. La patience est de mise, plus que jamais.

En attendant de retrouver un effectif digne de ses ambitions, l’OM navigue à vue. Trop court pour concurrencer les plus forts, l’OM se doit d’abord d’être juste et effectif face aux plus faibles. Guillaume Penn disait « Mieux vaut ne rien dire que parler mal-à-propos. Pour parler à propos, il faut choisir le temps et les paroles. » Tout le peuple marseillais en a fait l’amère expérience hier soir. « Dire c’est faire rire, et faire c’est faire taire », l’OM, du Président aux joueurs, en passant par le coach, aura compris hier que le poids du maillot est lourd à l’OM. Mais pas autant que le poids des mots…

Photo Philippe Laurenson / DPPI

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