Rabiot, l’âge de raison

Ce mardi 24 novembre, la Juventus accueille Ferencváros pour la quatrième journée de Ligue des champions. Pour se défaire des modestes hongrois, les Bianconeri pourront compter sur un Adrien Rabiot au top de sa forme.

#Cancel2020. Depuis le début du mois de septembre, cet hashtag plutôt cocasse fleurit sur Twitter. On serait presque tenté d’y adhérer si annuler purement et simplement cette année était possible. Pour de très nombreuses personnes, 2020 aura été, au mieux, une année contraignante, au pire, une année (très) difficile à différents points de vue. Pour les footballeurs également. Mais s’il y en a bien un qui gardera de bons souvenirs de cette année si particulière, c’est Adrien Rabiot. Épanoui à la Juventus et de retour en Équipe de France, le Français de 25 ans joue sans doute son meilleur football. En l’espace de quelques mois, il est redevenu l’excellent milieu de terrain qu’il n’aurait jamais dû cesser d’être.

Retour fracassant

Sa prestation XXL réalisée face au Portugal le 14 novembre (0-1, victoire Bleus) en est l’éclatante illustration. En témoigne quelques statistiques : presque 90% de passes réussies, trois tirs tentés, dont celui à l’origine du but de N’Golo Kanté, deux tacles, deux passes clés selon le site whoscored.com. Au-delà des chiffres, Rabiot a donné l’impression d’être au four et au moulin. En attaque, il n’a pas hésité à soutenir ses attaquants. Des efforts offensifs qui ne l’ont pas empêché de revenir colmater les brèches en phase défensive. Sa capacité à enchainer très vite et dans le sens du jeu après la récupération du ballon a sauté aux yeux. Tout comme sa complicité technique avec ses compères du milieu et de l’attaque. Qu’il semble loin le temps où le « Duc » se plaignait du froid un soir d’octobre 2017 en Bulgarie.

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Son transfert à la Juventus a tout changé. Le chemin de la rédemption était pourtant semé d’embuches. Lorsqu’il est arrivé libre à Turin début juillet 2019, Adrien Rabiot sortait d’une longue période d’inactivité suite au bras de fer engagé avec le Paris Saint-Germain. À cette époque, le jeune milieu français se faisait plus remarquer par ses passes-d’armes extra sportives que par son implication sur le rectangle vert. Rabiot connait des débuts compliqués dans la capitale piémontaise. À peine arrivé, il doit faire face à une forte concurrence (Pjanic, Khedira, Matuidi, Bentancur, etc) dans l’entrejeu turinois. Hors de forme, il a du mal à satisfaire les exigences élevées de la Vieille Dame.

Le professeur Sarri et le mentor Pirlo

Après la pause hivernale, Adrien Rabiot revient petit à petit sur le devant de la scène. Mieux physiquement, il enchaine les matchs début 2020. Maurizio Sarri, son entraineur à l’époque, ne manque pas de noter les progrès du Français : «Adrien progresse beaucoup en termes de condition et d’aspect tactique. Il s’est très bien comporté lors de ses derniers matches, notamment dans l’agressivité et l’intensité.» Puis le Covid-19 arrive et le coupe dans son élan. Enfin, c’est ce que l’on pensait. Car à la reprise, le « Duc » revient plus fort et s’impose comme un titulaire indiscutable dans le cœur du jeu des Bianconeri. Son but fantastique après une course de 70 mètres face au Milan AC (4-2, victoire du Milan) le 7 juillet symbolise ce bien-être retrouvé. Le joueur déclarera d’ailleurs : «Des buts comme celui-là, tu ne peux les inscrire qu’en étant bien physiquement et mentalement.»

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La belle histoire entre le joueur formé au PSG et la Vieille Dame se poursuit avec l’arrivée d’Andrea Pirlo sur le banc. Si le champion du monde 2006 cherche toujours la formule idéale, Rabiot, lui, fait toujours partie des premiers noms inscrits sur la feuille de match. Aujourd’hui, il évolue le plus souvent dans un rôle de double pivot (aux côtés de Bentancur, McKennie, ou Arthur) dans un schéma en 3-4-1-2 pouvant se muer en 4-4-2 lors des phases défensives. Sur le papier, il occupe une position assez reculée. Elle traduit mal la liberté laissée à Rabiot lorsque que son équipe a le ballon. Le milieu français a tout le loisir de se projeter sur la gauche entre ses attaquants et son latéral gauche.

«J’ai l’impression d’être un autre joueur»

Ce travail tactique se ressent en équipe de France. Le 4-4-2 mis en place par Didier Deschamps peut glisser vers un solide 4-3-1-2 grâce au volume du jeu du joueur. Le sélectionneur l’a rappelé après la victoire face au Portugal : «Dans le positionnement, j’ai discuté avec Adrien depuis deux jours. Beaucoup de choses ont changé, il n’a pas de limite dorénavant, il est capable de s’adapter aujourd’hui.» De son côté, Rabiot est conscient du chemin parcouru depuis son arrivée en Italie. Début septembre, il indiquait aux journalistes français en quoi la Serie A le faisait progresser : «Là où c’est plus plus difficile, c’est dans le rythme. Dans l’intensité du travail la semaine en club aussi.»

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Cette rigueur professionnelle si chère au club turinois, là se trouve certainement la source des progrès de l’ex parisien. Rien d’étonnant, tous les joueurs passés par la capitale piémontaise témoignent de cette culture du travail. Même Blaise Matuidi, pourtant loué pour son professionnalisme partout où il a joué, déclarait à la Gazzetta Dello Sport au lendemain du sacre mondial que «le goût du travail à Turin, [lui] avait énormément apporté». Le principal intéressé le confiait lui-même sur RTL le 15 janvier dernier : «Depuis que je suis à la Juventus, j’ai l’impression d’être un autre joueur et une autre personne.Ce transfert-là m’a fait grandir.» Tant mieux pour Didier Deschamps. Et pour tous les supporters de l’Équipe de France.

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Crédit photo : SUSA / Icon Sport.

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