La sélection la plus jeune du Mondial (26 ans de moyenne d’âge) compte dans ses rangs de nombreux potentiels. Parmi eux, un inconnu du grand public il y a encore sept mois de cela : Benjamin Pavard, 22 ans. Le latéral droit aux boucles brunes de cette Équipe de France est sans doute la bonne surprise (mais pas si grosse que ça) de ce groupe et il n’en est pas moins devenu un élément essentiel.
Alors que le 2 novembre 2017, Didier Deschamps annonce la liste des 24 joueurs sélectionnés pour les deux prochains matchs amicaux face au Pays de Galles et à l’Allemagne. Alors que les habitués sont de la partie, très vite, le sélectionneur créé la stupeur chez les journalistes en annonçant le nom de « Benjamin Pavard ». Aussitôt, les articles fleurissent afin de faire découvrir qui est ce jeune homme du VFB Stuttgart appelé pour la première fois par DD. Avant cela, seule une poignée d’observateurs du championnat allemand pouvait se targuer de connaître le défenseur. Pour sa première sélection, il entre en jeu à la mi-temps le 10 novembre 2017 contre le Pays de Galles à la place de Christophe Jallet. Quand bien même il effectue une entrée correcte (sa frappe touche le poteau en fin de rencontre), personne n’aurait parié un kopeck que ce frisé serait titulaire sept mois plus tard en Russie pour disputer la plus grande compétition internationale. Tout le monde pense que le poste d’arrière droit est réservé à Sidibé et que sa doublure se jouera entre Jallet, Corchia et même Debuchy, qui refait surface après s’être relancé avec l’ASSE. Et pourtant, c’est bel et bien Pavard qui est appelé en tant que roue de secours de Djibril Sidibé. Une grosse surprise ? Pas sûr.
QUELQU’UN A DIT « DOUBLURE » ?
« Les postes de latéraux sont la faiblesse de cette Equipe de France ». Cette phrase faisait partie des nombreuses critiques de la part des français à la veille du Mondial. Aujourd’hui, cette faiblesse n’est plus. Les postes de latéraux sont quasiment devenu la force de cette équipe. Lors du France-Australie de la première journée, deux joueurs font sensation et viennent embellir, comme ils le peuvent, le match compliqué de leurs coéquipiers. Il s’agit de Lucas Hernandez à gauche et de Benjamin Pavard, à droite. Tous deux ayant profité des blessures de Benjamin Mendy et de Djibril Sidibé ont bousculé la hiérarchie à leur poste. Le Citizen et le Monégasque reviendront en grâce le jour où DD aura besoin d’arrières latéraux plus portés vers l’attaque que la défense : autant dire que ce n’est pas demain la veille que l’on reverra ces deux-là titulaires. Leurs piètres prestations respectives en amical dimanche contre les moins de 19 ans du Spartak Moscou montrent d’ailleurs qu’ils ont compris.
Nul doute que le dernier match de préparation contre les États-Unis a aussi fait pencher la balance pour le poste de latéral droit. Auteur d’un match médiocre et offrant le but adverse, Sidibé avait laissé sa place à Pavard qui lui, avait offert la passe décisive à Mbappé. Une dernière impression révélatrice. Tout comme son compatriote Hernandez, la polyvalence de Pavard a tapé dans l’œil du sélectionneur. Capable d’évoluer à différents postes défensifs (arrière droit, défenseur central, milieu défensif, voire milieu relayeur), il joue plutôt dans l’axe avec son club mais le flanc droit est peut-être le poste qui lui convient le mieux chez les Bleus. Le vrai défi était donc la concurrence avec Sidibé. Mais, c’est oublier toute la détermination du garçon car déjà à Lille, les deux joueurs se sont côtoyés quand Pavard est passé pro en 2015 sous la houlette de René Girard. Il a depuis énormément progressé, au point de devancer son concurrent en sélection. Preuve que le football va vite et qu’il se joue à des détails.
TAULIER DE STUTTGART
S’il en est arrivé là, avant même son travail et son abnégation, c’est grâce à un choix. Quand Frédéric Antonetti reprend les rênes des Dogues, il préfère confier le poste de latéral droit à Soumaoro ou Civelli, reléguant le pauvre Pavard dans l’entrejeu mais surtout sur le banc, ce qui le conduit à partir à l’été 2016. Comme beaucoup de Français en Ligue 1, le natif de Maubeuge choisit de s’exiler outre-Rhin afin de relever le pari de s’imposer en Bundesliga. Il signe au VFB Stuttgart, alors en deuxième division, pour 5 millions d’euros (un des plus gros transferts de l’histoire du club). Grand bien lui a pris, puisqu’au terme d’une saison chez les Souabes, il est sacré champion de D2 allemande en étant entre-temps devenu un titulaire indiscutable du VFB. Là-bas, avec Hannes Wolf comme entraîneur, Pavard renoue avec son premier amour : la défense centrale. Un poste difficile, souvent confié plus volontiers à des joueurs plus expérimentés, ce qui n’a pas découragé le Nordiste pour autant. Au contraire, le temps de trouver ses marques, il excelle aussi sur le côté droit et dépanne en sentinelle, à chaque fois avec la même réussite. Sa vélocité, sa percussion et sa capacité à mettre le pied devant l’adversaire en ont fait un modèle de solidité défensive reconnu par ses pairs.
« Je ne m’attendais pas à être appelé en novembre, après tout s’est enchaîné. Mais si vous suivez mes performances en club, vous comprendrez pourquoi le sélectionneur a fait appel à moi », confiait récemment le joueur en conférence de presse. Ce n’est en effet pas une si grosse surprise de le voir à un tel niveau, si on observe ses matchs avec son club. Après dix journées et avant le rassemblement international de novembre, le défenseur était d’ailleurs le seul joueur de champ de Stuttgart à ne pas avoir manqué la moindre minute (900 sur 900). Indispensable ? Il est sans doute en passe de le devenir avec l’EDF.
Sosie du youtubeur Norman Thavaud ou de Screech de la série des années 90 « Sauvés par le gong », il se fait surnommer « Jeff Tuche » par son coéquipier Adil Rami. Titillé par un journaliste à ce propos, il s’est fait remarquer en rétorquant « C’est bien marrant au début… mais après voilà ». Il n’en a que faire des moqueries. Lui, en attendant, il répond sur le terrain. On n’a pas fini de le voir agiter ces bouclettes.
Crédit Photo : Maksim Bogodvid / Sputnik.