Chères passagères, chers passagers, bonjour. Le commandant de bord, monsieur Zinédine Zidane, et le reste de l’équipage ont le plaisir de vous accueillir à bord de ce Boeing 2020-2021 compagnie LaLiga Santander. Nous assurerons votre sécurité lors de ce vol direction la place Cibeles. La durée du trajet sera d’une saison. Nous vous souhaitons un très bon voyage avec le Real Madrid.
Après des escales à San Sebastián, Sevilla, Valencia et la réception de Valladolid, le Real Madrid entame son voyage vers un second titre de champion consécutif. D’un point de vue comptable, le décollage est plutôt calme. Seulement, quelques turbulences taquinent la pression atmosphérique madrilène.
Un jeu hazardeux
Sur les trois premières rencontres face à la Sociedad (0-0), le Betis (victoire 3-2) et Valladolid (victoire 1-0), un constat s’impose. L’animation offensive est faible, celle d’un Real Madrid fatigué qui ronfle encore après un été chargé. En 4-2-3-1 ou 4-4-2, l’incapacité madrilène à déséquilibrer le bloc adverse est frappante. D’abord, un manque de débordements sur les côtés. L’absence de vrais ailiers est préjudiciable tant elle diminue les possibilités de différences individuelles le long de la ligne, condamnant le Real à trouver des combinaisons dans l’axe face à des blocs compacts. De la même manière, les latéraux pèsent peu. Sans jeu sur les côtés, les dédoublements sont rares et les centres souvent réalisés sur des phases statiques, facilitant l’intervention adverse.
Les possessions du Real Madrid se trouvent donc assez stériles et la Casa Blanca se crée peu de grosses opportunités. Sur l’ensemble des trois rencontres, la possession moyenne des hommes de Zizou est de 62%. Pourtant, sur les quatre buts inscrits, trois proviennent d’erreurs individuelles adverses. Le dernier est le seul inscrit sur passe décisive et celle-ci est provient du travail de Benzema. Le Français débloque une situation arrêtée plutôt qu’il ne prolonge un mouvement collectif. Cette incapacité à déverrouiller le bloc adverse prive le Real de situations de surnombre et fige les positions de joueurs proposant peu de mouvement.
Or, les phases de possessions déterminent la qualité du contre-pressing madrilène. L’équipe étant figée à la perte du ballon face à un bloc resté compact, elle est immédiatement vulnérable et peu agressive. KB nueve et sa bande ne sont pas en position de gêner la relance adverse en forçant à reculer ou à dégager. Ainsi, la défense souffre énormément sur transition défensive, souvent abandonnée par son milieu et subissant une projection rapide des attaquants adverses. L’équipe est coupée en deux, les quatre arrières reculent et sont en situation de un contre un, voire d’infériorité numérique. L’équipe de la capitale doit son salut à Thibaut Courtois, homme du début de saison. Avec 3,3 arrêts par match, il repousse 87% des tentatives adverses.
Le Real est incapable de défendre aujourd’hui. La disposition sans ballon fait que Casemiro doit être partout à la fois et Odegaard arrive toujours en retard.
Quand Canales et Fekir se mettent à combiner avec leurs coéquipiers, le Real est totalement dominé.
— Elias Baillif (@Elias_B09) September 26, 2020
Les crash-tests Ødegaard et Jović
Titulaires lors des deux premières journées, Martin Ødegaard peine à peser sur le jeu madrilène. Aligné derrière l’attaquant, il est éclipsé par les décrochages de Benzema et la paire Kroos-Modrić qui monopolise beaucoup le ballon. Dans cette position, il est bloqué dos au jeu et rend des copies trop banales, sans déchet, mais neutres. Ses passes sont essentiellement vers l’arrière, il ne tente aucun dribble sur les deux matches et ne participe pas à la création. Il est davantage utilisé comme joueur de conservation et ne profite pas de ses qualités évidentes pour déclencher des mouvements collectifs. Tant d’options sont possibles avec son profil qu’il faudra sans doute du temps au double Z pour trouver comment tirer le meilleur de son jeu.
Enfin utilisé par le coach français, Luka Jović gaspille une première cartouche face au Betis. Avis aux amateurs de films d’horreur, contre Fekir et ses copains, le Serbe est fantomatique. Avec 14 ballons touchés pour 6 perdus et aucun tir tenté, la performance ferait presque pâlir Mauro Icardi. La partie suivante contre Valladolid est de meilleure facture. Il décroche, participe à plusieurs mouvements et s’il croque, sa présence dans la surface est utile. Sans être transcendant, il existe au moins dans le jeu, épaulé par un Isco qui a remplacé notre ami norvégien dans le onze. L’Espagnol désencombre l’axe en évoluant à gauche et joue plus vers l’avant. Néanmoins, le dragon à deux têtes Benzema-Jović n’enflamme pas les débats, les deux hommes ne s’échangeant que très peu le cuir.
Va où Levante portera
Noir Désir disait que le vent nous porterait, alors pourquoi pas vers la voie du succès. Face à Levante, recette classique et retour au 4-3-3 pour affronter le club valencien. Au menu, une brochette Vinicius-KB-Asensio sur son lit de Modrić-Casemiro-Valverde. Le chef Zinédine nous prépare un plat moins fade que lors des services précédents.
Les deux ailiers sont utiles pour exploiter la profondeur et permettent au Real de monter vite vers l’avant. Le trident offensif est plus complémentaire, permute et exploite la largeur. Le feat Vini Jr. X Nueve fonctionne, les deux hommes combinent, retrouvant certains automatismes. Le français trouve l’ailier deux fois dans la surface. La réciproque s’est autant produite. Seul milieu créateur du onze de départ, le magicien croate Luka lance bien les trois de devant sur transitions offensives et attaque les demi-espaces à plusieurs reprises.
O bonito gol do @vinijr que abriu o placar para o @realmadrid contra o Levante. #RMLiga pic.twitter.com/ZEW6gnUCD7
— Márcia Magalhães (@marcimag_) October 4, 2020
En revanche, la fin de match est difficile. Les Madrilènes vendangent beaucoup et n’arrivent plus à jouer. Zidane tarde à faire rentrer des milieux pour reprendre le contrôle, Isco et Ødegaard ne grattant que quelques minutes. Défensivement, l’affaire est toujours aussi catastrophique et Valverde comme Casemiro ne compensent pas par leurs courses la distance à la perte du ballon. Résultat, une défense encore à l’abandon et un grand Courtois qui sauve les meubles.
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L’ex numéro 10 des Bleus dispose en fait de beaucoup de cartes en main. Mais ce jeu bien garni est-il seulement assez qualitatif pour que le Real Madrid remporte la mise ? C’est là toute l’interrogation autour de cette saison. Les murmures de titre au rabais l’an passé bourdonnent en fond, sans que l’effectif ne se soit renouvelé. L’équipe boit pour l’instant les points avec difficulté, loin de tomber dans l’ivresse du beau jeu. Sans saveur, Los Merengues trônent pourtant au sommet du classement, à défaut de briller.
À Zizou la tache de dissiper cette vague de brouillard autour de son cockpit. Les passagers n’aiment pas trop les retards imprévus et c’est tout l’équipage qui joue son futur à bord de l’avion blanc. Alors attachez vos ceintures et profitez de la vue, le voyage ne fait que commencer.
Crédit Photo : IconSport