9 avril 2013 : le Malaga FC est éliminé en quarts de finale de Ligue des champions sur le fil par un Dortmund plus que chanceux (0-0, 3-2). On pensait alors assister à l’éclosion d’un « nouveau riche » de la scène européenne, dopé aux millions qataris. 7 ans plus tard, le club est aux abois, à la lutte pour le maintien en deuxième division. Comment expliquer cette lente agonie, au point d’évoquer depuis peu la disparition pure et simple du club ?
Idylle en trompe-l’œil
Petit retour en arrière. Nous sommes en 2010, Manchester City est déjà passé sous le giron émirati et les médias font leur chou gras sur un rachat potentiel du Paris Saint-Germain par QSI. Au milieu de ces opérations pharaoniques, les richissimes États du golfe arabique acquièrent des clubs d’envergure moindre, afin d’asseoir un « soft power » destiné à préparer le futur de ces pays ainsi que la Coupe du monde 2022 au Qatar. Au mois de juin, Malaga est racheté par le cheikh Abdullah ben Nasser Al Thani. Une aubaine pour ce club mythique du championnat espagnol, en difficulté.
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Le nabab qatari investit en masse. On parle d’une première enveloppe de 150 millions d’euros, une somme énorme comparée aux standards habituels du club. Les premiers noms ronflants arrivent, et les supporters se surprennent à rêver : van Nistelrooy, Toulalan, Cazorla… Les résultats suivent, Malaga joue les premiers rôles sur la scène nationale. Mais déjà, les premières polémiques enflent. Retards de paiement envers joueurs et clubs, démission du directeur sportif… Malgré cela, les choses continuent à leur rythme et le club andalou va même vivre un des plus beaux exploits de son histoire, lors de la saison 2012-2013. Premiers de leur groupe de Ligue des champions devant l’AC Milan de Max Allegri, les Boquerones s’offrent le scalp du FC Porto en huitièmes de finale (1-0, 2-0). En quart de finale pour la première fois de son histoire, il faudra beaucoup de réussite et l’aide des arbitres pour que le Borussia Dortmund (qui ira jusqu’en finale) l’emporte au bout du suspense.
Difficile alors pour les supporters de la Rosaleda, malgré ces premières polémiques, de se plaindre. Les résultats étaient là, l’équipe pouvait s’enorgueillir de compter dans ses rangs des joueurs comme Demichelis, Joaquin, Isco ou Javier Saviola. La machine à rêves tournait à plein régime. Mais tous les squelettes dans le placard ont fini par rejaillir.
Spleen et cheikh en bois
À ce jour, cette campagne européenne reste le plus bel exploit de Malaga sous la coupe du cheikh Al Thani. Et de loin. Dès 2014, quelques signes avant-coureurs promettent un avenir sombre du côté de l’Andalousie. Le richissime propriétaire n’hésite pas à affirmer sur Twitter qu’il compte abandonner le club, selon lui car il n’a pas trouvé de « respect, de reconnaissance et d’équité ». Il se ravisera le lendemain, mais le mal est fait. Malaga se retrouve très vite confronté à de graves problèmes financiers dont il ne se relèvera pas. Rattrapé par la patrouille, le club se voit même interdit de toute compétition européenne pour non-respect du fair-play financier. Les stars prennent le large, Malaga coule en silence.
On boira le calice jusqu’à la lie sur la côte méditerranéenne, avec une descente en deuxième division au terme de la saison 2017-2018. Le cheikh Al Thani s’enferme alors dans une communication incendiaire, prenant tout un chacun pour cible, du maire de la ville à l’ancien directeur sportif, dans l’objectif de se dédouaner de toute responsabilité dans l’échec du projet. On ne le voit plus sur les côtes andalouses, toute communication se fait depuis le Qatar. Circulez, il n’y a rien à voir.
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Aux dernières nouvelles, la justice espagnole a nommé un administrateur judiciaire à la tête de Malaga, révoquant de ce fait le président fantôme, toujours aussi occupé à sauver son image en inondant les réseaux sociaux. Il devra tout de même répondre de ses actes. Un groupe d’actionnaires minoritaires a déposé une plainte visant la mauvaise gestion du club par son ancien président, ainsi qu’un soupçon de détournement de fonds. Pendant ce temps, un plan de licenciement massif a été mis en place pour permettre au club de subsister. Ajoutez à cela l’entraineur, viré en janvier après la diffusion d’une sextape le concernant, et vous obtenez une des situations les plus rocambolesques du football professionnel européen. Les supporters de Malaga, eux, n’ont que leurs yeux pour pleurer. Et leurs souvenirs à ressasser.
Crédit photo : Marca / Icon Sport.