Pour beaucoup, cette époque constitue l’apogée du football anglais. L’époque où un certain entraîneur alsacien, alors inconnu au bataillon, pose ses bagages du côté du nord de Londres après une expérience en territoire japonais, la valise remplie d’idées qui allaient révolutionner le football anglais. Un football alors dominé par un Ecossais du nom de Sir Alex Ferguson, aussi impitoyable qu’empathique, et dont le Manchester United s’avère être un véritable rouleau compresseur écrasant tout sur son passage. Bientôt ces deux visions différentes du football – une vision plus européenne, continentale, s’imposant comme un vent de fraîcheur prêt à souffler sur tout le Royaume et l’autre plus territoriale, usuelle, et profondément ancrée dans la tradition – allaient entamer un affrontement dogmatique légendaire aujourd’hui ancré dans l’histoire. Une rivalité féroce, acharnée, devenue presque chimérique par instants, et incarnée par de valeureux guerriers dont les excès de zèle sont devenus tout simplement mémorables. Parmi ces moments qui ont marqué les esprits, un après-midi nuageux d’octobre 2004. Les Invincibles d’Arsenal, alors invaincus en championnat depuis 49 matchs, se rendent dans le fameux Théâtre des Rêves avec la ferme intention d’étendre leur record à 50. Mais au terme d’un match très controversé, c’est le Manchester United du flamboyant Sir Alex Ferguson qui met fin à leur série d’invincibilité. Au coup de sifflet final, comme à l’accoutumée, les esprits s’échauffent très vite entre Gunners et Mancuniens. Et un jeune espagnol alors âgé de 17 ans ne le sait probablement encore pas, mais son geste va participer à accentuer encore plus la rivalité entre les deux équipes et le caractère historique de leur duel : un lancer de part de pizza directement dans la tête de l’illustre Sir Alex Ferguson. La presse parlera plus tard de cet épisode comme celui de “La Bataille du Buffet”, ou “Pizzagate”. Retour sur les origines de cette féroce rivalité opposant l’Arsenal de Wenger au Manchester United de Sir Alex durant les années 1990 et 2000.
Selon Sir Alex lui-même, cette rivalité entre Arsenal et Manchester United daterait du tout début des années 1990. En effet, au mois d’octobre de la même année, les deux équipes se rencontrent à Old Trafford pour un match de championnat. Arsenal ouvre le score par l’intermédiaire du Suédois Anders Limpar. Plus tard dans le match, un tacle très musclé du rugueux défenseur anglais Winterburn sur le Mancunien Irwin échauffe les esprits d’un match à l’atmosphère très tendue. Irwin et son coéquipier McClair se vengent, Winterburn se fait prendre à partie puis une bagarre de 20 secondes éclate entre la quasi-totalité des joueurs d’Arsenal et ceux de Manchester United. Le score ne changera pas, les deux équipes se verront retirer des points suite à ces incidents et distribueront des amendes aux joueurs impliqués ainsi qu’à l’entraîneur d’Arsenal de l’époque, George Graham. La rivalité ne fait alors que commencer.
Un court résumé de la rencontre entre Manchester United et Arsenal durant la saison 1990/1991
Avec l’arrivée d’Arsène Wenger à la tête du club du nord de Londres, elle va vraiment s’intensifier. En février 1997, durant la première saison de l’entraîneur alsacien à la tête d’Arsenal, un nouvel incident se produit à l’occasion d’un match entre les deux équipes. Alors que Manchester United gagne 2 buts à 1 suite à des réalisations respectives de Cole et Solskjaer puis une réduction de l’écart par Bergkamp, le match va être entaché par un nouvel incident. En fin de match, alors que le portier d’United Peter Schmeichel sort de ses cages, Ian Wright tente de récupérer le ballon avec ses deux pieds et écrase littéralement les tibias du Danois. S’en suit une fin de match alors très compliquée où l’intervention de la police sera nécessaire pour garder les joueurs à distance. En conférence de presse, Wenger et Ferguson ne cachent pas leur animosité et débute alors une période de joutes verbales à distance qui va durer pendant plus de 10 ans.
Pour les courageux, un long résumé de la rencontre et de l’incident entre Wright et Schmeichel durant la saison 1996/1997
Quelques temps plus tard, en mars 1998, les deux équipes se retrouvent à nouveau à Old Trafford et Arsenal parvient à s’imposer 1 but à 0 grâce à une réalisation de Marc Overmars. Un match très important dans la course au titre qui permettra à Arsène Wenger de réaliser son premier doublé Championnat – FA Cup dès sa deuxième saison avec le club londonien, alors que 4 des 5 dernières campagnes de championnat avaient été glanées par Sir Alex. Cette rivalité va continuer jusqu’à la fin des années 1990 avec des moments mémorables, comme la campagne de championnat 1998-1999 qui sera remportée par Manchester United avec seulement un point d’avance sur Arsenal, ou encore le replay d’une demi-finale de FA Cup en 1999 qui est à ce jour toujours un moment historique du triplé réalisé par Manchester United, avec un but incroyable de Ryan Giggs en prolongations.
Le fameux but de Ryan Giggs permettant à un United mal en point d’arracher son ticket pour la finale de la FA Cup 1999
Cette rivalité historique entre Arsenal et Manchester United va tourner à l’avantage des hommes de Ferguson au passage des années 2000, et beaucoup pensent alors que les heures de gloire Wengeriennes sont passées. Et pourtant : le 8 mai 2002, au terme d’une saison disputée, les hommes d’Arsène Wenger ont la possibilité de devenir champions d’Angleterre… sur la pelouse de leurs rivaux. Grâce à un but historique de Sylvain Wiltord, Arsenal s’impose 1 à 0 et réussit l’exploit de célébrer son titre à Old Trafford. Un fait d’armes qui restera longtemps en travers de la gorge des Mancuniens.
Résumé du match qui a permis à Arsenal d’être sacré champion à Old Trafford grâce à une victoire 1 à 0 assurée par un but de Wiltord (une version complète du match est également disponible sur Youtube)
Bien décidés à laver cet affront, les hommes de Sir Alex remportent le championnat l’année suivante. Mais si la rivalité est féroce et la tension palpable entre les deux équipes, les choses ne vont pas tarder à prendre encore plus d’ampleur. Durant la saison 2003-2004, Arsenal réalise l’exploit de terminer toute une saison de Premier League sans perdre un seul match. Si cette prouesse résonne toujours aujourd’hui comme une consécration, tout aurait pu être très différent.
En effet, très tôt dans la saison, le 21 septembre 2003 plus exactement, Arsenal se rend à Old Trafford pour un match de Premier League qui, une fois n’est pas coutume, deviendra lui aussi historique et que la presse anglaise appellera plus tard : “la Bataille d’Old Trafford”. Ce match est considéré comme le préambule de la Bataille du Buffet qui tirera son nom médiatique en référence à ce match. Il faut cependant attendre la 80ème minute pour voir cette rencontre obtenir tout son caractère historique. Suite à un duel avec Ruud van Nistelrooy, le milieu français Patrick Vieira (figure emblématique de cette rivalité entre Arsenal et Manchester United qu’il a incarnée durant ses nombreuses houleuses altercations avec l’irlandais Roy Keane), au sol, tente d’asséner un coup de pied à l’attaquant néerlandais. Il ne le touche pas, mais se voit exclure du fait de l’intentionnalité de son geste. Des échauffourées éclatent à nouveau entre les deux équipes, alors qu’Arsenal est réduit à 10 pour la dizaine de minutes restante. En plein dans le temps additionnel, suite à centre côté droit, le défenseur d’Arsenal Martin Keown ceinture l’attaquant Mancunien Diego Forlan et le fait tomber dans la surface. L’arbitre accorde un penalty à Manchester. Van Nistelrooy obtient l’opportunité de donner la victoire à son équipe en se chargeant de le tirer. Il s’élance, et frappe en force… le ballon rebondit sur la barre de Jens Lehmann. Keown intimide alors Van Nistelrooy, le match continue et quelques secondes plus tard, l’arbitre met fin à la rencontre.
Les joueurs d’Arsenal jubilent et certains, comme Keown notamment, prennent à partie van Nistelrooy au coup de sifflet final. Une fois n’est pas coutume, les esprits s’échauffent entre les joueurs des deux équipes puis entre les deux entraîneurs durant leur conférence de presse respective. Wenger accuse les joueurs de Manchester United de tricher, tandis que Ferguson, lui, dément. Au final, 6 joueurs d’Arsenal écopent d’une amende pour mauvaise conduite, le club est sanctionné lui-aussi. 4 joueurs d’Arsenal et 2 de United sont suspendus. Une page de la rivalité entre les deux équipes s’écrit alors avec ce match qui finira par peser lourd dans la balance, car à un penalty près, les Invincibles d’Arsenal auraient pu ne jamais exister.
Le résumé de la Bataille d’Old Trafford et notamment des dix dernières minutes riches en rebondissements
La Bataille du Buffet
Le 24 octobre 2004, soit quelques mois après leur sacre légendaire, c’est toujours invaincus que les Gunners d’Arsène Wenger se rendent à Old Trafford à l’occasion d’un match d’une nouvelle saison de Premier League. Forts de leur série de 49 matchs sans défaite en championnat, les Londoniens espèrent pouvoir étendre leur record à 50 sur la pelouse de leurs rivaux. Dans sa conférence de presse d’avant-match, Ferguson revient sur les incidents qui se sont déroulés il y a tout juste plus d’un an : “ce que les joueurs d’Arsenal ont fait ce jour-là, c’est la pire chose que j’ai pu voir dans ce sport.” La pression est clairement sur Manchester United, parce qu’avant le coup d’envoi, Arsenal, premier, compte 11 points d’avance. De plus, les Mancuniens ont un objectif clair en tête : empêcher Arsenal de célébrer leur série de 50 matchs sans défaite sur leur propre pelouse. La rencontre est arbitrée par Mike Riley, et tout le monde dans le Royaume le sait : arbitrer un Manchester United-Arsenal, ce n’est jamais chose facile. Au contraire, l’ambiance du match s’annonce clairement électrique. Pour ce qui en est des compositions, Carroll est aligné dans les buts côté Manchester. Devant lui, le back four est composé de Heinze, le Français Silvestre, Ferdinand et Gary Neville. Au milieu, un double pivot Scholes-Phil Neville, avec un Roy Keane absent pour cause de maladie. Ryan Giggs est aligné côté gauche, le jeune Cristiano Ronaldo, lui est aligné côté droit. Devant, Van Nistelrooy occupe la pointe de l’attaque, avec la jeune pépite anglaise récemment arrivée en provenance d’Everton, Wayne Rooney, juste derrière lui. Côté Arsenal, Lehmann occupe les cages, avec devant lui un back four composé de Lauren, Campbell, Kolo Touré et Ashley Cole. Arsenal évolue en 4-4-2 avec un double pivot Vieira-Edu, tandis que Ljungberg et Reyes occupent les ailes. Devant, le traditionnel duo franco-néerlandais composé de Dennis Bergkamp et de Thierry Henry. Sur le banc, Cesc Fabregas.
Le match commence de manière très tumultueuse : les contacts sont durs, les tacles appuyés et remplis d’animosité, comme attendu dans cette rencontre particulière. Vers la vingtième minute de jeu, Ljungberg est lancé seul dans la profondeur. Ferdinand, en position de dernier défenseur, bouscule et déséquilibre le Suédois. L’arbitre siffle faute mais n’avertit pas le défenseur central : une première décision qui va irriter les joueurs d’Arsenal et leur staff. Un peu plus tard, entre deux interventions plus que très musclées des frères Neville sur le regretté Reyes, c’est van Nistelrooy qui essuie littéralement sa semelle sur le tibia d’Ashley Cole. Encore une fois, l’arbitre ne daigne pas sanctionner. Les deux équipes n’ont que quelques occasions durant la première mi-temps légèrement dominée par Arsenal.
La deuxième démarre sur les mêmes bases, avec une domination londonienne qui va durer jusqu’à l’heure de jeu. C’est véritablement à la 73ème minute de jeu que le match va basculer. Une mauvaise relance de Kolo Touré permet à United d’avoir un avantage numérique aux abords de la surface. Wayne Rooney récupère le ballon côté droit, et son contrôle qui semble un peu long pousse Sol Campbell sur ses appuis, et ce dernier est désorienté par le crochet extérieur du pied alors réalisé par l’attaquant anglais. Rooney s’écroule dans la surface de réparation, et Mike Riley désigne le point de penalty sans l’ombre d’une hésitation. Les images au ralenti sont formelles : à aucun moment il y a eu un contact entre Rooney et Campbell qui retire son pied avant que Rooney tombe. Une nouvelle décision très litigieuse qui va grandement contribuer aux événements qui se sont déroulés après le coup de sifflet final. Une nouvelle fois, l’histoire se répète : Ruud van Nistelrooy se retrouve à nouveau en face-à-face avec Lehmann, avec l’opportunité de pouvoir influer sur l’histoire. Son penalty manqué un an avant avait coûté très cher à United. Le Néerlandais a désormais l’occasion de se venger. Sa frappe prend Lehmann à contre-pied et permet à United de mener au score. Arsenal se rue alors vers l’attaque dans le but de maintenir son record d’invincibilité, et Manchester United se montre dangereux en contre-attaque. Quelques minutes plus tard, un nouvel incident intervient dans la surface de réparation des Gunners, avec un Cristiano Ronaldo visiblement déséquilibré par Ashley Cole, mais l’arbitre n’accorde pas de nouveau penalty. En toute fin de match, un bel échange entre Luis Saha et Alan Smith permet à Rooney d’enfoncer le clou. L’arbitre donne le coup de sifflet final, et le Manchester United de Sir Alex met fin au record d’invincibilité d’Arsenal qui aura duré pendant 49 matches de championnat.
Le résumé de la controversée Bataille du Buffet qui voit Manchester United mettre fin au record d’invincibilité des Gunners
Une fois le match à son terme, tout va s’enflammer très rapidement. Le traditionnel échange de maillots n’a pas lieu, certains joueurs refusent de serrer la main de leurs adversaires. En rentrant aux vestiaires, une altercation générale finit par éclater malgré la présence de la police locale. Wenger s’en prend à Van Nistelrooy à cause de sa semelle sur Cole, Ferguson le confronte et lui demande de laisser ses joueurs tranquilles. Dans la cohue générale opposant joueurs et staffs des deux équipes, une part de pizza, vraisemblablement lancée par un joueur d’Arsenal, finit par atterrir en plein dans la tête de Sir Alex Ferguson qui n’aura pas d’autre choix que de se changer pour effectuer ses interviews d’après-match.
Un peu plus tard, Ashley Cole apporte des indices sur l’identité du lanceur : il n’est “ni anglais ni français”. En conférence de presse, Arsène Wenger, gronde : “Nous ne pouvons que maîtriser notre performance, pas celle de l’arbitre. Encore une fois, on a eu le penalty habituel sifflé contre nous lorsque l’on vient jouer contre Manchester United et qu’ils sont en difficulté. C’est arrivé la saison dernière et c’est arrivé une nouvelle fois aujourd’hui.” L’entraîneur alsacien regrette la simulation de Rooney et le comportement de Van Nistelrooy, qu’il trouve honteux. Ferguson, lui, regrette le comportement agressif de Vieira envers l’arbitre, jugeant que le milieu français lui a rendu la tâche d’arbitrer ce match tout simplement impossible.
Quelques jours après le match, la FA décide de sanctionner Wenger financièrement pour ses propos en conférence de presse. Ruud van Nistelrooy écope également d’une sanction : une suspension de 3 matches suite à sa semelle sur Ashley Cole. Pour de nombreux journalistes anglais, ce match entre Manchester United et Arsenal est un des moments les plus marquants de l’histoire de la Premier League, et un des moments les plus marquants de la relation entre Sir Alex Ferguson et Arsène Wenger qui s’est fortement dégradée à cet instant. Cette victoire a fait en effet énormément de bien psychologiquement à l’entraîneur écossais et a beaucoup atteint l’entraîneur français. S’exprimant suite à l’annonce de sa retraite en 2013, Sir Alex Ferguson est depuis revenu sur cet incident de la Bataille du Buffet : “Et d’un seul coup, j’avais de la pizza partout sur moi. Nous mettions de la nourriture à disposition dans le vestiaire visiteur après chaque match. De la pizza, du poulet… la plupart des clubs faisaient pareil. Ils disent que c’est Cesc Fabregas qui a jeté la pizza sur moi, mais encore aujourd’hui, je n’ai aucune idée concernant l’identité du coupable.”
Depuis, la lumière a été faite sur cet incident, après que le coupable en question, l’ancien milieu de terrain des Gunners, Cesc Fabregas, ait fait des révélations à ce sujet : “La manière dont ça s’est passé, on s’est senti lésé, parce qu’on ne méritait pas de perdre ce match, et nous étions frustrés. Quand tu as 30 joueurs qui rentrent aux vestiaires en même temps, c’est assez serré, ça se bousculait et ça se titillait un peu. Vu que je n’avais pas joué, j’étais un des tout premiers à rentrer dans le tunnel et j’ai tout de suite vu la pizza parce que j’avais faim. J’ai commencé à entendre des cris et quand je suis sorti j’ai vu Rio Ferdinand avec tous les grands, Thierry, Sol Campbell, commençant à en découdre. J’étais jeune et je ne savais pas quoi faire parce j’étais petit et maigre, et pour être honnête [en lançant la pizza] je n’ai visé personne, mais je l’ai fait parce qu’il n’y avait pas grand-chose d’autre que je pouvais faire dans ce tunnel plein de grands bonhommes en train de se disputer. J’ai appris plus tard que ça avait touché Monsieur Ferguson, je me suis déjà excusé publiquement et je le ferai à nouveau. Ce n’était pas intentionnel, c’était dans la fièvre de l’instant. J’étais jeune, je n’utiliserais certainement pas une pizza aujourd’hui, je rentrerais dedans directement!”
Le mot de la fin
Cette rivalité entre ces deux institutions et ces deux entraîneurs de légende a connu son apogée durant cette période de la Premier League des années 2000-2005. À partir de ce moment, l’éclosion du Chelsea de Roman Abramovitch (puis, plus tard, de Manchester City) est venue diluer l’essence même de cette guerre entre Mancuniens et Londoniens. Il faudra attendre 2009 et la demi-finale retour de Champions League jouée à l’Emirates entre les deux clubs pour que l’amertume et le ressentiment entre les deux entraîneurs se transforment finalement en respect et admiration mutuelle. Manchester United s’impose 3 buts à 1 à l’Emirates avec un match fantastique de Cristiano Ronaldo, et Wenger invite son homologue écossais en loges à la fin du match pour le féliciter de la victoire de son club. Une pratique à laquelle le technicien alsacien avait refusé de se soumettre à son arrivée dans le Royaume, et qui avait eu pour effet d’horripiler Ferguson. De plus, par la suite, après le déménagement de Highbury vers l’Emirates, Arsenal aura du mal à jouer les premiers rôles sur le plan national, ce qui contribuera également à nuancer la rivalité entre les deux clubs. Beaucoup de matchs ou de faits vont tout de même rappeler aux fans des deux équipes l’époque de leur ancienne rivalité, comme les transferts de van Persie et d’Alexis Sanchez d’Arsenal vers Manchester United, la victoire 8-2 des Mancuniens en 2011 ou encore le quart de finale de FA Cup en 2015 qu’Arsenal va remporter 2-1 grâce à un but d’un ancien de la maison, Danny Welbeck.
En conclusion, si la guerre entre Arsenal et Manchester United n’est aujourd’hui plus qu’un symbole d’anciens jours de gloire d’une époque révolue, c’est également bien plus que cela. C’est un témoignage des nombreux changements qui ont façonné cette époque, une incarnation du tournant qui allait s’opérer dans le monde du ballon rond avec la rencontre entre la délicatesse et la légèreté d’un nouveau type de football plus européen se confrontant à l’intensité de l’ancien et traditionnel football anglais. Une bataille d’une décennie aux allures épiques, presque bibliques, incarnée par une relation aussi sulfureuse que passionnée entre deux amoureux et philosophes du football : d’un côté, l’étranger et éternel outsider français qui a su ouvrir le Royaume-Uni vers le monde pour faire de la Premier League ce qu’elle est aujourd’hui, et de l’autre son éternel rival écossais attaché aux traditions, véritable génie dans l’art de tirer le meilleur de ses joueurs grâce à son côté compétiteur fou. Ils ont eu beau se détester, se respecter puis finalement, s’aimer : l’un ne serait pas devenu ce qu’il est sans l’autre, et vice versa. Les grands vainqueurs de ces innombrables affrontements restent tout de même les fans du football anglais qui ont eu la chance d’assister à cette rivalité légendaire qui a, à jamais, marqué l’histoire au fer rouge.
Pour finir, voici un florilège des meilleurs extraits de conférences de presse données par Arsène Wenger et Sir Alex durant leurs célèbres querelles verbales à distance :
Sir Alex Ferguson après la nomination d’Arsène Wenger à la tête d’Arsenal : “Ils disent que c’est un homme intelligent, c’est ça ? Il parle 5 langues ? J’ai un gamin de 15 ans en provenance de la Côte d’Ivoire qui parle 5 langues !”
Arsène Wenger en 1997 après le match contre United et l’incident entre Ian Wright et Schmeichel : “J’étais surpris de voir Ferguson sur la pelouse parce que normalement on ne peut jouer qu’à 11.”
Sir Alex Ferguson en mars 2002 concernant les habitudes après-match de Wenger : « Il ne vient jamais boire un coup avec l’entraîneur adverse après les matches. C’est le seul entraîneur en Premier League à ne pas le faire. C’est une tradition ici. Ce serait bien pour lui d’accepter les traditions. »
Arsène Wenger durant la saison 2001-2002 après que Sir Alex ait déclaré que Manchester United était la meilleure équipe du championnat depuis Noël : “Tout le monde pense qu’il a la plus belle femme à la maison.”
Sir Alex Ferguson en janvier 2005 s’exprimant sur la Bataille du Buffet : “Dans le tunnel, Wenger critiquait mes joueurs, les insultait de tricheurs, donc je lui ai dit de les laisser tranquille et de mieux se comporter. Il a couru vers moi avec les mains en l’air et en criant “Qu’est-ce que tu veux qu’on fasse à propos de ça?” Ne pas s’excuser du comportement de ses joueurs envers un autre entraîneur est impensable. C’est une honte, mais je m’attends pas à ce que Wenger s’excuse un jour.. c’est quelqu’un comme ça. »
Arsène Wenger en 2005 après les commentaires de Sir Alex sur l’incident de la Bataille du Buffet un an avant : “Ferguson fait ce qu’il veut et vous, la presse, êtes tous à ses pieds. Il ne m’intéresse et ne compte pas pour moi du tout. Je ne répondrai plus jamais à ces provocations. Il a perdu tout sens des réalités : il cherche une confrontation puis demande à la personne qui le confronte de s’excuser ! »
Bonus pour les anglophones : documentaire exclusif « The Feud » qui revient sur l’histoire des querelles entre Wenger et Ferguson avec de nombreuses interviews de joueurs et de journalistes
Photo crédits : iconsport