À quatre journées de la fin de la Liga, et à quelques heures d’une rencontre décisive face aux hommes de Diego Simeone, le Barca compte bien boucler sa saison avec une Liga en poche. Passé un automne tortueux pour mieux fleurir au printemps, l’heure est au bilan pour Ronald Koeman et ses hommes.
Le prélude
Août 2020, le Barça est corrigé par le Bayern Munich (8-2), et s’enfonce encore un peu plus dans la crise quand son petit argentin dépose un fax dans le bureau de Bartomeu pour quitter le club. Nommé le 18 août à la tête de l’équipe première pour succéder à Setién, Ronald Koeman devait certainement se demander dans quel bourbier il s’était embarqué. D’autant plus que le héros de 1992 quitte la sélection des Pays-Bas, une petite année seulement avant le début de l’Euro 2020 où les Bataves figuraient comme outsider pour la victoire finale.
C’est donc avec une institution en plein naufrage, démuni des cadres de l’année précédente partis loin du Camp Nou (Suarez, Rakitic, Vidal) et avec un nouveau staff sur le banc de touche, que le Barca va lancer sa saison 2020-21. Année de transition pour certains, écroulement à prévoir pour d’autres, il faut dire qu’on ne donnait pas cher de la peau de Barcelone cette saison. Encore moins quand le club comptait 12 points de retard sur l’Atletico à la 12ème journée de Liga début décembre.
La vie en Oranje
Mais voilà. Presque 6 mois et 23 journées plus tard, les hommes de Koeman s’apprêtent à jouer samedi après-midi contre l’Atletico une sorte de finale pour le titre, puisque les Blaugranas ne sont qu’à deux petites longueurs derrières les Colchoneros. Si en octobre dernier nous tirions déjà un premier bilan encourageant de l’ère Koeman à la veille d’un Clasico qui sera déterminant au final (puisque le Real peut être sacré champion en cas d’égalité avec le Barca) ; en mai, la note globale est plus que convaincante pour la légende du club.
Cette année, Barcelone a enfin retrouvé des couleurs dignes d’une véritable équipe de football, redonnant des émotions et du spectacle à ses supporters, à l’image du parcours en Coupe du Roi conclu par une correction contre Bilbao en finale (4-0) et un 31ème titre dans la compétition. Après trois ans d’une époque Valverde-Setién presque insipide minée par les lacunes tactiques et les manques caractériels de ces entraîneurs, le football est revenu en Catalogne au meilleur des moments.
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Sous Koeman, le terrain a été replacé aux centres des débats. Au niveau du jeu, l’entraîneur hollandais a donné une vraie impression de remise en question au cours de la saison. Privilégiant un 4-2-3-1 lors de la première partie de saison, il n’a pas cessé de modifier sa formation et les associations en s’adaptant au manque de numéro 9 ou aux blessures de Coutinho, Ansu Fati ou Gérard Piqué.
À Séville (0-2) fin février, une semaine après la déroute contre Paris (1-4), les réflexions de Koeman aboutissent sur une défense à trois, le fruit de ce qu’il cherchait à mettre en place depuis le début. Mettre ses joueurs dans les meilleures conditions possibles (Alba piston gauche, grande liberté accordée à De Jong, Messi et Griezmann assez proches), tout en limitant le manque de fiabilité de certains (couvrir Busquets et renforcer la défense centrale). Et il faut dire que cela a bien fonctionné : 10 victoires sur les 12 derniers matches avec des prestations très solides contre Huesca, la Sociedad ou Bilbao.
Roulez jeunesse !
L’autre réjouissance côté Barca cette saison demeure dans la jeunesse de cette équipe. Avec un âge moyen avoisinant les 25-26 ans dans l’effectif, le contraste est cinglant par rapport à la saison dernière où Quique Setién avait aligné l’équipe la plus âgée de l’histoire du club contre Séville : 30,7 ans de moyenne. Qui dit jeunesse, sous-entend talent. Et le Barca regorge de gamins talentueux. Pedri devenu titulaire indiscutable aux yeux de Koeman, De Jong et ses 48 matches joués (TCC) retrouvant vie sous les ordres de son ancien coach en sélection ou Ansu Fati, époustouflant avant sa grave blessure au ménisque.
La confiance qu’accorde Ronald Koeman à ces gamins est synonyme d’une forme de méritocratie retrouvée au sein du club. Les plus méritants jouent, peu importe le statut de tel ou tel joueur. Le coach a récupéré une forme d’autorité sur son groupe, là où Valverde et Setien en manquaient cruellement. Griezmann en a fait les frais à l’automne mais compte 16 buts et 10 passes décisives en 2021. Riqui Puig et Miralem Pjanic n’ont pas l’attitude attendue ? Tant pis, c’est Ilaix Moriba qui leur sera préféré en sortie de banc pour la deuxième moitié de la saison. Premier exercice en professionnel pour Oscar Mingueza ? Aucun soucis, il sera titulaire 7 fois sur 10 cette année. On dit souvent que les jeunes ont encore un disque dur vierge, Koeman l’a bien saisi pour imposer sa souveraineté et son plan de jeu à son équipe.
Attaque ou défense : où est le soucis ?
Depuis son élection en mars tant attendue par une grande partie des socios nostalgiques des grandes années Barca, le président Joan Laporta semble vouloir cocher rapidement deux objectifs : prolonger le contrat de Lionel Messi et faire venir une superstar offensive.
D’un côté on peut se dire qu’il n’a pas tort. Même si le Barca est de loin la meilleure attaque de la Liga avec 2,35 buts inscrits par matches et que ses statistiques d’efficacité sont plutôt bonnes (75 buts inscrits pour 73,1 xG), elles sont en partie relevées par Lionel Messi, auteur de 28 buts pour 22 xG. L’habituel surperformance du numéro 10 (37% des buts inscrits par Barcelone en Liga) vient combler la sensation d’un véritable manque d’efficacité quand on regarde Barcelone. Barcelone construit bien, Barcelone se crée des occasions, mais Barcelone a du mal à conclure quand le génie argentin n’est pas là pour pousser le ballon au fond des filets. Un problème lorsqu’il faut tuer le match ou se mettre définitivement à l’abri.
De l’autre, certains donneront tort à Laporta, et pointeront du doigt les largesses défensives du Barca coutant très cher cette saison. Entre erreurs individuelles, mauvais placements ou lenteur de certains centraux, les Catalans ont offert beaucoup trop de buts cette saison. 5 pénaltys concédés, 2 CSC, 6 erreurs menant à un but : la cage de Marc-André Ter Stegen n’est restée inviolée que 12 fois en Liga. S’il n’a pas été aidé par le manque de fiabilité de Piqué et Lenglet, ou par les sautes de concentration de Mingueza et Araujo, le portier allemand n’a pas été impérial cette saison.
Outre sa sortie manquée contre l’Atletico au match aller, l’ex de de Mönchengladbach a concédé 27 buts sur 26,3 buts attendus (PostShotxG). Un manque de tranchant dans les duels qui se traduit une nouvelle fois sur pénalty : sur les 5 concédés en Liga, Ter-Stegen n’en a sorti aucun. Résultat de ces buts donnés : des points bêtement perdus contre Cadiz (1-1), Grenade (1-2), Valence (2-2) ou d’autres et des défaites face au Real (1-3, 2-1) et les Colchoneros (1-0).
Ce manque de réalisme offensif et la fragilité défensive sont, peut-être, ce qui va leur coûter titre en Liga. En Ligue des champions, où l’impact des erreurs est démultipliée, cela n’a pas pardonné contre Paris. Après un match aller où le Barça a laissé la porte ouverte à Mbappé pour pratiquement les éliminer en 90 minutes (1-4), les Blaugranas ont encore clairement exposé leurs faiblesses au retour : incapacité à convertir les occasions et un but concédé sur pénalty contre le cours du jeu.
Pour certains supporters, une deuxième saison sans Liga additionnée à un échec en huitièmes de finale de Ligue des champions serait un échec cuisant et fatal pour l’avenir de Koeman. D’autres verront dans cette saison le commencement d’une nouvelle génération, ne cessant de progresser au fil des matches, et allant plus haut qu’espéré au départ. Si le résultat conditionne votre jugement final, on vous laisse attendre fin mai. Si non, on peut déjà tirer une grande partie du bilan de cette saison.