Il était l’une des plus grandes promesses du club à River Plate. Sa venue à l’AS Monaco a fait de lui le joueur le plus cher de l’histoire de la Ligue 2. Il fut pendant quelques temps une erreur de casting un peu trop porté sur les retournés acrobatiques à l’OM. Depuis ses prêts au Genoa et au Milan AC, il est maintenant la caution « grinta » du club de la cité phocéenne. À seulement 24 ans, Lucas Ocampos semble avoir déjà vécu plusieurs vies. Et alors que son club vient de recruter un concurrent direct à son poste en la personne de Nemanja Radonjić, Lucas va devoir s’employer pour faire ce qu’il fait de mieux : se battre pour prouver au monde du football tout entier qu’il y est à sa place.
Une pépite sur le Rocher
Le parcours de Lucas Ocampos est si singulier et à la fois si commun. Ce parcours, c’est celui d’un jeune argentin, qui comme beaucoup d’autres rêve de la gloire et des lumières du football européen. Originaire de la ville de Quilmes, non loin de la capitale Buenos Aires, Lucas est du type précoce. Après quelques années à taper le ballon dans sa bourgade natale, il est repéré par l’un des monuments du football albiceleste : le club de River Plate. Dans les catégories jeunes, il impressionne tout le monde par sa supériorité technique et son aisance des deux pieds. Si bien qu’il fait ses débuts chez les grands à seulement 17 ans. River en deuxième division, Lucas en profite pour faire son trou. Il se sert des opportunités qu’il a pour marquer les esprits. Son but ? Comme il le dira lui-même un an après ses débuts : « rejoindre l’Europe ».
Considéré comme l’un des tous meilleurs jeunes joueurs du pays et même du monde, il voit sa cote grimper en flèche. Après avoir aider son club formateur à retrouver l’élite du football argentin, il décide de faire le grand saut. En août 2012, le joueur d’à peine 18 ans signe pour un montant de 11 millions d’euros chez les nouveaux riches de l’époque : l’AS Monaco. Et pour un premier défi en Europe, quoi de plus évident que de tenter de faire remonter en première division le club pour lequel il officie ? Comme River Plate un an avant, l’AS Monaco, qui ne partage donc pas que les couleurs du club argentin, avait terminé le championnat à une place de relégable. Pour Lucas, ce sera donc un démarrage en douceur, lui qui veut performer pour qu’on puisse le comparer aux autres argentins ayant joué à l’ASM, Gallardo et Saviola en tête.
L’art de patiner
Ses débuts sont dignes de ce que l’on pouvait attendre d’un joueur de 18 ans n’ayant jamais joué en Europe par le passé. Poussif mais prometteur, l’Argentin se fait sa place dans le groupe et se fraye un chemin vers le 11 titulaire. Sans cacher ses ambitions, l’ASM remonte en Ligue 1 en 2013 et effectue un mercato à la hauteur de ce que les nouveaux dirigeants russes avaient pu annoncer. Falcao, Moutinho, James, l’effectif du club monégasque se veut qualitatif. De quoi faire passer un nouveau palier à Ocampos, dont les courbes de la progression auraient pu épouser celles du retour au premier plan de son club. En commençant la saison en tant que titulaire, Lucas a les cartes en main mais c’est bien à ce moment que la linéarité de son évolution a prit un coup. Son bilan comptable est loin d’être honteux, avec 5 buts (tous en sortie de banc) pour sa première saison dans un grand championnat européen, à même pas 20 ans. Mais il commence tout de même à agacer les supporters monégasques. Beaucoup de déchet dans le jeu, des difficultés à effacer ses adversaires directes, il fait face à ce que l’on appelle en NBA le « rookie wall ».
La saison suivante, c’est dans les derniers jours du mercato hivernal qu’il voit sa carrière potentiellement relancée. Prêté à l’Olympique de Marseille, il y rejoint une figure majeure du football de chez lui : Marcelo Bielsa. L’opération est prometteuse, un ex-futur grand joueur, coaché par un compatriote dont la faculté à faire éclore des jeunes talents est reconnue dans le monde entier. Les Marseillais ont l’eau à la bouche, eux qui aiment et chérissent tant cette connexion qui les lie à l’Argentine. Encore plus prometteur, l’impact immédiat qu’a pu avoir Ocampos. Premier match, premier but, contre le Stade Rennais. Une option d’achat de 11 millions d’euros automatique est comprise dans le deal en cas de qualification du club en Ligue des champions. Dans une seconde partie de saison conduisant l’OM à une 4ème place finale, « Luquito » se fait plus remarquer pour ses nombreuses tentatives de retournés acrobatiques et ses approximations balle au pied que par la qualité et la simplicité de son jeu. Et si l’option d’achat n’est donc pas levée, il signe tout de même définitivement à l’OM le même été contre un chèque de 7 millions d’euros.
Grinta mon amour
L’exercice 2015/2016 de Lucas Ocampos ne restera pas dans les mémoires. À sa décharge, c’est la saison de l’OM dans sa globalité que l’histoire ne retiendra pas. Trois coachs différents sur la saison, un contexte encore plus particulier qui ne le peut l’être habituellement, les conditions n’étaient pas réunies pour qu’un joueur puisse réellement briller. Après cette année que nous pourrons qualifier de difficile, Lucas refait ses valises et retrouve la route des prêts. Il passe la fin 2016 au Genoa, à la faveur d’une négociation dont seul l’immense Vince’ Labrune a le secret. La première moitié de 2017 se déroulera elle du côté du Milan AC. Une saison, deux prêts, un constat : Lucas Ocampos n’est pas devenu le joueur que son potentiel laissait miroiter du temps de ses exploits à River Plate.
C’est notamment pour cette raison que les supporters marseillais accueillent nonchalamment la décision de Rudi Garcia de le conserver dans l’effectif pour aborder 2017/2018. Et si Lucas n’est pas devenu le top-player qu’il aurait pu être, à seulement 23 ans, il n’était pas trop tard pour devenir quelqu’un malgré tout. Ça, le natif de Quilmes l’a bien compris. Sa saison est donc bien différente de toutes celles que l’on avait pu lui connaître précédemment. À l’aise dans le récent 4-2-3-1 de Garcia, Ocampos offre une bien nouvelle facette de sa personnalité et de son jeu. Sa qualité première est devenue sa grinta, si typique de sa mère patrie. Jamais avare en efforts de la première à la dernière minute qu’il passe sur un terrain, Lucas est mort de faim. Son jeu reste stéréotypé et plein de fioritures, ce qui donne un combo assez intéressant et non conventionnel. Lui qui s’était donné pour objectif de marquer 10 buts sur la saison, il en inscrira 16 TCC, et ce malgré les moqueries. Marquant parfois du tibia, du genou, de la cuisse, des parties génitales et parfois sans même en avoir la volonté première, Ocampos s’épanouit enfin. Il réalise sa meilleure saison comptable dans un contexte enfin plus sain et dans un OM en meilleure santé.
Et comme le club est en voie de « guérison », l’effectif s’étoffe. Cet été, outre Strootman et Ćaleta-Car, un concurrent direct à Ocampos a posé ses valises sur la Canebière : Nemanja Radonjić. L’ailier serbe compte bien postuler à une place de titulaire sur l’aile gauche de l’attaque olympienne. À nouveau, Ocampos va devoir prouver qu’il peut gagner sa place. Que malgré les critiques, il sait répondre présent quand il le faut. Un nouveau défi qui arrive à point nommé pour un Lucas Ocampos qui n’en est jamais avare.
Intrinsèquement pas le meilleur joueur de l’effectif marseillais, il est celui « qui a envie ». Celui qui laissera sa vie sur le terrain, s’il le faut. Lucas Ocampos, c’est un peu vous. C’est un peu nous. Ocampos, c’est votre coéquipier, qui le dimanche matin en District va combler ses lacunes techniques par une débauche d’énergie folle. Celui pour qui on va avoir de se donner à son tour. Celui pour qui on ne peut pas perdre. Ne serait-il après tout pourquoi pas une belle personnification de ce que sont les valeurs du football ?
Crédit Photo : Anne-Christine Poujoulat / AFP.