Italie : L’heure de la classe biberon ? [2/2]

Une page du football italien est en train de se tourner. Parmi les 23 vainqueurs de la coupe du monde 2006, seulement 6 joueurs sont encore en activité dont Totti, Buffon et Pirlo qui sont en fin de carrière. Une vague de très bons joueurs est en train de pointer le bout de son nez. Alors que l’on a longtemps reproché à l’Italie de ne pas faire confiance aux jeunes, la tendance semble enfin s’inverser. Suite et fin de ce dossier consacré aux nouvelles pépites italiennes.
Pour (re)lire la première partie du dossier, consacrée aux jeunes de l’Atalanta, du Milan AC et du Torino, rendez-vous ici. 

De Maurizio Sarri, en passant par Paulo Sousa (Fiorentina), par Gian Piero Gasperini (Atalanta), Eusebio Di Francesco (Sassuolo), Simone Inzaghi (Lazio Rome) ou Marco Giampaolo (Empoli puis Sampdoria), certains ont su donner de la confiance aux jeunes italiens là ou les traditionnels coachs préféraient des étrangers médiocres.

Grâce à cette avancée au niveau des mentalités, l’Italie a pu découvrir les deux Fédérico (Bernardeschi et Chiesa), Cataldi ou Berardi. Chiesa est une des révélations de l’année. Fils d’Enrico, le gosse n’a que 19 ans et porte un poids lourd sur le dos. Si ses premiers mois ont été convaincants, on retiendra la justesse dans les choix du bambino capable d’évoluer en attaque ou bien en tant que milieu offensif.

La Fiorentina compte dans ses rangs deux joueurs amoureux du club et qui se voient faire de très grandes choses sous le maillot de la Viola. Bernardeschi choque par sa brutalité balle au pied. L’attaquant gaucher est toujours dans la provocation avec le ballon. Il percute, cherche le 1 vs 1, provoque et sait distiller des caviars quand il peut. Le club de Florence a tellement confince en son jeune joueur qu’il lui a donné le fameux numéro 10. Un maillot significatif en Italie et surtout à la Fio quand on sait qu’il a été porté par Manuel Rui Costa et Roberto Baggio.

La Lazio n’a pas à rougir non plus. Les Biancocelesti ont permis à trois jeunes de se faire une place au soleil cette saison. Exit les Bryan Perea, Ederson ou Matri qui prennent la place des jeunes et bonjour Cataldi, Lombardi et Murgia. C’est durant la saison 2015-2016 que le premier cité va débuter en pro avec le maillot bleu ciel. Les deux autres ont profité de la non-arrivée de Marcelo Bielsa et de la nomination de leur ancien coach, Simone Inzaghi, pour gratter des minutes en championnat et marquer par la même occasion leur premier but.

Si la Roma s’est offert le luxe de sortir Florenzi et Romagnoli il y a 4 ans, sa politique envers les jeunes a pris un nouveau virage. Le club de la louve ne fait plus confiance aux jeunes et préfère les vendre à Sassuolo. C’est le cas de Luca Antei & Mazzitelli et de Lorenzo Pellegrini. Les trois font les beaux jours des Neroverdi sans avoir eu la chance de s’épanouir dans leur club formateur. Si il y a peu de chances de voir les deux premiers cités revenir dans la capitale, la donne est différente pour le milieu de terrain. Pellegrini crève l’écran sous les couleurs de Sassuolo. Milieu relayeur de 1m86, le natif de Rome excelle dans la percussion. Elégant balle au pied, juste dans ses choix, il a éclaboussé de sa classe la Serie A mais aussi l’Europa League. La question est de savoir si la Roma va vouloir le récupérer et lui donner sa chance, alors qu’il se murmure que le club voudrait activer la clause de rachat pour ensuite le revendre et refaire une « Bertolacci » (qui avait été racheté au Genoa pour être revendu 25 millions à l’AC Milan).

Si la politique des giallorossi fait peine à voir concernant les jeunes italiens, celle de la Juventus ne laisse présager que du positif. Au delà du désormais célèbre Daniele Rugani qui a rejoint le club en 2013 en provenance d’Empoli, le club a misé sur deux jeunes joueurs qui risquent de faire énoremment parler d’eux. Il s’agit de Riccardo Orsolini d’Ascoli, un virevoltant ailier droit, et Rolando Mandragora, regista formé au Genoa qui a rejoint la Juventus cet été. Deux très gros coups car ils sont considérés comme étant les meilleurs joueurs italiens nés en 1997. La Juve assure ses arrières en les signant mais surtout évite à ses concurrents de ses renforcer en particulier l’AC Milan qui voulait faire d’Orsolini un titulaire en puissance dans le 4-3-3 de Vicenzo Montella. Le gaucher aurait été un profil parfait pour le système de l’Aeroplanino.

Le vivier de l’Italie est énorme. Si on ne peut le mettre au même niveau que la France pour le moment, l’avenir semble radieux pour le championnat et surtout pour la sélection nationale qui aura besoin d’un léger lifting après la coupe du monde 2018. La culture de l’instant nous a presque fait oublier qu’il y a déjà une génération qui se doit d’amener l’Italie au sommet.

Actuellement, on ne parle que des jeunes talents nés entre 1994 et  1999, mais il ne faut pas oublier qu’il y a un autre groupe de joueurs qui est censé prendre la succession des actuels sénateurs de la Squadra. La plupart ont joué la finale de l’Euro espoirs en 2011 face à l’Espagne de Thiago, Morata, Koke ou De Gea, il s’agit  des Florenzi, Insigne, Saponara, Verratti ou Gabbiadini.

Déjà 150 matchs en professionnel pour eux mais aucun ne s’est encore imposé en sélection nationale sur la durée. Si Florenzi et Verratti étaient en phase de devenir des titulaires, ils ont dû revoir leurs ambitions à la baisse à cause de blessures. La situation est plus compliquée pour les trois autres. Insigne commence à faire son trou en sélection en tant qu’homme providentiel mais aussi en club, à la différence de Gabbiadini et Saponara. S’ils comptent respectivement six et zéro sélections avec les A, les deux anciennes cibles du Borussia Dortmund ont eu du mal à passer un cap en signant dans des gros clubs, que ce soit à Naples pour le grand gaucher où il ne s’est jamais imposé comme un titulaire et au Milan pour l’élégant numéro 10 qui n’aura jamais eu la confiance de Seedorf ou Inzaghi. Etant des profils atypiques, les deux ont du mal à rentrer dans les plans de leurs entraîneurs. Meneur de jeu à l’ancienne pour Il Sappo, 9 et demi pour Gabbia, il est difficile de leur trouver une place si l’équipe ne tourne pas autour de eux. Finalement, Manolo s’est engagé avec Southampton et Ricky à la Fiorentina lors du mercato hivernal. Peut-être le meilleur moyen pour les deux de passer le fameux cap que Lorenzo Insigne est en train de passer.

En plus des joueurs cités, d’autres cracks sont censés amener l’équipe nationale et la Serie A au sommet. Avec Marco Verratti, Mattia Perin est sûrement le plus talentueux et est le plus attendu de tous. Fantastique sur sa ligne, le vice-capitaine du Genoa rappelle Buffon à son plus jeune âge. Malheureusement pour le portier, il va être victime de deux ruptures des ligaments croisés en quelques mois et de l’avènement de Gigio Donnarrumma. Aujourd’hui, le gardien du Milan lui est passé devant dans la hiérarchie de la Squadra Azzurra et lui espère retrouver les terrains pour la saison 2017-2018.

Un autre aussi est dans le flou malgré un début de saison fracassant, c’est Domenico Berardi. La star de Sassuolo compte presque 100 matchs pour 40 buts à seulement 22 ans. Des stats énormes pour un ailier droit qui a découvert l’élite à 19 ans.  Malgré le fait qu’il soit sous contrat avec les Neroverdi, la Juventus possède une clause de rachat le concernant qu’elle peut activer chaque été. A chaque mercato estival, on l’annonce à Turin. Il ne serait pas contre un avenir Bianconero même si sa famille et lui en pincent pour l’Inter Milan depuis plusieurs générations.

Alors qu’on disait que les Italiens étaient très réticents à partir à l’étranger, on se rend compte qu’ils sont de plus en plus à quitter le pays. Si Verratti a été un des pionniers en 2012, il a vite été rejoint par d’autres, en particulier lors de ces derniers mercatos. Alberto Paloschi à Swansea, Simone Zaza à West Ham, auxquels on peut ajouter Mario Balotelli à Liverpool ou Davide Santon à Newcastle, les quatre auront été des vrais flops en Angleterre alors qu’ils avaient longtemps été considérés comme des futurs grands en Italie.

L’arrivée de Gabbiadini va susciter encore plus de curiosité. L’ancien numéro 23 du Napoli arrive dans un club qui tourne bien et a coûté près de 20 millions, un des plus gros investissement de l’histoire du club de Southampton (déjà 1 but pour le gaucher). On attend énormément de l’attaquant qui peine à se faire une place au soleil.

A contrario, Nicola Sansone et Roberto Soriano s’épanouissent pleinement en Liga. Recrutés pour 14 millions chacun, les deux anciens du Bayern Munich ont choisi de quitter l’Italie et de signer chez le sous-marin jaune à la surprise générale. Un choix qui surprend chez les médias de la botte tant on s’attendait à voir les Italo-Allemands rejoindre une des trois locomotives italiennes ou la Roma. Malgré leurs départs, le sélectionneur a toujours un œil sur l’ailier et le milieu de terrain. Même si la concurrence est très forte dans ce secteur de jeu, il n’est pas interdit qu’ils grattent quelques minutes en sélection dans les semaines à venir.

Alors qu’on peut considérer qu’à 25-26 ans, un joueur est dans la force de l’âge, du côté de la botte, il est encore considéré comme un joueur qui a tout à prouver. Attention à pas rater le coche pour les Gabbiadini, Saponara, Sansone ou Soriano qui rentrent dans un tournant de leurs carrières. La génération qui arrive risque de faire très mal et il se pourrait qu’ils dépassent rapidement leurs aînés. Si l’Italie a longtemps mangé son pain, la Squadra et la Serie A peuvent aspirer  à un avenir radieux avec ce groupe de joueurs qui ne cesse de surprendre.

Photo credits should read : AFP PHOTO / MIGUEL RIOPA

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« Ce que je sais de la morale, c’est au football que je le dois.»