Qui de l’OM 1991 ou de l’OM 1993 était le plus grand?

L’ère Tapie, synonyme de gloire absolue et de déchéance totale pour l’Olympique de Marseille, a donné naissance à 2 saisons d’anthologie restées dans les mémoires marseillaises. Si l’inévitable saison 1992-1993 est la plus connue, un certain 26 mai y aidant particulièrement, il n’en est pas autant de la saison 1990-1991. Pourtant, à y voir près, il est très difficile, plus de 25 ans après, de déterminer laquelle des deux équipes était la meilleure. Retour sur les lettres dorées marseillaises.

À première vue, il ne peut y avoir de débat quant à l’heure de choisir entre une équipe qui a donné au phocéen le plus grand titre de son histoire, la Ligue des Champions, et une autre qui a échoué en finale. Après tout, l’OM 93 est celui de l’étoile, celui qui permet encore aux marseillais de se vanter d’être à jamais les premiers. Le dernier maillot réédité par Adidas en atteste, c’est cet OM là qui continue à susciter les passions.

Pourtant, nombre parmi ceux qui ont connu ces deux époques martèlent à qui veut l’entendre – ou non, pour la majorité des phocéens – que l’Olympique de Marseille était une bien meilleure équipe en 1991 qu’en 1993. Tous, pourtant, ne sont pas des piliers de bar.

Cette énigme mérite d’être résolue, ce paradoxe vaincu. Observons donc, dans un premier temps, quels ont été les accomplissements respectifs de ces deux équipes.

En 1990-1991, l’Olympique de Marseille est champion de France avec 22 victoires, 11 nuls et 5 défaites. L’OM cartonne l’OL 7-0, bat le grand Bordeaux 2-0 au Vélodrome, a vaincu à 2 reprises le futur 2eme Monaco et a disposé par deux fois du Paris Saint Germain. Le bilan final est 67 buts marqués pour 28 buts encaissés. L’OM se rend en finale de la Coupe de France avant de perdre par un petit but face à l’AS Monaco. En Ligue des Champions, l’OM dispute la finale à Bari et la perd aux tirs au but.

En 1992-1993, Marseille est de nouveau champion de France avec 22 victoires, 10 nuls et 6 défaites. Il bat Lyon 2-1 à domicile, gagne puis perd contre Monaco, perd puis fait nul contre Bordeaux, bat à 2 reprises Paris, futur deuxième. Le bilan final est de 71 buts marqués pour 36 encaissés. L’OM est éliminé en quarts de finale de la Coupe de France par l’AS Saint-Étienne (qui sera éliminée, elle aussi, en demi-finale). En Ligue des Champions, l’OM est sacré à Munich le 26 mai 1993.

En termes d’accomplissement, les deux équipes sont donc relativement proches, à ceci près que la Ligue des Champions est d’un aura sans commun. Jusque là, on tranchera donc aisément en faveur de l’OM de 1993.

Comparons désormais les acteurs de ces résultats. Déjà, le bat blesse pour l’OM 1990-1991 qui a vu 3 entraîneurs se succéder, à savoir Gerard Gili (présent depuis 1988 et qui, malgré ses 7 victoires et 2 nuls en 9 matchs, a vu son autorité écornée par l’arrivée de celui qui allait lui succéder sur le banc), Franz Beckenbauer (au bilan très moyen, 8 victoires, 2 nuls, 5 défaites) puis, enfin, Raymond Goethals. Pour l’OM de 1993, seulement le sorcier belge Goethals.

En ce qui concerne les joueurs, en revanche, un vrai débat apparaît : En 1991, l’OM est mené par Eric Cantona (bientôt écarté), l’immense Manu Amoros, Carlos Mozer et ses 17 jaunes, Jean-Pierre Papin buteur à 36 reprises, Chris Waddle coiffé de sa coupe mulet et armé de ses dribbles chaloupés, Bruno Germain et sa hargne au milieu de terrain. Après tout, ne s’agissait-il pas de l’OM qui avait succédé à l’OM de 1990, celui qui ne devait sa défaite face à Benfica, en demi-finale de la Ligue des Champions, qu’au but de la main de Vata? Enfin, comment ne pas rendre hommage à l’immense Pixie, Stojkovic, qui n’a pu régaler le public marseillais qu’à mesure que son corps le laissait tranquille.

L’OM de 1993 est plus hargneux. Didier Deschamps est la sentinelle, au milieu de terrain et au capitanat. Le jeune Barthez garde les buts, Basile Boli est toujours là, Franck Sauzée de retour. Abedi Pelé, déjà présent en 1991, est l’un des derniers joueurs élégants de cet effectif basé sur l’efficacité. En attaque, le duo Voller et Boksic est chargé de terminer, avec brio, les actions.

Clairement, ce sont deux styles qui s’opposent en 1991 et en 1993. Pour la première version, un OM sexy au possible, avec un 11 type Olmeta – Amoros – Mozer – Casoni – Boli – Di Meco – Germain – Stojkovic – Waddle – Papin – Abedi Pelé. La hargne d’un Di Meco et d’un Germain vient compléter le talent hallucinant des Waddle, Stojkovic (qui n’a, pourtant, que si peu eu de répit de son corps) et Abedi Pelé.

Pour l’OM de 1993, c’est un OM combattant, le 11 Barthez – Eydelie/Amoros – Angloma – Desailly – Boli – Di Meco – Sauzée – Deschamps – Boksic – Voller – Pelé qui sent bon la boue, le sang, la transpiration et la salle de musculation. Jean-Pierre Papin, parti de Marseille pour gagner la Ligue des Champions, vit son rêve brisé par les marseillais en 1993 avant, enfin, d’y arriver en 1994.

Il est intéressant, pour mieux comprendre pourquoi tant de Marseillais préfèrent 93, de faire le parallèle avec la période plus contemporaine de l’OM. Cet article vous permettra de mieux cerner la problématique.

Car c’est une question fondamentale de philosophie du football qui se présente aux supporters. Qui de Deschamps ou de Bielsa a suscité le plus d’émotions ? Le réalisme froid d’un Didier qui a ramené des titres à un club qui en était sevré depuis 17 ans ? Le génial et spectaculaire Marcelo qui a fini dans les larmes et le sang, contribuant ainsi à sa légende ?

L’histoire se termine ici. C’est une question ouverte qui est posée au lecteur. Alors, qui du génie brisé de 1991 ou de la gloire boueuse de 1993 vous correspond le plus?

Crédits photos : AFP PHOTO/GEORGES GOBET

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