[Coupe du Monde] Une équipe de France à deux visages ?

Les trois derniers rassemblements de l’équipe de France avant la Coupe du monde ont confirmé une tendance à un retour de l’équipe de Didier Deschamps à un 4-3-3.

Prendre le jeu en main ou jouer le contre ? Mettre son meilleur joueur dans les meilleures conditions ou privilégier l’équilibre du collectif ? C’est le casse-tête que va devoir résoudre le sélectionneur des Bleus avant le début de la Coupe du Monde. Lors de l’Euro 2016, le passage au 4-4-2 avait donné un second souffle à l’équipe de France, sous l’impulsion d’un Antoine Griezmann qui allait devenir le meilleur joueur de la compétition. Mais aujourd’hui, le 4-4-2 semble moins bien fonctionner, et l’arrivée de nouveaux visages chez les Bleus, Kylian Mbappé en tête, ont poussé Didier Deschamps à revoir sa réflexion.

Le 4-4-2 a fait ses preuves en compétition

Face à la Colombie, la Desch’ a conservé le schéma qui l’a mené à la finale de l’Euro. Après une première mi-temps maîtrisée, l’équipe s’est peu à peu décomposée face au jeu colombien, avant de finalement s’incliner (2-3). Sur le papier, l’équipe alignée n’était pourtant pas loin d’être la meilleure possible. De quoi s’inquiéter, à 2 mois du début du mondial ? Sur l’analyse du moment, certainement. Mais DD sait qu’il peut s’appuyer sur un système qui a fait ses preuves lors de l’Euro, et qui lui a notamment permis d’éliminer le champion du monde allemand.

Du onze qui a éliminé l’Allemagne, le noyau dur est encore présent aujourd’hui : Lloris dans les buts, Umtiti derrière (Koscielny étant blessé), Pogba et Matuidi au milieu, et Griezmann et Giroud devant. Les joueurs ont donc leurs repères dans ce schéma, et imaginer un changement après une défaite en match amical est bien évidemment incongru. Cependant, les derniers rassemblements des Bleus cette saison laissent penser que l’idée de voir la France évoluer avec un milieu à 3 est loin d’être improbable.

Dans la continuité de l’Euro, Deschamps avait confirmé son 4-4-2, sans réellement bouger l’équipe en place. Si certains joueurs comme Kanté, Lemar ou Dembélé poussaient Deschamps à la réflexion grâce à leurs performances en club, les indéboulonnables (Matuidi, Sissoko, Payet ou Giroud) conservaient leur crédit auprès du sélectionneur. C’est à partir d’octobre que la tendance a évolué. D’abord dans un match couperet en Bulgarie. Alors que la première place des Bleus est en danger après un nul laborieux contre le Luxembourg, Deschamps décide de renforcer son milieu. Grand bien lui en prend, c’est Matuidi, barré par le duo Kanté-Pogba en début de saison, qui inscrit le seul but du match pour son retour comme titulaire en Bleu (0-1).

L’expérience est renouvelée en novembre en Allemagne. Un test grandeur nature pour l’Equipe de France, une nouvelle fois bien négocié malgré deux buts encaissés (2-2). Pour la troisième fois en autant de rassemblements, le 4-3-3 est mis en place en mars, en Russie. Encore une fois dans un match à l’extérieur, pour une nouvelle victoire (1-3).

Le 4-3-3, mieux adapté aux qualités de l’effectif ?

Alors, comment un retour au 4-3-3 peut-il se justifier alors que le 4-4-2 de Deschamps a fait ses preuves lors de l’Euro ? Tout d’abord, il faut noter le principal changement depuis un an : Moussa Sissoko ne fait plus partie du groupe France, ou, en tout cas, n’est plus considéré comme un titulaire en puissance. Pourtant, le milieu de Newcastle avait été l’un des hommes forts de la fin de la compétition en 2016. Après avoir annihilé le côté gauche allemand lors de la demi-finale, il avait été l’un des seuls à se montrer au niveau face au Portugal. Sa présence dans le onze a souvent été décriée, mais force est de constater qu’en son absence, l’équipe est beaucoup moins équilibrée, et le 4-4-2 devient rapidement un handicap défensivement.

Si Moussa Sissoko a perdu sa place en Bleu, c’est aussi parce que de nouvelles têtes ont fait leur apparition : d’Ousmane Dembélé à Kylian Mbappé, en passant par Thomas Lemar ou Florian Thauvin, force est de constater que la puissance offensive de l’Equipe de France n’a jamais été aussi vaste. Que ce soit à droite comme à gauche, Didier Deschamps a l’embarras du choix, et si Sissoko apporte plus de garanties défensives, il reste pénalisé par son apport offensif, insuffisant par rapport à ses concurrents.

Comment donc installer les petits nouveaux qui frappent à la porte sans perdre l’équilibre défensif cher à Didier Deschamps ? Cela passe forcément par un changement de système. Le 4-3-3 semble aujourd’hui le plus adapté aux qualités du groupe français. Paul Pogba l’a déjà dit, il est plus à l’aise lorsqu’il joue plus haut sur le terrain, dans un milieu à 3. Corentin Tolisso, auteur de belles prestations sous le maillot bleu cette saison, pourrait bien être un concurrent de taille pour Blaise Matuidi concernant la place de troisième milieu titulaire. Ce système serait également taillé pour Kylian Mbappé, le Parisien étant capable d’évoluer à n’importe quel des trois postes en attaque.

Qui serait donc le grand perdant d’un changement de tactique ? Si Antoine Griezmann serait légèrement désavantagé, c’est bien Olivier Giroud qui pourrait en faire les frais. Lors des trois tests effectués en 4-3-3 par la Desch, l’attaquant de Chelsea a systématiquement été placé sur le banc. Lorsque la France évolue en 4-4-2, son apport permet à Griezmann d’avoir un point de fixation et de jouer plus libéré. Mais le 4-3-3 de Deschamps, souvent plus défensif et basé sur le contre nécessite un attaquant plus mobile. Il avait d’ailleurs souri à Alexandre Lacazette et Kylian Mbappé, chacun auteur d’un doublé, respectivement en Allemagne et en Russie.

Vers une équipe à deux visages ?

Didier Deschamps se trouve donc face à un dilemme : d’un côté, mettre son meilleur joueur, Antoine Griezmann, dans les meilleures conditions, c’est-à-dire dans l’axe de son attaque, avec un point de fixation à côté duquel il pourra se balader. De l’autre, retrouver un équilibre défensif qui fait défaut à l’équipe depuis plusieurs matchs. En composant sa liste des 23 joueurs, le sélectionneur a fait des choix forts allant dans ce sens : exit Adrien Rabiot, qui ne voulait pas évoluer comme récupérateur, bienvenue Steven Nzonzi. Deux des quatre latéraux retenus sont également des défenseurs centraux de formation.

Comme lors de ses trois listes précédentes, Deschamps s’est également laissé une certaine liberté de choix, en sélectionnant cinq milieux axiaux pour couvrir deux ou trois postes, et sept joueurs à vocation offensive pour trois ou quatre postes. En comptant sur la polyvalence de certains joueurs, et notamment Thomas Lemar voire Nabil Fekir, capables de jouer sur l’aile comme un peu plus reculé dans l’axe, le sélectionneur de l’Equipe de France pourrait alors adapter son système selon l’adversaire ou selon les besoins. Il est donc probable de voir une Equipe de France démarrer en 4-4-2 lors de la phase de groupe, notamment face à l’Australie, avant de s’adapter à l’adversaire lors des matchs à élimination directe.

Pour compléter cet article, retrouvez notre présentation de l’équipe de France dans le 9ème numéro de Road To Russia :

 

Photo credits : FRANCK FIFE / AFP

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