Tel un trade dans une draft NBA, des échanges peu communs ont eu lieu récemment en Serie A. Alors que toute personne raisonnée croyait impensable un retour de Leonardo Bonucci à la Juve, le voilà qui est de retour du côté des Bianconeri. En échange de cela, l’homme qui aura parcouru plus de villes d’Italie que le duo d’acolytes de Nus et Culottés sur France 5 ainsi que la jeune pépite italienne Mattia Caldara rejoignent le Milan AC. Dès lors, certains se déchirent affirmant que la Juve sort vainqueur de ce deal alors que d’autres rétorquent que c’est le Milan qui réalise un bon coup.
Pour la Juve, une stratégie court-termiste qui pourrait s’avérer payante
Sur ses objectifs, la Juventus Turin a semblé très claire depuis le début de mercato : l’objectif est de remporter la Ligue des Champions édition 2018-2019. Les recrutements de Cristiano Ronaldo, de João Cancelo et d’Emre Can ont très clairement cette volonté. La venue de Bonucci suit cette logique puisqu’il reste tout de même top 5 à son poste lorsqu’il est au meilleur de sa forme. On voyait effectivement mal la Juve s’orienter vers une défense à 3 avec un Rugani encore trop immature et un Benatia pas toujours au niveau. Chiellini sera donc appuyé par un excellent joueur qu’il connaît déjà de par leur passé au club. De même, cela permettra vraisemblablement au club de Turin de retrouver une assise défensive qu’elle avait un peu perdu la saison dernière. Assise défensive qui est finalement ce qui fait que la Juve est la Juve.
Un autre facteur est sans doute responsable du come-back de Leo Bonucci : Cristiano Ronaldo. En effet, comment ne pas imaginer que l’une des conditions préalables à son arrivée était la victoire finale en Champions League, lui qui veut en faire (et qui en a fait) sa compétition fétiche. Le secteur défensif était le seul à devoir être renforcé, voilà chose faite. Concernant le départ de Pipita, il est évident que c’est le fait que Ronaldo soit au club qui l’ait entraîné puisqu’Higuain fait partie des tous meilleures 9 mondiaux et on le voit mal faire banquette. Pour le coup, le transfert d’Higuain est largement tripartite car il satisfait tout le monde.
Le seul bémol pour la Juventus est sans doute le départ de Caldara, star montante du football italien qui était considéré comme le gros crack de la prochaine génération italienne. L’avoir dans ses rangs permettait à la Juve d’asseoir son hégémonie sur l’Italie et même sur la sélection, son départ montre une absence de considération d’un projet sur du long-terme et une envie d’avoir tout, tout de suite. Le retour de Bonucci peut également être perçu négativement, lui qui avait été congédié il y un peu plus d’un an en raison d’une vague embrouille de vestiaire impliquant d’autres joueurs. L’image de l’institution modèle que s’était efforcée à créer la Juve part effectivement en fumée car il apparaît clairement que la recherche du résultat prime, dans ce cas-ci, avant le fameux « respect de l’Institution ». Ce culte de l’institution n’existe cela dit plus nul part, la Juventus Turin ne fait donc que rentrer dans le rang.
Le Milan s’ancre enfin dans un projet à peu près cohérent
Ce n’est une surprise pour personne, après une édition 2017-2018 littéralement ratée, le Milan AC se devait de se réinventer afin de comprendre que ce n’est pas en recrutant le plus de joueurs possibles notés à plus de 80 sur Fifa Ultimate Team que l’on remporte des trophées. Ainsi, le Milan semble s’essayer à un projet axé principalement sur le recrutement ou la formation de jeunes à fort potentiel pour voir plus haut, plus loin. La moitié de l’effectif de l’équipe première sera constituée de joueurs de moins de 25 ans tous largement reconnus dans le monde du football. Avec Romagnoli, Caldara, Conti, Calabria, Locatelli, Kessié, Mauri, Halilovic, Calhanoglu, Suso, Cutrone et André Silva (qui devrait a priori plier bagages), on note que l’ AC Milan prépare l’avenir avec de très bons jeunes joueurs. Caldara s’est donc ajouté à une liste qui aura pour objectif d’aller conquérir des sommets dans une fourchette de 3 à 6 ans plus ou moins. Cela change des approximations du dernier mercato estival où le club recrutait à tout-va sans véritablement savoir où il allait.
En termes de plus-value défensive, il n’est même pas certains que le club milanais perde au change puisque Bonucci ne s’est jamais vraiment habitué à ce Milan et était très (trop) loin d’afficher son meilleur niveau sur l’exercice précédent. La charnière Romagnoli-Caldara, qui pourrait aussi être celle de la Squadra azzurra, assure une stabilité importante et aura donc l’avantage de se connaître pour devenir dans le futur encore plus efficace.
Quant à l’arrivée de Gonzalo Higuain, elle semble être transitoire. Le Milan peinait à faire performer ses 9 la saison dernière et cette venue assurera un capital minimum de 25-30 buts toutes compétitions confondues. Higuain restera sans doute deux ans puis sera remplacé par un Cutrone qui aura acquis de l’expérience ou même un autre attaquant de 25 ans environ qui aura déjà un niveau avancé pour son âge. Cela va donc permettre en plus d’assainir un peu les finances de l’équipe car il apparaît que des joueurs tels que Kalinic ou Bacca semblent ne plus pouvoir prétendre à être titulaires (même si cela est plus compliqué pour Kalinic puisque son option d’achat a été levée il y a un mois).
Bref, ce deal c’est surtout l’histoire de deux très grands clubs qui cherchent à retrouver leur gloire d’antan sur des visions de temps plus ou moins longs et avec des moyens différenciés ; alors 1-1, balle au centre.
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