« À Lorient, on voyait qu’il possédait quelque chose, un volume de jeu intéressant, mais de là à dire qu’il allait devenir un titulaire aussi vite à Arsenal, on n’aurait pas parié dessus ». Même les spécialistes de la Ligue 2 comme Jean-Luc Arribart n’auraient pas cru qu’un minot de 19 ans, venu de l’antichambre du football français s’imposerait aussi rapidement Outre-Manche. Et pourtant, telle est l’ascension fulgurante du Gunner Mattéo Guendouzi. De ses tumultueuses années chez les Merlus à ses débuts en Premier League, portrait du Franco-Marocain qui espère bien s’installer définitivement dans le onze d’Unai Emery.
Un caractère bien trempé et des problèmes à Lorient
Né le 14 avril 1999 à Poissy dans les Yvelines, Mattéo Guendouzi fait ses classes au Paris Saint-Germain où il y évolue de 2005 à 2014. À seulement 16 ans, la pépite impressionne le centre de formation de la capitale. Cependant, il ne s’éternise pas et rejoint Lorient. Il joue deux saisons avant de signer son premier contrat professionnel en 2016. De là, il fait ses premières apparitions chez les pros. Il dispute neuf matchs toutes compétitions confondues lors de sa première saison qui voit les Bretons relégués en Ligue 2. Sa seconde saison fut d’entrée ternie par une décision qui ne laisse pas de marbre.
Lors de l’été 2017, le milieu refuse de prolonger son contrat qui expirait en 2018. Naturellement, on sentait que le divorce avec le club serait acté un an plus tard. Selon certaines rumeurs, c’est d’ailleurs pour cette raison que Mickaël Landreau l’a écarté en fin de saison dernière. Résultat, il n’aura disputé qu’une quinzaine de rencontres de Ligue 2. D’autres évoquent aussi des « problèmes personnels ». Car oui, derrière cette gueule d’ange se cache un garçon capricieux. Il a souvent fait parler de lui pour des raisons extra-sportives comme lorsqu’il refuse de serrer la main de son coach quand ce dernier le sort à la 55ème minute par peur qu’il prenne un rouge. Un exemple parmi tant d’autres qui accompagne les tensions déjà existantes entre son entourage et les dirigeants.
Dernièrement, alors qu’il avait été appelé pour disputer l’Euro U19 avec l’Équipe de France, il a tout simplement décliné l’offre en expliquant vouloir se concentrer sur ses objectifs avec son futur club. Approché par Hervé Renard pour jouer avec le Maroc en 2017, il avait également refusé sa convocation. C’est bel et bien de Mattéo Guendouzi dont il est question et non pas d’Adrien Rabiot malgré la touffe de cheveux et des faits de carrière similaires. Un caractère de feu qui montre qu’il sait ce qu’il vaut et où il veut aller.
Des débuts prometteurs à Arsenal
Acheté au mercato pour 8 millions d’euros, force est de constater que son intégration chez les Gunners est plutôt réussie. En l’espace de quatre mois, le milieu relayeur est passé du statut de remplaçant à Lorient à titulaire à Arsenal. Une ascension remarquable qu’il ne doit qu’à lui. Lorsqu’un joueur force pour rejoindre un club, surtout lorsqu’il est jeune, on sait qu’il sera attendu de pied ferme. Et lui a su répondre aux attentes d’une manière remarquable. Sans doute a-t-il franchi un cap dans la canalisation de son énergie débordante et la maîtrise de ses nerfs. Unai Emery y est pour quelque chose.
« Il croit tellement en lui qu’il est vexé quand quelqu’un ne le place pas sur le piédestal qu’il pense mériter », a analysé cet été Alex Hayes, l’ancien vice-président de Lorient, à The Independant. Pour le président Loïc Féry : « C’est un joueur qui a besoin de challenge. Il a pu manquer d’un peu de ça chez nous la saison dernière ». Cela expliquerait pourquoi le joueur a choisi Arsenal, plutôt que Dortmund ou le PSG qui lui faisaient les yeux doux. Avec Unai Emery, il a trouvé un coach qui le guide sur le bon chemin. Titularisé trois fois en pré-saison, face à l’Atletico Madrid et au PSG en International Champions Cup puis face à Chelsea, il a ensuite enchaîné en Premier League. Lors des deux défaites inaugurales, face à City et Chelsea, il a certes commis des erreurs, notamment dues à sa jeunesse, mais il a aussi laissé entrevoir son éventail de qualités. À savoir la capacité à harceler l’adversaire, chère à son entraîneur, à gratter des ballons mais aussi à les utiliser.
Des aptitudes qui ont déjà emballé les supporters qui l’ont élu meilleur joueur du mois d’août. Il a également reçu les éloges de Ian Wright, l’ancien meilleur buteur de l’histoire du club avant que Thierry Henry ne le dépossède du record. « La meilleure chose que j’ai vue pendant ces deux matchs venant de ce jeune joueur c’est son cœur, son état d’esprit et cette volonté permanente d’avoir la balle », avait-il vanté pour la BBC. Il y avait fort longtemps que le club londonien ne s’était pas extasié sur un crack.
La confiance monte pour un joueur qui a déjà une grande estime de lui-même. Rien n’est encore fait car il ne se place pas comme un titulaire indiscutable. Quoi qu’il en soit, ce dernier honore pour le moment les espoirs placés en lui. La preuve en inscrivant son premier but à Qarabag en Ligue Europa. Concernant la sélection, son cœur balance, a-t-il affirmé, pour la France. Dans la récente liste de Didier Deschamps, nulle mention du joueur d’Arsenal pour les rencontres face à l’Islande et l’Allemagne. Il devra prendre son mal en patience. En attendant, il se console avec les moins de 20 ans où il côtoie notamment à son poste le milieu de Gladbach, Mickaël Cuisance.
Crédit photo : Alexander Nemenov / AFP