Grave crise à l’OM : à qui la faute?

Alors que la crise couve et que l’ambiance au stade Vélodrome risque d’être explosive pour la réception de l’AS Monaco de Thierry Henry, du côté de l’Olympique de Marseille, on cherche des coupables à une saison officiellement ratée avant même la fin du championnat. Alors, à qui la faute?

Il fallait croire que la situation était bien trop favorable pour durer. Un investisseur qui ne se contente pas de boucher les trous, un président qui remodèle complètement et efficacement un club à bout de souffle, un directeur sportif mondialement reconnu et un entraîneur expérimenté, quasi garantie de progression.

Le projet était pourtant simple : devenir plus fort, chaque année, transformer les titulaires d’hier en remplaçants voire réservistes de demain. En 3 ans retrouver la Ligue des Champions, en 5 pouvoir viser le titre, à terme, être un concurrent très sérieux à la victoire en Ligue des Champions. Telles étaient les aspirations de l’ambitieux OM Champion’s Project.

Cet océan d’optimisme et de certitudes a laissé place à un violent torrent de critiques et de remise en question. La saison de l’OM est ratée, c’est une certitude. Les matchs amicaux auraient du avertir Rudi Garcia (défaite 5-2 face à Bournemouth, à 6 jours de la reprise) mais il n’en a rien été. Le verdict des matchs officiels est tombé et il n’a pas été clément pour les phocéens.

Les humiliations se sont enchaînées. Défaite 3-1 à Nîmes, 1-2 à Francfort, énième défaite à Lyon 4-2, claque à Lille 3-0, non match face à la Lazio (2-0) et au PSG (0-2), deuxième claque à Montpellier (3-0), soirée doublé contre son camp à Francfort (4-0), énième déconvenue face à une équipe lambda mais bien organisée, le FC Nantes (3-2), une bérézina de plus (on manque de synonymes) face à Limassol (1-3) et, pour clôturer le tout, une sortie de coupe de France manu-militari face au géant ASF Andrézieux (2-0).

En plus clair, l’OM est sorti dès son entrée en lice en Europa League, en Coupe de la Ligue et en Coupe de France. Il a perdu contre le premier, le deuxième, le troisième et le quatrième de l’actuel (au 10 janvier 2019) classement de Ligue 1.

Au niveau du jeu, évidemment, c’est absolument scandaleux. Tous les systèmes y sont passés et c’est la même tambouille qui paraît à chaque fois. Il n’y a guère que des victoires face à des mal classés (et encore, pas sûr qu’Andrézieux ait le niveau national) pour faire office de trompe-l’oeil.

À l’OM, le bilan a été fait, et refait. Il n’y a plus à tergiverser pour savoir si la saison est ratée ou non, elle l’est et c’est incontestable. Le débat du moment repose plutôt sur la question de la responsabilité de cette crise. À ce jeu là, on identifie 5 acteurs majeurs de l’OM, à savoir Franck McCourt, Jacques-Henri Eyraud, Andoni Zubizarreta, Rudi Garcia et les joueurs.

Excluons d’emblée le père McCourt, actionnaire principal et propriétaire du club. Sa seule mission était de remettre de l’argent dans le club et il l’a fait, plus que de raison comme l’ont rappelé nos confrères du Football Club de Marseille dans leur dossier très complet. Il a nommé un homme de confiance et de compétence, Jacques Henri Eyraud, chargé de gérer le club pour lui. Il a relancé la dynamique d’un club en le dotant d’un nouvel actif joueurs. Il n’est donc pas responsable de la crise actuelle.

Place désormais à celui que beaucoup s’amusent à surnommer Harry Potter, le président de l’Olympique de Marseille Jacques Henri Eyraud. Cette fois, les reproches sont beaucoup plus marqués à son encontre. On le sait déjà peu populaire auprès des groupes de supporters depuis ses menaces et sanctions à leur égard, parfois même définitives (les Yankees ont dit adieu au Vélodrome). C’est lui qui a prolongé Rudi Garcia de 2 ans, lui qui semble aujourd’hui vouloir à tout prix faire signer Mario Balotelli. Il est jugé arrogant et têtu par beaucoup. Son envie de s’impliquer dans le volet sportif dérange tant il est avéré qu’il ne connaît rien au football.

Pourtant, il faut rendre à César ce qui lui appartient. C’est aussi lui qui signe Andoni Zubizarreta, lui qui convainc Garcia de rejoindre un club aux abois, lui qui restructure efficacement l’organisme OM, lui qui obtient l’exploitation commerciale exclusive du Stade Vélodrome, lui qui met en place les partenariats avec l’ensemble des clubs régionaux. Pire, c’est même lui qui aurait convaincu Franck McCourt d’investir à Marseille ! Enfin, officiellement tout du moins, il ne fait que valider – ou non – financièrement les transferts, sans jamais suggérer de nom ou en refuser d’autres.

Le sympathique directeur sportif Andoni Zubizarreta a quant à lui la chance de passer à travers les gouttes acides des critiques. Il traîne avec lui une double réputation, à la fois celle d’un dirigeant du FC Barcelone compétent, dévoué, qui connaît bien son sport et qui ne fait pas de zèle en privé, mais aussi celle d’un directeur sportif totalement soumis aux désidératas de son entraîneur. Il serait impuissant face aux choix de Rudi Garcia, n’intervenant que pour contacter et convaincre les joueurs, et se serait contenté de restructurer le centre de formation et la cellule de recrutement aux côtés de son ami Albert Valentin.

La réalité est probablement moins rose que celle trop souvent décrite. Certains joueurs sont des choix de Zubi, à n’en pas douter. Evidemment, personne ne va réclamer la paternité des mauvaises recrues tout en clamant être à l’origine des bonnes mais certaines mauvaises langues estiment, notamment, qu’il serait à l’origine de la venue d’Aymen Abdennour. De plus, on s’étonne de voir la cellule de recrutement de l’OM avec aussi peu d’idées, hormis pour Nemanja Radonjic, et une telle lourdeur dans le recrutement (pas la peine d’espérer la moindre signature avant la moitié d’un mercato, généralement). Enfin, on peine à croire que le directeur sportif se contente d’un rôle de victime expiatoire s’il ne croit ni n’est impliqué lui même, un minimum, dans la ligne directrice qui lui est présentée. Il a accepté de prolonger peu de temps avant Rudi Garcia, pour les sceptiques.

Place à celui qui fait l’objet des plus lourdes critiques, l’entraîneur Rudi Garcia. Cette fois, le tableau est beaucoup plus noir pour le plus exposé des Marseillais. Au sommaire : jeu insipide, résultats extrêmement décevants cette saison, pas la moindre victoire probante face à un vrai gros du championnat depuis son arrivée, des choix de transferts extrêmement douteux, un coaching fort avec les faibles et faible avec les forts, des conférences de presse grotesques avec une dénonciation incessante de l’arbitrage et des compliments adressés à une soi-disant bonne mi-temps sur deux bref, le tableau est bien trop long pour y faire figurer l’ensemble des critiques adressées au coach.

Au rayon des bonnes choses apportées par Garcia, une stabilité (pour le meilleur et pour le pire), des résultats intéressants la saison dernière, l’émergence de Bouna Sarr en tant qu’arrière droit et la signature de Kevin Strootman, supposée très intéressante sur le papier. Voilà, c’est tout.

Enfin, place aux principaux acteurs de l’Olympique de Marseille, les joueurs. Ils semblent être atteints de tous les maux du monde cette saison, entre la mélonite aiguë des Champions du Monde (aucun olympien n’ayant eu de rôle majeur mais il ne faut pas le dire trop fort), ceux qui négocient pour une prolongation (en fait, pour une augmentation de salaire), ceux qui sont hors de forme, ceux qui ne sont pas impliqués etc.. la critique est lourde.

Individuellement, certains joueurs sont clairement montrés du doigt. La légende Steve Mandanda est jugée au mieux comme en surpoids, au pire comme complètement cramée. Adil Rami est devenu (très) lent et arrogant. Jordan Amavi est complètement aux fraises depuis le mois de janvier 2018. Bouna Sarr a perdu de sa verve, Luiz Gustavo aussi. Dimitri Payet est trop irrégulier. Valère Germain et Kostas Mitroglou sont simplement qualifiés de nuls.

Pourtant, on peut s’étonner du peu de remarques faites face au faible renouvellement d’un groupe qui a déjà fortement tiré sur la corde la saison passée avec près de 60 matchs. Les arrivées d’un Duje Caleta-Car, jugé par beaucoup comme grand espoir qu’on envoie dans chaque match bourbier et qui semble jouer son avenir à chaque instant ; d’un Nemanja Radonjic, décrit comme extrêmement intéressant à l’entraînement et qui passe son temps en tribunes ; et d’un Kévin Strootman, clairement pas devenu le dernier des tocards à 28 ans mais qui pâtit d’un contexte abominable, toutes ces arrivées ne semblent pas suffisantes face à l’ampleur du chantier OM.

Il ne faut pas l’oublier : l’effectif demeure globalement intéressant bien que relativement âgé et avec de grosses carences à certains postes. Il paraît inconcevable que ce groupe soit devenu aussi mauvais du jour au lendemain sans que l’entraîneur n’y soit pour quelque chose.

Au rayon des satisfactions, Hiroki Sakai, Rolando (pourtant revenu d’une grave blessure) et Florian Thauvin (décisif bien que très brouillon dans le jeu) échappent globalement aux critiques.

Le mercato d’hiver s’annonce extrêmement décisif pour l’OM. C’est très probablement la dernière carte que peut abattre Rudi Garcia pour sauver son avenir marseillais et il conviendra de le surveiller de très près. Les supporters, eux, ont fait leur choix et manifesteront, dès dimanche face à Monaco, leur hostilité à une direction qui semble avoir oublié qu’à Marseille, on n’humilie pas ses supporters en toute impunité.

Crédits photos : Boris HORVAT / AFP

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