Covid-19 : le jour d’après redouté en Ligue 1

Si la France semble doucement sortir la tête de l’eau depuis le 11 mai, date du déconfinement, le football tricolore est lui toujours en apnée. Mercato inédit, billetteries plafonnées et revenus incertains, la Ligue 1 et les clubs français craignent de plus en plus les retombées économiques de la crise sanitaire liée au Covid-19.

La sentence est tombée le 28 avril dernier. Alors que la France est confinée depuis cinq semaines, Édouard Philippe annonce que les compétitions de sport professionnel ne reprendront pas cette saison. Trente secondes dans un discours d’une heure qui mettent le feu aux poudres de la planète football. Deux jours plus tard, la LFP vote la fin des championnats de Ligue 1 et Ligue 2.

Arrive alors le temps des spéculations. Faut-il désigner un champion ? Qui sera européen la saison prochaine et qui sera relégué ? Si l’indice de performance inventé par les instances du football français a permis d’établir un classement définitif en Ligue 1, c’est le jour d’après qui fait désormais peur aux clubs.

Des perdants, rien que des perdants ?

Le malheur des uns fait le bonheur des autres, selon un certain dicton populaire. Et si la crise du Covid-19 faisait figure d’exception ? À l’heure de faire le bilan, il ne semble y avoir que des déçus. Certains plus que d’autres. Le club d’Amiens est relégué alors qu’il lui restait dix matchs pour rattraper son retard de quatre points sur Nîmes. L’Olympique Lyonnais pointe à la septième place et se retrouve orphelin de toute compétition européenne.

Une première depuis 1996 pour le club rhodanien, à moins bien sûr qu’il n’arrache un ticket pour l’Europa League face au PSG en Coupe de la Ligue… ou qu’il ne remporte la Ligue des Champions en août. Deux scénarios inenvisageables, l’un plus que l’autre, qui ont poussé le président de l’OL Jean-Michel Aulas à conspuer les décisions de la LFP depuis plusieurs semaines dans les médias.

Ce sont 700 millions d’euros que perdrait le championnat français d’après JMA, chiffre revu à la baisse depuis à 400 par Vincent Chaudel, directeur de l’observatoire économique du sport. On pourrait penser que le podium de Ligue 1 est à l’abri de cette récession, mais la réalité est tout autre. Marseille et Rennes ont présenté des déficits de respectivement 100 et 20 millions d’euros. Nicolas Holveck, président du Stade Rennais, a d’ailleurs reconnu que le mercato 2020 serait particulier et qu’il impacterait fatalement les parcours français sur la scène européenne. Les pertes pour le PSG sont estimées à 120 millions sur le dernier exercice, chiffre prenant en compte les ventes effectuées par le club. Même le plus gros budget de Ligue 1 est affecté par la crise et pourrait se montrer plus raisonnable cet été.

Le mercato pas épargné par le Covid-19

Personne ne s’attend donc à des folies sur le marché cet été. Dernièrement, une nouvelle inconnue est venue complexifier une équation déjà très ardue. Habituellement, le mercato français s’étend de la mi-juin jusqu’à la toute fin du mois d’août, soit sur une durée de douze semaines, le maximum autorisé par la FIFA pour chaque championnat. La France voulait terminer son mercato à la date du 5 octobre, pour s’accorder avec ses voisins européens. Pour se conformer aux règles en vigueur, la LFP a donc décidé de couper en deux le mercato français, qui s’arrêterait entre le 9 juillet et le 10 août avant de reprendre jusqu’à la date voulue. Une décision qui suspend donc pour un temps les homologations, mais pas les tractations.

Du temps, les clubs français vont en avoir besoin. Si Lille, Paris ou encore Marseille semble vouloir dégraisser, le spectre du Covid-19 semble encore venir contrecarrer les plans des dirigeants. L’une des conséquences économiques de cette crise est la chute de la valeur marchande des joueurs. Certes, le PSG a pu acheter Mauro Icardi à un prix plutôt bas, 50 millions d’euros quand sa clause s’élevait à 70. Mais c’est un avantage à double tranchant : si on achète à bas prix, il faut accepter de vendre à bas prix. Mauvaise nouvelle pour ceux qui envisageaient d’alléger leur masse salariale et d’assainir leurs finances.

Photo: Anthony Dibon – IconSport

La Direction nationale du contrôle de gestion (DNCG) est chargée chaque saison de valider les comptes des clubs professionnels. Si cela peut être une formalité pour certains, l’exercice a été particulièrement périlleux pour le LOSC cette année. Le gendarme financier du foot français a convoqué les Lillois à deux reprises afin que le club nordiste apporte les garanties financières adéquates. Les Nordistes espéraient vendre suffisamment en juin pour rentrer dans leurs comptes mais la crise sanitaire a retardé bon nombre de dossiers. Et si les ventes de Victor Osimhen et Gabriel pourraient rapporter environ 100 millions d’euros au club, Gérard Lopez, le propriétaire du LOSC, a dû s’engager à couvrir un éventuel passif auprès de la DNCG.

Merchandising et billetteries en chute libre

Dernier obstacle à la bonne santé financière des clubs, les recettes engendrées par la billetterie demeurent encore incertaines. Depuis le 1er juillet, les stades ont pu rouvrir et accueillir un maximum de 5 000 personnes, afin que les mesures de distanciations sociales soient respectées. Fait important, ce contingent inclut toutes les personnes présentes dans le stade : joueurs, staff, journalistes ou encore dirigeants. Le Stade de France, qui accueille la finale de Coupe de France le 31 juillet prochain, ne sera donc rempli qu’à 6% de sa capacité habituelle. Et seules 1000 places ont été mis à la disposition du PSG et de l’OL. Même si une nouvelle phase du déconfinement est espérée au mois de septembre, les clubs ont raison de s’inquiéter.

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Dans le championnat français, on estime que les recettes de la billetterie correspondent à 15% du budget d’un club, 20% pour certains. Le merchandising, qui équivaut à environ 40% des finances du club, n’est pas à l’honneur non plus. On pense que les ventes de maillots ont chuté de 45% avec la crise sanitaire. Traditionnellement, les nouveaux maillots des clubs sont présentés au mois de juin, parfois même portés lors de la dernière journée du championnat. Le lancement de ces nouveaux équipements a été retardé d’environ un mois cette année. Par exemple le PSG n’a présenté ses maillots domiciles et extérieurs que ce mardi 21 juillet, à l’occasion de la réception du Celtic Glasgow au Parc des Princes. Une affaire qui n’arrangera pas les finances des clubs français.

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