[Euro 2020] Jour-J : tous les chemins mènent au Stadio Olimpico

À quelques heures du coup d’envoi de l’Euro, Rome espère un engouement à la hauteur de l’attente autour de l’évènement. Prise de température au sens propre et figuré.

En plein centre de Rome, sur la Piazza del Popolo, l’ambiance est aux derniers préparatifs sous la chaleur harassante du mois de juin romain. 32° au thermomètre, pas de quoi stopper l’activité incessante de la plus grande des fan-zones des 11 villes hôtes.

Devant l’écran géant qui accueillera au maximum de sa capacité 1680 personnes, les détails ont déjà leur importance. Quelques-uns des mobility makers, les bénévoles qui assureront la coordination entre l’organisation et les visiteurs, répètent une chorégraphie pour le lancement officiel de la fan-zone ce vendredi.

Quelques rares touristes, attirés par ce climat de fête qui n’a pas vraiment commencé, tentent de se frayer un chemin. Sans succès. La sécurité reste droite et impassible, comme la fameuse obélisque égyptienne qui symbolise ce carrefour de vie de la capitale italienne.

Pendant un mois, l’immense place d’inspiration néo-classique accueillera les visiteurs du monde entier autour de différentes attractions : des spectacles, des tournois de foot 3vs3, teqball, des retransmissions des matches en direct et des dizaines d’autres activités liées au plus grand événement footballistique de l’année. L’organisation a dû faire face aux aléas de la crise sanitaire, entre annulation, restriction et finalement satisfaction de pouvoir ouvrir un espace, où se côtoieront des visiteurs qui seront, disons-le, majoritairement italiens.

À quelques encablures, des tentes blanches permettent aux bénévoles, au personnel de sécurité et à l’organisation de réaliser les tests COVID instantanés. Chacun d’entre eux sera testé chaque matin conformément au strict protocole sanitaire. Comme dans la grande majorité des commerces de la capitale, on testera la température de chacun des visiteurs qui devront ensuite respecter scrupuleusement les mesures de distanciation sociale. La Mairie avait prévenu, toutes les précautions seront prises, quitte à fermer les principales zones de rassemblement.

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Pas de quoi décourager les curieux venus prendre le pouls d’un évènement dont on a perdu l’habitude. «Je suis descendu depuis Florence pour assister au match. C’est mon premier voyage depuis presque un an. Covid ou pas, je n’aurai manqué cette occasion pour rien au monde», confie Lorenzo, seul supporter déjà habillé aux couleurs de l’Italie.

Rome est une fête

De mémoire de Romains interrogés, on n’a plus célébré le ballon rond sur cette place depuis des lustres. Une étincelle, juste une étincelle, lorsqu’en avril 2018, l’AS Rome avait triomphé du FC Barcelone en quarts de finale de Ligue des champions (3-0), pour la fameuse «romatada».

Des milliers de tifosi Giallorossi s’étaient alors amassés sur les pavés de l’immense place pour fêter l’inconcevable, un soir de printemps. Même le président de l’époque, James Palotta, s’était joint à la fête. Fendant la foule en délire, le magnat américain avait fini son show par un plongeon dans l’une des quatre fontaines de la place. Un épisode que l’on aime se remémorer lorsque l’on supporte la Louve, moins du côté du rival laziale qui aura toutefois connu quelques épopées sur cette place. En 2013, la victoire des biancocelesti en Coupe d’Italie contre le grand rival romain avait été accompagnée d’une nuit de célébrations aux couleurs ciel et blanche.

Les lustres de nos deux sœurs romaines ont un poids beaucoup trop lourd pour que l’hypothèse de l’exagération puisse être considérée. Alors on espère beaucoup de l’équipe nationale. Comme toujours.

Les unes des journaux des jours précédents sont aussi là pour le rappeler. À la maison, l’Italie ne doit pas décevoir (NDLR : l’Italie jouera ses 3 matches de poule à Rome). Après l’échec magistral du Mondial 2018, la Nazionale doit redorer son blason. Loin d’être favoris, les hommes de Mancini ne cachent pas leur ambition de faire bonne figure dans les mots, mais aussi dans les chiffres. Les Italiens arrivent à l’Euro en étant invaincus depuis septembre 2018 et en ayant gardée leur cage inviolée depuis huit matches.

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Dans une compétition aussi serrée, où l’on joue sa peau toutes les 90 minutes, c’est aussi la force collective qui permettra de soulever le trophée le 11 juillet prochain, à Wembley. Alors, tant du côté des supporters que du côté des joueurs, on se satisfait  dans cette étiquette d’outsider, dont on attend rien et tout à la fois.

Il faut dire qu’en 2016, la formule avait fonctionné avec une équipe qui sur le papier n’avait pas grand-chose à espérer, puis qui sous la houlette d’Antonio Conte s’était transcendée pour remporter de belles batailles contre la Belgique (0-2), la Suède (0-1) et l’Espagne (2-0). C’est finalement aux tirs au but face à l’Allemagne (1-1) que les rêves transalpins prirent fin, dans un curieux mélange de frustration, de déception et de satisfaction.

«Un contexte particulier»

Que l’Italie brille ou non, pour Rome l’Euro sera une fête, même un triomphe, après une année de restrictions dues à la crise sanitaire. Sans ses touristes, la ville éternelle est à l’arrêt et ce coup de projecteur est le bienvenu pour les dizaines de milliers de Romains travaillant dans le secteur. «L’engouement pour la compétition augmente à mesure que le compte à rebours descend, même si les mesures sanitaires et la peur des gens de se rassembler crée une atmosphère assez bizarre», constate Stéphane Oddi, rédacteur en chef du site AmoRoma.

Expatrié depuis 2 ans, ce supporter inconditionnel de la Louve a rejoint l’équipe des bénévoles qui œuvrera pour le bon déroulé de la manifestation. «L’organisation est très méticuleuse, dans le stade par exemple, on suit un circuit à sens unique. Les 16 000 spectateurs seront assis et espacés de trois sièges chacun. Ce sera un contexte particulier pour les supporters aussi, raconte-t-il. On a hâte que la compétition commence pour sentir la tension des grands rendez-vous. Rome a besoin de ça.»

À l’Euro, Rome accueillera les trois matches de poule de l’Italie contre la Turquie, la Suisse et le pays de Galles, ainsi qu’un quart de finale. L’occasion de lier les desseins d’une sélection ambitieuse et le besoin d’un pays entier de retourner à la fête populaire et fédératrice qu’est le football. Qu’il en soit ainsi.

Crédit photo : Colomban Jaosidy

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