Longtemps dans l’obscurité du football anglais, le Wolverhampton Wanderers FC sort de sa tanière. Après avoir conquis la couronne de Championship (finissant avec 99 points et +43 de goal-average), les Loups ont, cette saison, posé leurs griffes en milieu de classement de Premier League. S’ils marchent à pas de loup, les trois prochains matchs qui les attendent (Leicester, West Ham et Everton) pourraient bien leur permettre de devancer des concurrents directs. Prudence est de mise pour leurs prédateurs car l’expression « faire entrer le loup dans la bergerie » est loin d’être une métaphore Outre-Manche. De nature mystérieux et opportunistes, les Loups mangent ce qui se trouvent sur leurs passages, peu importe la taille de leurs proies. Leur tableau de chasse en est la preuve : Manchester City (1-1), Manchester United (1-1), Arsenal (1-1), Chelsea (2-1), Tottenham (1-3) ou plus récemment Liverpool en FA Cup (2-1), se sont déjà jetés dans la gueule des Loups et ont fini par se faire mordre.
Orange is the new Portugal
Equipe surprise, sous-estimée ou élément perturbateur ? Sans doute les trois à la fois. Et si cette équipe avez même l’étoffe pour se qualifier pour la Ligue Europa ? Difficile de faire un pronostic à l’heure actuelle. Néanmoins, finir dans le Top 10 paraît plus réaliste et serait un bon moyen de fêter leur retour au festin des rois. Sur le papier, cette folie des grandeurs n’a rien d’irrationnelle, bien au contraire. Le club s’est donné les moyens d’être compétitif depuis l’arrivée du conglomérat chinois, Fosun International, en juillet 2016. Un rachat lié à l’appel du président du pays, Xi Jinping, qui souhaitait voir s’étendre l’influence de la Chine au football européen. Pour atteindre les rêves les plus fous de ses propriétaires, Wolverhampton n’a pas hésité à casser sa tirelire.
Gage du changement d’ère du club, la plupart des records de transferts de l’histoire du club ont été battus ces dernières années. Avec un recrutement marqué par la patte de Jorge Mendes et de sa société de gestion de carrière créée en 1996, Gestifute, le Portugal a colonisé Wolverhampton. Sur les 30 joueurs qui composent l’effectif, 11 joueurs, ainsi que Nuno le coach, lui appartiennent. Ainsi, Ruben Neves, Willy Boly, Ruben Vinagre, Ivan Cavaleiro, Diogo Jota, Helder Costa, Leo Bonatini sont arrivés lors des deux dernières saisons. Cet été, la meute s’est aussi considérablement renforcée avec Joao Moutinho, Rui Patricio, Jonny Castro et Raul Jimenez. En dépit de ses 180 jours de pluie par an, Wolverhampton a des allures de cocon lusitanien.
Une faim de loup
Comme tout Portugais qui se respecte, Nuno Espirito Santo, la construction, ça le connaît. Le technicien a réussi à bâtir une solide équipe en s’appuyant sur des fondations héritées de la saison précédente. Il faut dire que les Loups sortent d’une saison grandiose où ils ont gardé le fauteuil de leader depuis la 15ème journée. Meilleure attaque et meilleure défense du championnat, les Loups ont montré leur supériorité dans tous les domaines, si bien que trois d’entre eux ont terminé dans le onze type de Championship (Ruddy, Boly et Ruben Neves).
Cette saison, les pensionnaires du Molineux Stadium marquent peu mais parviennent à faire mal sur de petits écarts puisque l’équipe n’a jamais mis plus de deux buts et concédé plus de trois (6ème défense du championnat avec 28 buts encaissés). Dans le 3-4-3 ou le 3-5-2 instauré par l’entraîneur lusitanien, les Wolves pratiquent un football basé sur la possession et demeurent difficiles à manœuvrer car ils s’adaptent facilement à la formation adverse. Cette grande flexibilité tactique est l’un des atouts de cette effectif avec des joueurs qui peuvent évoluer à plusieurs postes tels que Doherty ou Jonny qui sont capables de jouer dans un rôle de piston ou de latéral. La charnière centrale, généralement composée de Bennett-Coady-Boly, n’a rien à envier avec celle des grosses cylindrées.
Le jeune loup et le père loup : Ruben Neves et Joao Moutinho
En vérité, le bloc où les Loups excellent se trouve au milieu. Placé au cœur du jeu, le duo formé par la pépite portugaise Ruben Neves et le vieux briscard Joao Moutinho, impressionne. Loin d’être rapide et d’avoir un physique rugueux taillé pour un championnat considéré comme intense, les deux compatriotes se démarquent cependant par leur vista et leur qualité de passe. Quand l’un éclabousse de son talent et de son élégance sur le terrain, l’autre brille également par sa sérénité et sa justesse. La parfaite harmonie entre jeunesse et expérience.
Capables de se projeter vite vers l’avant, ils orchestrent la symphonie collective en multipliant les transversales et renversements de jeu en direction de leur trio d’attaque (Costa-Jimenez-Cavaleiro) et des deux latéraux placés très haut (Doherty à droite, Jonny à gauche). Leur capacité évidente à casser les lignes n’est plus à prouver. Lorsqu’il s’agit de maîtriser le tempo du match, les deux maestros gèrent à merveille. La recette est simple : découper un bon kilo de patate « Ruben Neves », ajouter une poignée de caviars et saupoudrez le tout d’intelligence mélangée avec un brin de technique. Vous obtenez la paire la plus séduisante d’Angleterre.
Si un manque de maturité, prévisible pour un promu, a provoqué plusieurs défaites qui aurait pu être évité contre des équipes de moins bonne qualité, les Loups ont montré qu’ils avaient des arguments pour faire déjouer leurs adversaires. Désormais, les autres formations de Premier League le savent. Wolverhampton est connu comme le loup blanc ou plutôt… orange.
Crédits photos : Lindsey PARNABY / AFP