#LPDC9 : Analyse Tactique : Manchester City – AS Monaco

Après le match historique du PSG contre le Barça (4-0), c’était au tour du second club de l’Hexagone de faire son entrée dans la phase finale de la Ligue des Champions. L’AS Monaco se déplaçait du côté de l’Etihad Stadium pour y affronter la nouvelle équipe de Josep Guardiola, Manchester City.

Élogieux sur son adversaire du soir lors de la conférence de presse d’avant match, le tacticien espagnol avoue même qu’il est impatient de jouer contre Monaco et de voir quel est le niveau de son équipe.

Actuellement 2èmes de la Premier League, les Skyblues viennent d’enchaîner 5 matchs sans défaite en championnat, dont un nul 2-2 contre Tottenham, après la correction reçue face à Everton (4-0). Ils affrontaient l’équipe de Leonardo Jardim avec 2 absents majeurs : Ilkay Gundogan, blessé au genou, et Gabriel Jesus, fraîchement blessé au pied.

De l’autre côté, on retrouve une équipe monégasque en pleine forme depuis le début de saison. Classé à la 1ère place du classement de Ligue 1, le club de la principauté est invaincu en 2017 avec 10 matchs sans défaites toutes compétitions confondues : 8 victoires et 2 matchs nuls contre Paris et Bastia (1-1). En ce qui concerne les absents, Jemerson est suspendu après son deuxième carton jaune en deux matchs lors de la phase de poules.

Les amateurs de football attendaient avec impatience cette confrontation, et bah on n’a pas été déçus.

Les compositions d’équipe

Avant le début de la rencontre, des doutes subsistaient au niveau des compositions d’équipe suite aux différentes blessures et suspensions des deux côtés.

Côté monégasque, le bruit circulait que Leonardo Jardim préparait un coup tactique, repositionnant son équipe dans un autre système avec différents joueurs. Finalement, le tacticien portugais est tout de même resté dans son 4-4-2 préférentiel mais avec deux joueurs qui ne sont pas généralement dans son 11 de départ. On y retrouve Andrea Raggi pour remplacer Jemerson et surtout Kylian Mbappé à la place de Valère Germain, relégué sur le banc.

En ce qui concerne les mancuniens, on ne savait pas ce que Guardiola allait nous concocter sachant que ce dernier a aligné seulement 2 fois de suite un 11 de départ identique depuis le début de la saison (contre Swansea et Bournemouth). Ils sont restés dans leur dynamique avec Fernandinho latéral gauche et Sergio Agüero, qui retrouve une place de titulaire depuis la blessure de Gabriel Jesus.

La composition de Manchester City.

La composition de Monaco.

Jardim a voulu attaquer violemment le domicile de Guardiola…

On se doutait tous de la physionomie de la rencontre avant même le début du match: Manchester City allait tenir le ballon pendant que Monaco allait surtout profiter des transitions pour attaquer. La question était de savoir si le tacticien portugais voulait que son équipe soit passive ou active pour récupérer le ballon. Et il a décidé de se tourner vers le second choix.

Lors des sorties de balle du côté de Manchester City, les 4 joueurs offensifs n’hésitent pas à progresser pour agresser les joueurs mancuniens et fermer toutes les situations de passes courtes. Ils enclenchent ce pressing dès la première passe de Caballero.

Sur cette vidéo, on voit que le pressing a été efficace car on observe deux pertes de balle du gardien argentin dont l’une fatale qui a crée l’action du premier but de Falcao (31e minute). Ils ont réussi à forcer le jeu sur le portier dont les qualités techniques sont très limitées pour une relance risquée comme le demande Guardiola. De ce fait, l’arrière garde anglaise a dû jeter parfois beaucoup de longs ballons (52) pour se sortir du pressing monégasque sans prendre de risques.

Lorsque ce pressing est passé, les rouges et blanc se repositionnent directement en bloc bas et en restant bien en place. Dès que le ballon est récupéré, les joueurs de Jardim profitent de la fouge de la pépite française pour jouer long grâce à sa vitesse et à sa qualité de percussion. Et c’est très bien fait : les monégasques rentrent à la pause avec un avantage au score (1-2) et statistiquement (10 tirs à 3 !!!!)

… en bloquant les issues de secours …

En plus d’être audacieux concernant la première relance des citizens, Monaco a encore été « chiant » pour les bleu ciel dans les zones qui les favorisent : les côtés. L’équipe du nord de l’Angleterre s’appuie sur des joueurs de percussion capables de faire la différence sur des 1 contre 1. Du coup, Leo Jardim a décidé de les agresser grâce à ses latéraux au volume de jeu incroyable et leur agressivité comme on peut le voir dans le tableau ci-dessous.

          

En plus de leur activité, les deux mobylettes sont souvent aidés par à la fois les meneurs de jeu excentrés défendant sur les latéraux adverses lorsqu’ils collent la ligne en plus des milieux axiaux. Ces derniers sont autant agressifs que leurs coéquipiers pour bloquer le plus possible les transmissions avec De Bruyne et Silva, empêchant de créer un triangle entre 3 coéquipiers.

… mais Manchester City en a profité pour détruire sa maison.

Beaucoup d’entraîneurs auraient basé la sortie de balle sur les seconds ballons pour attendre la fatigue de son adversaire pour enfin tenter de ressortir proprement. Mais pas chez Pep.

Les solutions pour ressortir le ballon varient pour déstabiliser le placement de Monaco. Premièrement, on retrouve les décrochages de Yaya Touré entre ses deux défenseurs. Cela permet d’avoir un surnombre face à l’attaque monégasque et d’éviter de retourner vers Willy Caballero. Ce dernier a du mal sur son jeu au pied comme on a pu le voir précédemment donc la présence de l’ivorien permet d’avoir une meilleur présence technique et de la qualité pour repartir vers l’avant.

La seconde est visible par cette image : la présence de joueurs derrière Mbappé et Falcao. Ils permettent de créer une incertitude concernant le placement des rouge et noir lorsque leur bloc se trouve en position haute. Cette variante s’explique de plus par la présence de Fernandinho sur le côté gauche de la défense.

Ce dernier profite de la construction de l’attaque placée pour dézoner de son couloir de départ et s’associer avec Yaya Touré pour créer à la fois un surnombre dans une zone de jeu libre et un décalage. Lorsque le Brésilien prend l’initiative de se recentrer, Sané prend toute la largeur pour avoir cette solution sur les côtés pour la défense. De plus, des décalages se provoquent plus haut sur le terrain avec les deux maestros de Manchester City. Fabinho et Bakayoko doivent défendre sur les deux joueurs mancuniens mais ont devant eux deux joueurs libres. Le déséquilibre est vite créé dès que les joueurs sont trouvés.

Si on revient sur l’image du décrochage de Touré, on remarque que les deux latéraux sont dans l’axe, provoquant un changement de profil pour les deux ailiers : ils doivent prendre toute la largeur du terrain.

Enfin, on retrouve l’un des fondamentaux de Guardiola dans son jeu : le 3e homme. Les décalages se font grâce à des mouvements de groupe et une grosse qualité technique. Sur cette séquence, on voit tout les profils dont Guardiola avait besoin pour son jeu et pourquoi ils les a alignés durant cette nuit magnifique : Stones pour ses qualités de passes, Agüero pour sa capacité à jouer entre les lignes et Yaya pour son intelligence.

De plus, les déplacements de Silva et de De Bruyne qui s’effacent de l’axe pour créer un intervalle de passes sont de grande classe. Guardiola demandait à Puyol lors de sa pige au Barça de chercher le plus loin possible lors de sa relance, et bah maintenant on sait ce qu’il demande à Stones.

Monaco n’arrive pas à gérer ce déséquilibre et ces changements de zone vu que les joueurs doivent s’orienter sur l’homme. C’est sûrement l’une des limites qui a fait la différence sur le match.

En plus de cette difficulté, les joueurs de Jardim ont craqué physiquement (25 duels gagnés en 2nde période contre 34 pour City). De ce fait, Guardiola a profité de cette fatigue pour faire rentrer Zabaleta dans un rôle permettant de créer un double rideau de largeur.

Les espaces permettent aux relanceurs d’avoir la possibilité de progresser balle au pied pour attaquer l’espace. Grâce à leur initiative, le porteur de balle trouve toujours une solution excentrée libre du fait que le défenseur sorte sur ce dernier. Dès la transmission du ballon, on a donc un triangle de jeu qui se formaient avec des joueurs excentrés qui coordonnent leurs déplacements et une solution axiale.

 Conclusion

Ce match a été fantastique pour n’importe quel amateur de football neutre, c’était un match vivant et rempli de rebondissements. Mais en tant que supporter d’une équipe, le match ne devait pas être facile à vivre : beaucoup de lacunes défensives des deux côtés, des erreurs individuelles coûtant des buts (4 buts sur 8 inscrits) et une condition physique préoccupante pour la suite des compétitions pour les différents clubs.

Une chose est sûre, c’est que le premier round a été remporté par Guardiola chez lui mais que le combat est loin d’être fini. Surtout qu’un certain Colombien va sûrement être transcendé avec ses coéquipiers à Louis II dans 2 semaines.

Crédits photos : AFP PHOTO / Oli SCARFF

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Le football est une véritable partie d'échec.