Never enough with Brian Clough (Partie 1)

Brian Howard Clough, ce nom ne vous dit certainement pas grand chose aux premiers abords. Pourtant cet illustre entraîneur Anglais, dont le caractère rappelle un certain José Mourinho, fit les beaux jours du football british. Plus qu’un entraîneur, une personnalité, qui ne laissa personne indifférent et qui, marqué par une détermination sans faille, chevaucha les étoiles en compagnie de son fidèle compagnon Peter Taylor. Une association qui aura connu succès comme péripéties, et qui n’en reste pas moins un duo historique dans l’histoire du football anglais. Retour sur l’histoire d’un grand personnage du football Britannique qui aura marqué de son empreinte l’Outre-Manche durant la seconde partie du XXeme siècle.

Les débuts du phénomène Clough :

A l’image d’une grande partie de la jeunesse Anglaise, le jeune Brian, natif de Middlesbrough en 1935, se prends très rapidement d’affection pour le ballon rond. Doté d’une belle patte gauche, et très doué en tant qu’avant-centre, l’enfant du pays, fera ses classes dans le club de sa ville natale, avant de devenir professionnel à l’âge de 20 ans.

Véritable joyau, il aura inscrit la bagatelle de 213 buts en 197 matchs chez les Boros et remporté trois saisons d’affilée le titre de meilleur buteur. Sans avoir eu l’opportunité de se frotter régulièrement aux joutes de la première division anglaise le jeune Brian avait pu endosser à deux reprises la tunique des Three Lions en 1959 sans pour autant trouver le chemin des filets.

Son talent, et ses facilités pour ce sport, étaient hautement reconnus. Outre ses aptitudes remarquées, les observateurs de Boro firent rapidement la connaissance d’un personnage au caractère bien trempé, quelque peu imbu de sa personne, et d’une ambition difficilement égalable. Quoi de mieux pour illustrer ce fameux personnage ? Voici une liste non exhaustive de ses faits d’armes à Middlesbrough : faire une demande de transfert à seulement 17 ans, en raison de la supposée piètre qualité de ses coéquipiers et du manque criant d’ambition du club, ou encore susciter une demande de licenciement en raison d’un mouvement de grève de ses propres coéquipiers qui ne supportaient en rien son égo surdimensionné et ses punchlines dont lui seul avait le secret.

Fort heureusement pour lui, Brian pouvait compter sur son ange gardien en la personne de Peter Taylor. Un allié de taille, qui l’aidera à trouver ses marques au sein de l’effectif, afin qu’il puisse s’y imposer durablement. Ce dernier, qui sera grandement estimé par la suite dans sa capacité à dénicher des talents à foison, avait décelé quelque chose en ce Brian Clough. Le légendaire acolyte de l’attaquant évoluait au poste de gardien de but et revêtit la tunique de Boro entre 1955 et 1961. Très précieux pour Clough, l’idylle naissante entre les deux n’en était qu’à son commencement.

Quelques temps après, Brian plia bagages et rallia Sunderland en 1961 afin de rêver plus grand, étant omnibulé par la victoire, le surpassement de soi et la reconnaissance. Son aventure avec les Blacks Cats fut un franc succès, en dépit d’un terriblement évènement survenu lors du Boxing Day 1962, qui a probablement bouleversé la destinée de ce jeune joueur. Face à Bury, il se blessa gravement au genou, ce qui l’empêcha de poursuivre son rêve éveillé de footballeur professionnel, et ce malgré un retour express à la compétition deux années plus tard. Il raccrocha les crampons à seulement 29 ans.

Les prémices d’une grande histoire :

Après avoir mis un terme à sa carrière professionnelle, il était hors de question pour l’ancien goleador de Middlesbrough de se retirer du monde du football. Dans un premier temps, il s’occupa des jeunes de Sunderland afin de tâter le terrain et de découvrir une nouvelle facette du football. En recherche permanente de progrès, on se doutait bien que le jeune retraité n’allait pas s’éterniser bien longtemps avec les jeunes pousses du club rival de Newcastle.
Fraîchement trentenaire, après avoir obtenu ses diplômes d’entraîneur, il déposa ses valises à Hartlepool et découvrit les joies de la 4ème division Anglaise. Une opération commando, puisque le club luttait pour sa survie dans cette division. Qui d’autre que Peter Taylor pour l’accompagner dans cette mission, qui avait tout d’un traquenard ? Il n’en fut rien, et la bande à Clough et Taylor conclu cet exercice à la 8ème position. Une saison plutôt réussie, compte-tenu des difficultés évidentes du club avant l’arrivée du duo.
Cette première saison sur un banc, fut très instructive pour l’ensemble des observateurs. En effet, dans la lignée de ses années de footballeur, Clough fit énormément parler de lui pour son caractère affirmé, et son envie de tout contrôler afin de viser toujours et toujours plus haut. Cela passait par l’état de la pelouse, l’entretien du vestiaire, salaire de ses joueurs, la bonne organisation du staff… En somme, une exigence remarquable, signe démonstratif d’une envie de faire passer le club dans une nouvelle dimension. Une exigence à double tranchant. Cette envie de toujours faire mieux, avait un effet non-négligeable sur les résultats de son équipe, mais en interne, les rapports se dégradaient continuellement entre lui et le président, à tel point, que ce dernier démissionna l’année suivante. Une situation pour le moins cocasse, quand on sait que le président voulait licencier le jeune coach.
La saison suivante vint confirmer le bon travail effectué par le duo, en finissant à la 4ème place du championnat. Une prouesse qui n’allait pas rester sans suite. En effet, il attisa les convoitises et son nom commença à circuler auprès de nombreuses écuries. Au terme de cet exercice concluant, et en ayant plusieurs propositions sur la table, il décida de s’envoler vers de nouveaux cieux, et devint le nouvel entraîneur de Derby County. Il ne le savait pas encore, mais cette arrivée sonna peut-être comme le début de la grande aventure qu’il s’apprêtait à vivre.

Petit Brian est devenu grand à Derby :

Brian et son associé débarquèrent à Derby et découvrirent la deuxième division, cette fois-ci de l’autre côté de la barrière, reprenant une équipe qui végétait au second niveau, en proie aux difficultés, et luttant chèrement pour son maintien.

Mais le duo légendaire n’éprouva aucune difficulté à prendre ses aises dans son nouvel environnement. Seulement un an plus tard Derby County était sacré champion de Division 2. Une sacrée performance au vu des précédentes années de Derby.
La complémentarité à toute épreuve du duo, était à n’en pas douter le facteur clé du succès de cette équipe. Brian était au four et au moulin, tenait les médias, s’occupait en long en large et en travers de tout ce qui tournait autour de l’équipe, à savoir l’entretien de la pelouse et du vestiaire, les liens entre le staff et les joueurs, et les discours d’avant-matchs dont certains restent dans les mémoires. Voici une nouvelle fois, ce lien étroit entre Brian Clough et l’art de motiver. Peter Taylor quant à lui, était un maître dans l’art de déceler des affaires en or en matière de recrutement, en atteste la venue de l’icone Dave Mackay qui sera le futur capitaine et entraîneur du club. Pourtant âgé de 33 ans, Taylor convaincra Clough de le prendre. Un pari osé, mais réussi, qui verra Mackay devenir un élément clé de cette équipe, en atteste sa nomination pour le titre de meilleur joueur de Division 2 en 1969.
Une pluie de joueurs arriva au club, sur recommandations de Taylor, et le résultat fut une nouvelle fois fructueux. Entre Brian capable de galvaniser toute une troupe, tout un club, toute une ville, et Peter expert en recrutement et analyse tactique, la mayonnaise ne pouvait que prendre.

Résultat des courses ? Une montée en 1972 en première division, et le jeu le plus chatoyant au Royaume du kick’n rush, si précieux aux yeux de Don Revie, entraîneur mythique de Leeds United. A cette époque Leeds marchait littéralement (dans tous les sens du terme) sur les autres équipes d’Outre-Manche, en témoignent ses deux titres de champions d’Angleterre en 1969 et 1974, la FA Cup glanée en 1972, la Carling Cup en 1968, remportant à deux reprises la Coupe des villes de foires en 1968 et 1971. Tout en finissant vice-champion à cinq reprises entre 1965 et 1975, de la coupe des clubs champions (l’ancienne version de Ligue des Champions) en 1975 et de la coupe d’Europe des vainqueurs de coupes en 1973. Un âge d’or pour Leeds, qui connaîtra des difficultés par la suite, avant de renaître de ses cendres quelques années plus tard.

Une équipe réputée pour son engagement physique, très discutée notamment par un certain Brian Clough, qui n’hésitera pas à critiquer ouvertement leur agressivité en insinuant à plusieurs reprises qu’il ne les considérait pas comme de beaux champions. En effet, la bande à Brian pratiquait l’un des plus beaux jeu d’Angleterre, aux antipodes du Kick’n Rush traditionnel. Un jeu basé sur le ballon à terre, le redoublement de passes, chose qui pouvait surprendre dans le pays de Don Revie.
En un temps éclair, les Rams marquèrent les esprits associant qualité de jeu et résultats mais aussi frasques et punchlines à répétition du nouveau venu Brian Clough. De manière irrémédiable, une rivalité grandissante vit le jour entre le Derby de Clough et Taylor et le Leeds du légendaire Revy. A de nombreuses reprises, ils s’affrontèrent par médias interposés.

Après une surprenante 4ème place en 1970 entachée d’une non qualification européenne pour manque de ressources financières (ce qui n’a pas fait plaisir à vous savez qui), les renversants Rams devinrent champions d’Angleterre pour la première fois de leur histoire en 1972. Un exploit retentissant qui vint saluer le travail remarquable effectué par les deux hommes à la tête de l’équipe.

Récupérer une équipe aux résultats en demi-teinte, sans réelle perspective de progression couplé à une gestion douteuse, transformée en machine à gagner, tout en produisant un jeu attrayant et en glanant le titre au nez et à la barbe de Don Revie et de ses troupes. Une véritable prouesse qui fit le tour de l’Angleterre, et qui propulsa à juste titre, Clough Taylor et Derby dans une nouvelle dimension.

C’était une autre époque, où malice, compétence et savoir-faire faisaient bon ménage, et où de si belles histoires pouvaient venir égayer le monde du foot, à tout moment en présence de ces trois éléments. Aujourd’hui la tâche paraît bien plus complexe, notamment en raison d’un afflux financier toujours plus vertigineux, qui réduit de manière toujours plus considérable, ce type d’exploits, sans pour autant le supprimer.

Clough et Taylor avaient réussi leur pari : devancer le Leeds United de Billy Bremmer le capitaine au sang chaud. Malgré certaines dissensions en interne avec le président de Derby, en l’occurrence Sam Longson, le couple le plus glamour du foot Anglais resta à la tête de l’équipe et allait écrire une des plus belles pages du club. Pour leur première participation, dans l’ancienne version, de la plus prestigieuse des compétitions européennes, Derby se hissera jusqu’en demi-finale de Ligue des Champions en s’inclinant 3-1 sur l’ensemble des deux rencontres contre la Juve.

Avant cela, ils avaient dû éliminer FK Željezničar Sarajevo lors du premier tour, avant de sortir le Benfica Lisbonne 3-0 sur l’ensemble des rencontres au second tour. En quart de finale, après s’être incliné sur la plus petite des marges face au club Slovaque Spartak Trnava 1-0, ils avaient su inverser la tendance au retour en l’emportant 2-0. Puis vint cette fameuse opposition face aux Bianconeri qui s’inclineront par la suite 1-0 face à l’Ajax Amsterdam d’un certain Johan Cruyff, qui s’envolera juste après pour un club méconnu de Catalogne.

Une double confrontation qui fera couler beaucoup d’encre. En effet la Juventus sera accusée de corruption à la suite de cet affrontement.

Mais qu’importe, une nouvelle fois, Clough et Taylor auront montré à l’ensemble des observateurs qu’ils étaient parmi les meilleurs sur le circuit, et que leur ascension n’en était qu’à leur début. Forcément, leurs noms commencèrent à se faire connaitre dans toute l’Europe à la suite de ce parcours prodigieux en Coupe des Clubs Champions.

En dépit de leurs succès au sein du club, les tensions perdurèrent entre le président Sam Longson et les deux amis. Brian reprochera une nouvelle fois à ce dernier, son manque d’ambition et d’exigence afin d’emmener le club dans une autre galaxie. Le torchon brûla entre les différentes parties, et les deux acolytes décidèrent de démissionner durant la saison 1973-1974. Ce sera Dave Mackay qui reprendra le flambeau, et suivra les traces de son ancien manager, puisque sous sa houlette Derby remportera en 1975 son second et dernier titre de champion de leur histoire.
Clough et Taylor ne se reposeront pas bien longtemps, et reprirent du service illico presto dans le sud de l’Angleterre, à Brighton. Le club se situait alors en troisième division. En l’espace de quelques mois, ils passèrent de demi-finalistes de coupe d’Europe, à Brighton et la 3eme division Anglaise. Difficile d’imaginer un tel changement de nos jours.

Néanmoins, on connaissait parfaitement les ambitions élevées de chacun, et plus particulièrement celles de Brian Clough. Rester en division 3 ne faisait clairement pas partie de ses plans. Vint alors une offre de Leeds United, puisque Don Revie venait de prendre les rênes de l’équipe nationale anglaise. Une opportunité à ne pas manquer pour Clough, qui succédera à son meilleur ennemi. Néanmoins, on put assister à cet instant bien précis, à la première fracture dans le duo Clough-Taylor. Ce dernier, rejeta cette proposition et décida de poursuivre l’aventure à Brighton.

C’est ainsi que Brian Clough débarqua en 1974, à Leeds United le champion en titre. Une collaboration qui avait de quoi faire saliver, entre le meilleur jeune entraîneur et la meilleure équipe du pays. La première rencontre entre les joueurs de Leeds et leur nouveau coach fut extrêmement attendue en raison de déclarations et critiques adressées à répétition de la part de Clough envers Don Revie, le style de jeu peu académique de Leeds, et l’engagement abusif de certains joueurs…

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Brian arriva le vent en poupes, il ne le savait pas encore, mais il s’apprêtait à vivre les 44 jours les plus longs de sa jeune carrière.

La suite n’est qu’histoire…

Crédit photo : POPPERFOTO/ THE GUARDIAN

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Sinon, c'est si cool que ça d’être champions ?