Premier avec une très faible avance en championnat dans l’exercice peut-être le plus faible de ces dernières années, des cadres du vestiaire qui arrivent en fin de contrat et semblent ne pas être renouvelés, une stagnation en matière de recrutement… Et pourtant, l’Estadio do Dragão affiche quasiment complet à tous les matchs et les supporters retrouvent une ferveur qui avait disparu depuis l’époque d’André Villas-Boas. Toutefois, cet engouement à Porto est moindre et les voix discordantes se font de plus en plus entendre pour critiquer la politique du club et finalement, on retombe toujours là-dessus au Portugal, le fait que les clubs soient la propriété d’actionnaires en quête éternelle de bénéfices.
Une gestion d’effectif digne d’une carrière Football Manager ratée
Alors que l’on s’attendait à un été très mouvementé du côté de Porto avec les départs probables d’Alex Telles, de Moussa Marega, de Yacine Brahimi, d’Héctor Herrera ou encore de Felipe en plus de ceux de Marcano, de deux latéraux droits d’un très bon niveau en les personnes de Diogo Dalot vers ManU et Ricardo Pereira vers Leicester, de Gonçalo Paciencia et d’André André (excellents joueurs de sortie de banc), celui-ci a été plus calme que prévu. Et ce au grand dam des supporters, pas des actionnaires. Le maintien de ces quatre joueurs a causé le maintien d’une masse salariale élevée par rapport aux anticipations du conseil d’administration (CA). De ce fait, les postes des joueurs sur le départ n’ont pas forcément étaient comblés correctement et il n’y a pas non plus eu d’upgrade significative dans l’effectif.
Ainsi, celui qui occupe aujourd’hui le poste de latéral droit n’est autre que la charrette de Montevideo : Maxi Pereira. Pour les supporters du FCP, le downgrade est tel qu’il faut bien se mouiller la nuque avant d’apprendre la nouvelle. Avec les ventes des deux latéraux qui ont représenté plus de 40 millions d’euros, investir sur un bon joueur à ce poste n’aurait sans doute pas été de trop. Oui, João Pedro, brésilien prometteur de 21 ans a été acheté à ce poste. Cependant, il n’est pas (encore ?) au niveau et a besoin de progresser. Nombre d’achats inutiles ont également été effectués tel Chancel Mbemba (back-up de Awaziem, lui-même back-up de Felipe). On sait que Porto a besoin d’argent car sa dette augmente d’années en années en raison de la gestion calamiteuse des finances par le CA. C’est sans doute pour cela (en plus des profits voulus par les actionnaires) que le club ne renouvelle que trop peu son effectif pour espérer progresser.
Comme évoqué précédemment, le club a également eu l’opportunité de vendre des joueurs à un prix élevé cet été : Herrera entre 20 et 25 millions, Marega à 35 millions (merci les droits TV britanniques), Telles à 45, Brahimi à au moins 30 millions et Felipe entre 20 et 30 selon les offres. Porto a tout rejeté en bloc, arguant de la compétitivité du championnat. Le résultat est moins flatteur : Marega a été mis à l’écart tout le début de saison et a du mal à retrouver son régime de la saison dernière, Herrera et Brahimi sont en fin de contrat et le club ne veut pas les prolonger, ce qui fait qu’ils partiront sans doute libres, et Felipe commet énormément de boulettes qui coûtent des buts. Les deux cas où la direction est blâmable sont les cas Herrera et Marega. Absolument tout le monde s’accordait à dire qu’ils étaient en sur-régime et que les vendre à leur prix fort était la meilleure chose à faire, Porto disposant de meilleurs joueurs au club (Oliver Torres pour Herrera et Otávio ou Soares pour Marega). N’en faisant qu’à sa tête, elle n’a écouté personne et Porto se retrouve une année encore avec des problèmes de dette et de joueurs-clés qui partiront libres.
Des objectifs de saison qui se suivent et se ressemblent, causes d’une stagnation sportive
Plus que les problèmes économiques du club, cette gestion révèle autre chose : le manque d’ambition inhérent au système actionnarial et qui touche tous les clubs gérés par des hommes d’affaires. Forcément, lorsque l’on cherche à gagner le plus d’argent possible le plus vite possible, on oublie les gains financiers potentiels sur du long terme : la Ligue des champions. Là-dessus, le constat est généralisable aux trois grands clubs portugais. On passe ses mercatos à piller les équipes moins fortes du championnat pour conserver sa suprématie et on ne cherche même pas à attirer de bons joueurs hors des frontières. On reste campé sur la politique du « crack sud-américain qui évoluera et qu’on revendra dix fois plus cher qu’on ne l’a acheté » et il n’y a aucune remise en question.
Cette politique atteint pourtant ses limites : avec un effectif taillé pour aller chercher le titre de Liga Nos et les huitièmes de finale de Champions League, Porto se voit pris dans ses travers. Braga dispose d’un bon effectif qui est l’un des meilleurs de l’histoire récente du club et n’hésite pas à aller titiller les gros. Le SC Braga est actuellement premier à égalité de points avec Porto et pratique un football de qualité, Benfica suivant un point derrière. Mais ce qui est d’autant plus marquant voire choquant avec le club portista, c’est son auto-suffisance. Récemment lors du Classique face à Benfica, les hommes de Conceição sont venus à l’Estadio da Luz pour faire 0-0. Ils l’ont payé cash en encaissant un but à la 62ème du fait de leur immobilité et se sont inclinés 1-0.
Plus tôt dans la saison, face à Guimarães, Porto menait deux buts à rien tranquillement à la mi-temps. Logiquement, Guimarães allait revenir sur le terrain avec la volonté d’égaliser voire plus. C’est exactement cela qui s’est produit mais Porto a tout de même réussi à perdre 3-2 en étant visiblement surpris par l’attitude des Vimaranenses. C’est vrai qu’il est peu commun qu’une équipe ait envie de gagner au foot… Dans ce cas-ci, la responsabilité était clairement pour Conceição. En somme, Porto va devoir se réinventer pour ne pas sombrer dans une crise qui pourrait durer plusieurs années. Se réinventer peut aussi passer une remodélisation de ses instances, mais on touche là un point sensible particulièrement tabou au Portugal…
Crédits photos : Ramil Sitdikov / Sputnik