Elle rappelle cette histoire biblique de David et de Goliath et c’est là toute son essence. La Coupe de France permet à des petits clubs d’en affronter des grands. Elle leur permet aussi, parfois, des les vaincre et d’entraîner alors la mutation d’un petit poucet en un géant professionnel, comme si l’euphorie d’une aventure était éternelle. Cette histoire, que certains clubs de France comme Guingamp ont vécu, doit elle aussi être écrite pour que David voit son écho résonner dans le football moderne.
1973, dans les Côtes d’Armor, le petit club de l’En Avant Guingamp impressionne la France entière avec son aventure en Coupe de France. Bientôt il entamera une ascension phénoménale qui le mènera en Coupe d’Europe. Mais pour l’heure, il n’est qu’un club d’inconnu, un club qu’une bande de jeunes au talent certain a décidé de faire grandir par leur enthousiasme et leur gloire. Trois années plus tôt, en 1970, le club s’envole en Coupe Gambardella en battant les plus grands clubs de la région. Rennes déjà, Nantes ensuite. Les costarmoricains arrivent en quart de finale où ils affrontent les jeunes espoirs de l’AS Saint-Etienne, quelques années avant que ces derniers ne connaissent l’une des plus grandes aventures européennes d’un club français. Les Guingampais s’inclinent 1-0 mais l’essentiel est ailleurs : la jeune génération est prête pour faire de l’En Avant un club mythique. Le 3 juin 1972, un jeune président arrive pour concrétiser les espoirs du club breton. Il porte le nom de Noël Le Graët. Pour sa première saison, le futur président de la FFF engage un jeune entraîneur-joueur de 22 ans qui composera avec un effectif tout aussi jeune. Le club est dans l’équivalent de la Régional 2 aujourd’hui mais son véritable succès, il le trouve en Coupe de France et ce, dès la première saison de cette nouvelle ère.
En effet, l’équipe talentueuse élimine quatre équipes de deuxième division avant finalement de s’incliner en huitième de finale contre Rouen. Et si l’aventure n’a pas été si longue que celle de Calais ou Quevilly plus récemment, Guingamp a quand même réussi à marquer les esprits et à s’affirmer face aux meilleurs. Les saisons suivantes, les jeunes joueurs ne quittent pas le club et continuent leurs exploits. Très rapidement, ils gravissent les échelons et arrivent en division 3 à l’issue de l’année 1976, une année où ils avaient encore brillé en Coupe de France, étant éliminés en seizième de finale par le LOSC. Une année plus tard, la même bande (encore composée de ceux qui avaient participé à la Gambardella en 1970) parvient à atteindre la division 2. Il ne faudra plus longtemps avant que le petit bourg de 7000 habitants ne devienne un club pro.
La liste des clubs qui ont réussi des grandes aventures en Coupe de France est longue. On peut citer de nouveau Quevilly et Calais mais il faut aussi voir d’autres clubs qui ont, comme Guingamp, fait de cette compétition un véritable fer de lance. Parmi eux, le Clermont Foot et le Nîmes Olympiques. Nîmes n’était pas un petit club comme les autres avant les années 90. Habitué des deux premières divisions, le club connaît cependant des difficultés en 1995 et descend en troisième division. Mais l’année suivante, les Crocodiles, pourtant très en difficulté en championnat, éliminent tous leurs adversaires en Coupe de France et notamment Saint-Etienne, Strasbourg ou le grand rival Montpellier. Il affronte en finale les Auxerrois de Guy Roux et malgré leur ouverture du score, ils perdront 2-1 à cause des buts de Laurent Blanc et Lilian Laslandes. Reste que l’aventure en coupe est extraordinaire et que Nîmes, sauvé in extremis de la descente en quatrième division (grâce à la relégation administrative de deux autres clubs sur ordre de la DNCG) ne mettre pas longtemps à retrouver la deuxième division, porté par son élan.
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Clermont Foot aussi avait connu le professionnalisme à la fin des années 80. Mais les difficultés se sont accumulées et le club avait déposé son bilan. En 1996, alors qu’ils sont en quatrième division, les Clermontois se lancent en Coupe de France par un premier match calamiteux où ils affrontent une petite équipe de niveau régional et où ils s’imposent 13-12 aux tirs au but dans un stade sans éclairage. Mais la suite est plus convaincante, après avoir éliminé Martigues et Lorient, le CFA63 tombe en huitième de finale contre le grand PSG de Raï. Le stade est complet, la Place de Jaude aussi mais tout ne se passe pas comme prévu. A la 70ème minute, les Auvergnats sont menés 4 buts à 1. Mais les buts de Chastang, Le Bellec et N’Gotty (contre son camp) leur permettent de revenir à égalité. Aucun but ne sera inscrit en prolongation et c’est finalement aux tirs au buts que les Clermontois s’imposent. Le club finira par être éliminé par Nice mais cette aventure fut un pas décisif dans la nouvelle vie d’un club qui grimpera en deuxième division quelques années plus tard.
Finalement, il est difficile de dire si l’on a là la plus belle compétition de football. D’autres, d’une qualité supérieure et d’une grandeur laissant rêveur, nous passionnent peut-être plus. C’est le cas de la Ligue des champions ou de la Coupe du monde par exemple. Mais ce dont on peut être sûr, c’est qu’à défaut d’être belle, la Coupe de France est différente et c’est ainsi qu’elle nous séduit. Elle est différente parce que c’est dans la participation à celle-ci et non dans sa contemplation que nous y trouvons du plaisir, elle est différente parce qu’elle permet aux petits de goûter aux plaisirs des plus grands, elle est différente parce qu’elle est la réunion parfaite des valeurs qui animent le football.
Crédit photo : Europe1