Le Milan, enfin sexy?

Six ans. Voilà à quand remonte la dernière participation du Milan à la plus prestigieuse des coupes européennes. Six longues années durant lesquelles le géant Italien a traversé des moments compliqués entre résultats sportifs et financiers catastrophiques, instabilité institutionnelle et recrutement déplorable. Mais depuis plusieurs mois, le Milan montre un visage séduisant sur le terrain et au niveau institutionnel. Avec toute proportion gardée, Ultimo Diez revient sur ce retour au premier plan des milanais et des ambitions affichées.

La patience est vertu

Elliott Management, fond d’investissement propriétaire du club, a repris les rênes dans des conditions tumultueuses. Le 13 avril 2017, Silvio Berlusconi l’emblématique président du club cède son « bébé » après plus de trente années de bons et loyaux services. C’est un homme d’affaire chinois du nom de Yonghong Li qui rachète l’écurie lombarde. Ce dernier obtient un prêt de la part d’Elliott Management pour mettre en place son projet. Seulement voilà, les mois passent et Mr Li ne parvient pas à rembourser son emprunt de 30 millions d’euros auprès du fond d’investissement américain. En juillet 2018, Yonghong Li est prié de céder le Milan. Le repreneur n’est autre qu’Elliott Management.

Avec l’énorme déficit que le Milan a engrangé ces dernières années et particulièrement sous l’ère chinoise, Elliott Management doit rapidement trouver les solutions, quitte à travailler dans l’urgence comme en témoigne le mercato hivernal 2019. Le Milan investit au total 78 millions d’euros sur Piatek (35) et Paqueta (38). Résultat : l’international Polonais est vendu un an et demi plus tard pour 24 millions d’euros. Paqueta est certes toujours au club, mais il a tout d’un échec sportif comme en témoignent ses statistiques: un but pour 44 matches joués. Autre décision virevoltante, le licenciement la saison dernière de Marco Giampaolo après seulement sept journées. Ajoutez à cela l’expulsion du Milan de toutes compétitions européennes pour des résultats financiers insuffisants, le départ de Leonardo et vous obtenez un club en plein désarroi.

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Très critiqué, Ivan Gazidis le directeur général prend son mal en patience et ne lâche pas son ambition: ramener le Milan au sommet de l’Europe. Le sud-africain s’est exprimé au journal The Athletic le 23 septembre dernier sur la politique prônée par le club: « Nous perdions trop d’argent pour les salaires des joueurs et pour les frais de transfert (…) ils étaient très élevés et ne se reflétaient pas dans les performances de l’équipe (…) Notre stratégie doit désormais se reposer sur un football progressiste en misant sur les jeunes »

Peu à peu, cette direction amène de la cohérence au projet lombard. Gazidis apporte un véritable professionnalisme au sein de cette direction, épaulé par Paolo Maldini. Le premier choix fort est la confirmation de Stefano Pioli sur le banc alors que ce dernier était annoncé sur le départ pour laisser place à Rangnick. Au vu des bons résultats sportifs obtenus par Pioli, la direction décide de le prolonger. Ivan Gazidis et Paolo Maldini, dont la relation était très tendue il y a quelques mois, retroussent les manches et bâtissent petit à petit ce nouveau projet avec un recrutement judicieux. L’hiver dernier, le Milan annonce les venues de Zlatan Ibrahimovic et de Simon Kjaer. Des joueurs cadres qui ont apporté leur expérience sur le terrain. Pour le moment, le mercato estival est aussi une réussite avec des choix cohérents. Le gros coup est sans aucun doute Sandro Tonali. Le talentueux milieu italien rallie le Milan (son club de cœur) alors qu’il était à deux doigts de rejoindre l’ennemi juré. Autre coup malin, le prêt obtenu de Brahim Diaz, lui qui a même marqué lors de son premier match de Serie A contre Crotone (2-0). Cerise sur le gâteau, le bilan financier est positif (+ 20 millions d’euros) avec les nombreuses ventes d’éléments indésirables comme Suso, Rodriguez ou André Silva.

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Autre point positif, la mise en avant du centre de formation. Ces dernières années, le Milan a trop souvent laissé partir ses jeunes talents, les exemples sont nombreux : Petagna, Cristante, Cutrone, Locatelli. La donne a changé avec le quatuor Gazidis-Maldini-Massara-Pioli qui intronise cette jeunesse au centre du projet. Et ces jeunes formés au club, saisissent leur chance comme Colombo buteur lors du match contre Bodo/Glimt en Ligue Europa (3-2).

Un impact direct sur le sportif

Lorsqu’une direction travaille bien, alors le dessous de la pyramide ne peut que suivre l’exemple.
Pour mener à bien cette réussite sportive, le mérite revient en premier lieu à Stefano Pioli. Nommé en octobre 2019, ses débuts sont pourtant très délicats. Le tacticien italien dresse un bilan négatif après six matchs : trois défaites, deux nuls et une seule victoire. A la mi-saison, le Milan se retrouve 10e de Serie A.

Il est certain que pour les vœux de la nouvelle année, Stefano Pioli a eu une pensée pour son Milan. En effet, au retour de la trêve, les Lombards montrent un visage beaucoup plus conquérant. Lors du derby contre l’Inter le 9 février, le Milan s’incline 4-2, mais réalise une grosse prestation surtout en première période. Même chose quelques jours plus tard contre la Juve en Coppa (1-1). La bande à Pioli domine son adversaire, mais Ronaldo égalise dans les derniers instants. Le Milan arrive enfin à regarder ses concurrents dans les yeux. La longue pause de trois mois n’a pas ralenti les Rossoneri, bien au contraire. Le Milan enchaine les victoires et termine le championnat sur des chapeaux de roues. Post-confinement, les hommes de Pioli terminent en tête de cette Serie A et obtiennent des succès impressionnants contre la Roma (2-0), la Lazio (3-0), la Juve (4-3) ou encore Bologna (5-1).

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Des résultats positifs qui se confirment en ce début d’exercice 2020-2021. Le Milan vient de passer ses deux tours qualificatifs en Ligue Europa et affrontera pour l’ultime barrage Rio Ave ce jeudi. En championnat, les Rossoneri sont sur deux succès en deux matchs. Le match de dimanche dernier contre Crotone (2-0) est un parfait exemple de la métamorphose lombarde. La bande à Donnarumma réalise une prestation très médiocre, mais empoche les trois points. Typiquement le genre de match où ils se seraient inclinés quelques mois auparavant. Le Milan est actuellement invaincu depuis 17 matchs, ce qui n’est pas arrivé depuis mars 1996 sous Fabio Capello.

C’est justement l’aspect mental où Pioli a énormément travaillé. L’ancien tacticien de la Viola avait repris une équipe au fond du gouffre et il l’a véritablement métamorphosée. Un certain Zlatan Ibrahimovic a aussi été d’une aide précieuse sur ce point. Au-delà de l’aspect sportif où Zlatan excelle (14 buts en 16 matchs), l’attaquant suédois a apporté une rage de vaincre et une détermination qui s’est ressentie dès son arrivée.

Tactiquement, Pioli favorise un 4-2-3-1 qui fonctionne à merveille. Le Milan a une plus grosse maîtrise technique lui permettant d’être « enfin » percutant sur ses offensives. Les Milanais sont désormais capables d’avoir la possession et de transformer cette dernière en véritables occasions. De plus, de nombreux joueurs se sont relancé sous les ordres de Pioli comme Calabria, Çalhanoglu ou encore Kessie. Ce dernier est la plus grosse progression du Milan ces derniers mois. Alors qu’il était annoncé sur le départ, l’international Ivoirien a renversé la tendance. Plus jeune équipe de Serie A avec une moyenne d’âge de 25 ans, ce groupe est parfaitement huilé avec des cadres, des joueurs en pleine force de l’âge et des jeunes talents en devenir. Certes, des points sont encore à travailler, notamment la défense en bloc bas et le repli défensif, mais le Milan est sur la bonne voie.

Pour terminer, rien de mieux que les sages paroles d’Arrigo Sacchi: « Nous sommes sur le bon chemin. Il y a enfin de la cohésion et du partage avec les dirigeants (…)  J’ai toujours pensé que le club, avec son histoire, ses compétences et son style, passait avant l’équipe. Gazidis voulait engager Rangnick, un bon entraîneur, mais il aurait perdu Paolo (Maldini) et Pioli, qui ont obtenu d’excellents résultats. Il a changé d’avis, comme quelqu’un d’intelligent. »

Crédit photo: LaPresse/Icon Sport

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