Schalke 04 : y a-t-il un pilote dans l’avion ?

Septuple champion d’Allemagne et autrefois habitué à disputer la coupe aux grandes oreilles, le FC Schalke 04 est aujourd’hui un monument du football en chute libre. Lanterne rouge de la Bundesliga depuis la première journée (après une défaite inaugurale 8-0 face à l’ogre bavarois), les Königsblauen – les Bleus Royaux en allemand, sont aux portes d’une relégation en 2. Bundesliga pour ce qui serait une première depuis plus de 30 ans ! Décryptage de cette descente aux enfers qui semblait malheureusement inéluctable.

Une seule victoire en 25 journées, 10 points glanés, 16 buts marqués et 66 encaissés… Le constat est sans appel pour Schalke 04, dont l’exercice 2020-21 fait plus office de chemin de croix qu’autre chose. Il est vrai que cette saison ne s’annonçait pas franchement sous les meilleurs auspices pour les coéquipiers de Benjamin Stambouli, qui venaient d’enchaîner de janvier à juin 2020 16 matches sans la moindre victoire. Parallèlement à cette traversée du désert sur le plan sportif, en coulisses, le club de la Ruhr a dû composer cet été avec la démission surprise du président-milliardaire Clemens Tönnies ; après 19 années de bons et loyaux services.

Outre cette instabilité chronique en interne, avec la crise du Covid-19, le FC Schalke 04 a vu ses problèmes financiers s’aggraver. Aujourd’hui, le club de Gelsenkirchen accuse des dettes à hauteur de 200 millions d’euros. Les dirigeants des Königsblauen paient notamment leur gestion des cas Leon Goretzka, Joël Matip ou encore Max Meyer (pour ne citer qu’eux) ; des enfants du club qui sont TOUS partis gratuitement ces dernières années, ceci alors que leur valeur marchande était au plus haut.

Un mercato estival marqué par des erreurs de casting

Pour l’exercice 2020-21, les dirigeants avaient fait le choix de repartir avec l’entraîneur David Wagner, en dépit de la fin de saison décevante de son équipe. Face aux difficultés économiques et dans l’espoir de réussir l’opération maintien au plus vite, la direction sportive avait dû ruser cet été pour densifier l’équipe à moindre coût. Comment faire pour résoudre ce dilemme cornélien ? Miser sur des prêts, tout en libérant de la masse salariale en se séparant d’une partie de ses meilleurs éléments.

Vendu pour plus de 20 M€, le milieu Weston McKennie fait aujourd’hui les beaux jours de la Juventus. Crédit photo : Firo / Icon Sport

Exit donc les Weston McKennie, Alexander Nübel et autre Daniel Caligiuri et bienvenue à Gonçalo Paciência, Vedad Ibisevic ou encore Frederik Rönnow ; des recrues surprenantes puisqu’elles faisaient toutes offices de doublures dans leurs clubs respectifs. «Renforcé» également par les retours de prêts d’Hamza Mendyl, de Nabil Bentaleb ou encore de Ralf Fährmann, mais également par les promotions en équipe première de jeune joueurs issus du centre de formation (dont le milieu offensif allemand Can Bozdogan), le mercato estival des Königsblauen était bouclé.

La valse des entraîneurs

Miné par ces renforts minimalistes, le club a poursuivi sa décrépitude en matière de résultats. Après deux journées de championnat soldées par autant de défaites (contre le Bayern Munich 8-0 et le Werder de Brême 1-3), le destin de David Wagner était déjà scellé. Pour le remplacer, le choix s’est porté sur Manuel Baum, un coach reconnu outre-Rhin pour avoir dirigé le FC Augsbourg et les équipes nationales allemandes U20 et U18. Malgré cette décision forte, la crise de résultats a persisté. Hormis une victoire 4-1 en DFB Pokal face aux Bavarois de Schweinfurt (un club de 4e division), le bilan de Baum à la tête de Schalke 04 est famélique : 6 défaites et 4 matches nuls en Bundesliga. Il est vrai que son mandat à la tête des Knappen –mineurs en allemand- n’a pas été franchement facilité par des incidents internes.

Cela s’est notamment traduit par les mises à l’écart en novembre 2020 des milieux de terrains Amine Harit et Nabil Bentaleb, pour des problèmes de comportement ; mais également l’évincement du vétéran bosnien Vedad Ibisevic, coupable d’avoir porté des coups à Naldo, alors entraîneur-adjoint. Pour endiguer au plus vite cette spirale négative, les dirigeants du FC Schalke 04 décidèrent de faire appel une nouvelle fois au pompier de service du club en la personne du néerlandais Huub Stevens.

Stevens assurera l’intérim durant 2 rencontres ; pour une victoire contre le SSV Ulm 1846 en DFB Pokal (1-3) et une défaite en championnat face à l’Arminia Bielefeld (0-1). Malgré cette personnalité atypique dans le paysage de la Bundesliga, le signe indien n’était toujours pas vaincu. Pour briser la malédiction, le FC Schalke 04 a donc fait appel à un 4e entraîneur, en la personne du coach zurichois Christian Gross, pour ce qui semblait être la dernière carte en vue d’un hypothétique maintien. Gross a fait des choix forts en rappelant Bentaleb et Harit, pour qu’ils viennent en aide au club durant cette opération commando.

Pas loin de rentrer dans le Guinness Book de la Bundesliga

Après une entrée en matière avec une cuisante défaite face au Hertha BSC (3-0) le 2 janvier 2021, les joueurs de Gross ont sauvé l’honneur une semaine plus tard en écrasant le TSG Hoffenheim (4-0). Ce succès a permis aux Knappen de mettre fin à une série de 30 matches sans victoire en championnat, et ainsi de ne pas égaler le triste record du Tasmania Berlin qui s’élève à 31 rencontres ! Sous l’impulsion de la pépite américaine Matthew Hoppe, auteur d’un triplé ce soir-là, l’espoir renaissait quelque peu. Mais il était tué dans l’œuf le week-end suivant avec une défaite 3-1 face à l’Eintracht Francfort.

Le FC Schalke 04 a alors enchaîné les contre-performances et, pour se donner (encore) le droit d’y croire, tenta le tout pour le tout lors du mercato hivernal. Comme le dit si bien l’adage «c’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleures confitures», les Königsblauen décidèrent de faire appel à des anciennes gloires du club telles que Klaas-Jan Huntelaar et Sead Kolasinac, qui prit immédiatement le brassard de capitaine. Les défenseurs Shkodran Mustafi et William rallièrent également la Ruhr, mais force est de constater que le challenge semble insurmontable.

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Malgré ces renforts, Schalke a aligné 7 rencontres sans la moindre victoire et Christian Gross n’a pas résisté pas à cette spirale négative. Le technicien suisse fut ainsi remercié, tout comme l’intégralité de l’encadrement sportif. Gross a été remplacé début mars par le coach germano-grec Dimitrios Grammozis. Ce dernier est un habitué de la 2. Bundesliga après ses passages du côté du VFL Bochum et plus récemment du SV Darmstadt 98, et sa nomination n’est pas anodine. Elle témoigne de la résignation des dirigeants du club quant à l’éventualité d’un maintien en Bundesliga. Son objectif est donc de permettre aux Königsblauen de faire bonne figure jusqu’à la fin de saison. Plus facile à dire qu’à faire, comme en atteste la cinglante défaite 5-0 concédée le week-end dernier face aux loups de Wolfsbourg.

Qu’elle semble loin l’époque où Schalke 04 disputait les demi-finales de Ligue des champions face à Manchester United…

Crédit photo : PictureAlliance / Icon Sport

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