Comme tout le monde peut le voir, le Borussia Dortmund s’est totalement métamorphosé. Une page énorme de l’histoire du club allemand s’est tournée. Une page remplie de trophées, d’émotions, de belles soirées, sans oublier les difficultés, les défaites qui blessent. En somme, la fin d’une ère, qui s’est vraiment achevée avec le départ de Neven Subotic. Et lorsqu’un chapitre se termine, un autre s’ouvre forcément derrière. Toutefois, rien n’est jamais facile quand il faut construire quelque chose de neuf, quelque chose qui fera vibrer tout le monde à nouveau. Ce quelque chose de nouveau se fait par étapes, progressivement, avec de la patience et beaucoup de temps.
Remue-ménage et nouveau départ
Le nouveau départ du club borussen ne s’est pas vraiment fait l’année dernière, soit pendant la première saison de Thomas Tuchel, nouveau coach du club. En effet, on peut dire qu’à cette période, le jeune entraineur a récupéré une équipe et un bel effectif, avec une colonne vertébrale solide et expérimentée. Avec ces joueurs et quelques recrues qui correspondent à l’identité du club dirons-nous, tout était prêt pour prendre un nouveau départ. Mais tous les observateurs, y compris les supporters, voyaient cette saison comme une période de transition. Au diable de la transition. Le club réalise sur le papier l’une des meilleures saisons de son histoire, même si l’armoire reste vide. Et ça fait mal puisque tout était réuni pour que le club soulève un trophée. Ces défaites ont d’ailleurs précipité le départ des joueurs composants la fameuse colonne vertébrale. La désillusion à Anfield est certainement le facteur x qui a poussé Mats Hummels à rentrer à Munich par exemple.
Hans-Joachim Watzke avait promis dans l’une de ces dizaines d’interviews que le club parviendrait à conserver tous puis au moins certains de ses joueurs. Et bien rien de tout cela n’est arrivé. Gündogan, Mkhitaryan, et Hummels s’en sont allés. Et Thomas Tuchel a du mal à l’accepter comme il l’a dit à plusieurs reprises lors de rares interviews ou pendant les conférences de presse. C’est totalement compréhensible. Puisqu’en perdant ces 3 joueurs clés de son organisation, tout doit être reconstruit alors que l’on avait un produit presque parfait, un produit qui ne nécessitait que quelques améliorations. A la sortie, il faut tout recommencer, faire des choix qui ne plaisent pas toujours à tous, et repartir à la case départ.
Ce nouveau départ s’est effectué avec l’arrivée de nombreux joueurs, globalement très jeunes et désignés comme étant des cracks. Par suite, on distingue clairement que le club souhaite préparer l’avenir, avec des jeunes talents mais aussi quelques joueurs plus expérimentés. D’Ousmane Dembélé en passant par Mikel Merino et plus récemment Alexender Isak, on voit très clairement cette stratégie se dessiner. Si l’on omet ces jeunes pépites, les arrivées de Mario Götze ou Andre Schürrle sont supposées apporter de l’expérience. En définitive, le Borussia Dortmund se retrouve avec un effectif nettement rajeuni, avec des qualités mais aussi des défauts.
Six mois sont passés, et désormais, on voit très clairement que la machine a du mal à se mettre en place. Ca n’a rien de surprenant me direz-vous, puisqu’en changeant autant de choses au sein de l’effectif, il faut être patient. Mais si sur le terrain, les rouages graissent, en arrière-plan, rien n’est rose non plus. Alors, des changements oui, mais à quel prix ?
La tension monte et le brouillard s’épaissit
Vous l’aurez compris, ces changements radiaux ne se font pas sans mal. En effet, le club a vu partir des joueurs ayant écrit sa légende. Des joueurs qui avaient une identité forte qui se rattachait à celle du club, un caractère bien trempé et une dévotion inégalable. Aux antipodes de la majorité des nouvelles recrues qui sont bien plus en adéquation avec le football moderne, où les réseaux sociaux se retrouvent au premier plan, au même titre que l’individualisme qui ne passe pas forcément auprès des supporters qui avaient l’habitude de voir des joueurs jouer pour leur équipe et non pour eux. C’était le cas d’Ousmane Dembélé au début de la saison, qui avait une attitude qui ne passait pas franchement. Toutefois ça a évolué puisque ce dernier a fait des progrès notables bien que le chemin soit encore long. En somme, une grande partie du public borussen a du mal à se reconnaître dans cet effectif parmi lesquels seuls Marcel Schmelzer, Lukasz Piszczek et Roman Weidenfeller permettent de se rattacher au passé.
Cette restructuration marquant la fin d’une ère considérée comme glorieuse n’est pas la seule chose à agacer. Depuis quelques semaines, et des résultats moyens associés à des prestations déconcertantes, Thomas Tuchel semble lui aussi contrarier le milieu schwargelben. Des choix un peu étranges, et des déclarations qui suscitent des interrogations sur la situation en interne. Comme ce fut le cas lors du transfert d’Alexender Isak fin janvier. L’entraîneur a révélé qu’il n’était pas au courant de l’arrivée du jeune Suédois, et que ce n’était pas la première fois que cela se passait. Qui a tort, qui a raison ? Bonne question. Mais une chose est sûre, c’est que l’ambiance n’est pas au beau fixe entre le jeune entraineur qui a tout à prouver et les dirigeants. Il n’y a pas qu’en interne que la situation se tend puisque de nombreux supporters le soutiennent de moins en moins et au train où vont les choses, ils ne tarderont pas à demander son départ.
On peut se dire que tout cela est un peu exagéré et qu’il faut simplement être patient. Rome ne s’est pas construite en un jour comme dirait l’autre. Qui plus est, cette situation qui est en réalité une vraie période de transition, était prévisible dès le début de la saison. En perdant un homme clé en défense, qui était aussi précieux dans la construction, mais également Ilkay Gündogan, vrai régulateur et plaque tournante au milieu, ainsi que l’international arménien, créateur ô combien précieux, rien n’allait être facile. Et aujourd’hui, on s’aperçoit que remplacer ces trois-là n’est pas une mince affaire. Au milieu, seul Raphael Guerreiro peut venir en aide à Julian Weigl qui ne peut pas tout faire tout seul. En défense, les trous noirs sont nombreux et le capitaine commence à en être agacé comme il l’a déclaré suite à la rencontre contre le FSV Mainz dimanche dernier. Devant, il est difficile de créer quelque chose tant le jeu proposé est stérile parfois. Et pour l’heure, le coach allemand ne semble toujours pas avoir trouvé une solution pour régler les problèmes de jeu qui ne sont pas toujours à remettre sur le dos des joueurs.
Vous l’aurez donc compris, la situation est loin d’être idyllique, mais la crise est encore loin puisque si l’on regarde le classement rien n’est encore fichu. Et si le club donne son maximum en Ligue des champions et s’y qualifie de nouveau, qu’il réalise un parcours honorable en DFB Pokal, le drame devrait être évité. Puisque finalement, la seule manière de ramener le calme c’est la victoire et le goût du travail bien fait. Maintenant reste à savoir comment la situation va évoluer du côté de Brackel. Le brouillard va-t-il se dissiper ? Thomas Tuchel va-t-il poursuivre l’aventure avec le club ? Impossible de répondre dans le climat actuel. En revanche, la seule certitude est que patience est mère de sûreté.
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