La sempiternelle valse des saisons entraîne avec elle le retour de l’être aimé. Si rares sont les jeux de gestion à susciter une impatience si grandissante qu’elle ne désemplit en rien avec l’accumulation des années, Football Manager est de cette trempe là.
L’opus 2018 est donc disponible dans nos cartons. En guise de contextualisation, je vais vous délivrer une anecdote : Football Manager m’a coûté un ordinateur, fût un temps. Perdre 56 fois le même match – un quart de finale de Ligue des Champions avec le grand CS Sedan Ardennes – malgré ma tricherie éhontée a fini par me contraindre à envoyer un crochet du gauche à mon ordinateur qui, semble-t-il, a préféré rendre l’âme. Ça m’apprendra!
Affublé d’un léger sourire en coin, me voilà donc à l’heure des traditionnels premiers réglages.
Le premier d’entre eux est celui de la personnification du coach. Quitte à incarner un entraîneur de renom, autant pousser la logique à son extrême et lui attribuer mes propres traits. Né en 1995, de nationalité algérienne et affublé d’un costard bleu (Míchel, à jamais dans nos coeurs) du plus bel effet, l’individu est façonné. La simulation se voulant immersive, je profite de l’éditeur de visage pour insérer l’une de mes photos. Je sais désormais à quoi je ressemblerais si je passais 6 mois dans une cabine à rayons ultraviolets avec pour seule subsistance – et compagnie – des champignons hallucinogènes.
Finalement propulsé coach, deux visions se confrontent et se proposent à moi.
La première est celle du puriste, celle du monde amateur, le fameux coach vêtu d’un survêtement. C’est l’entraîneur formateur par excellence, le plus apte et à faire progresser techniquement ses joueurs, c’est une référence à peine masquée à un Marcelo Bielsa ou encore à Maurizio Sarri, supposés derniers bastions de résistance d’un football authentiquement populaire ou prolétaire.
La seconde, quant à elle, est celle du manager moderne en costume trois pièces, le meneur d’hommes, bien plus axé sur l’aspect mental du coaching et capable de fédérer un groupe autour de sa propre personne, c’est la vision anglaise actuelle du football, on peut penser à Sir Alex Ferguson mais aussi à un Laurent Blanc qui supervisait à distance l’entraînement, celui-ci étant mené par son adjoint Jean-Louis Gasset.
Pour ma part, c’est un entre-deux plus ou moins équilibré, je penche davantage pour le coach en survêtement mais s’y consacrer totalement constitue un vrai risque de Bielsa bis, c’est-à-dire un formidable formateur extrêmement limité quant aux questions de relations humaines. C’est donc un profil à la Guardiola, tacticien de génie et excellent meneur d’hommes.
La base de donnée établie, rassemblant les principaux championnats mondiaux, l’Olympique de Marseille fait l’objet de mon choix. Rentrons dans le vif du sujet. Football Manager est l’occasion de réaliser une formidable épopée qu’il est aujourd’hui assez improbable d’imaginer, Strasbourg mis à part.
C’est là que se situe le coeur du jeu. Le véritable amour du football et des belles histoires. Pour ma part, je choisis de porter haut l’étendard malheureusement bien trop humilié du club phocéen.
Pour d’autres, c’est l’occasion de bâtir une véritable histoire, débutant en 3ème division anglaise avec un Portsmouth, ex-grand club anglais déchu il y a maintenant 7 ans pour de graves problèmes financiers. L’exemple notable de l’ex MUC 72 devenu Le Mans FC suite à des problèmes d’une même nature que ceux de Portsmouth peut faire l’objet d’une carrière formidable pour plus d’un passionné.
Jacques-Henri Eyraud me souhaite la bienvenue et me donne le ton de la saison : la qualification en Ligue des Champions. Il est temps de redorer le blason marseillais! Pour y parvenir, c’est un budget misérable de 14 millions d’euros qui m’est confié. Autant prévenir les futurs coachs en herbe, Football Manager n’a évidemment pas manqué de rehausser considérablement les prix des joueurs, à la manière de l’inflation que connaît le football européen.
Patrice Evra est toujours là pour l’instant. Il me nargue, régressant à une vitesse inversement proportionnelle à sa capacité d’accélération sur un terrain. Grégory Sertic se blesse à 3 reprises et refuse toutes les propositions qui lui sont faites.
Rod Fanni et Henri Bedimo s’éclatent en réserve. Notons par ailleurs que la réserve et les U19 font l’objet d’un onglet propre et désormais situé en bas à gauche de votre écran.
C’est l’occasion pour moi de relever l’évolution que connaît le système de soins dans ce nouvel opus. Il se voit dédier un onglet personnalisé, lui aussi, et vous tiendra informé des risques de blessure de l’ensemble de vos joueurs. En conséquence, il vous permettra d’adapter l’entraînement de vos joueurs à leur forme physique du moment. Ce rapprochement, à la manière du réel, du physique et du médical permet de repousser encore l’étendue de la simulation.
Le réalisme étant poussé à son apogée, vous disposerez désormais de la possibilité de construire des infrastructures pour votre analyste de données. Ce salarié, devenu inévitable dans le football moderne, doit faire l’objet d’une attention particulière puisque le système de recrutement a lui aussi évolué.
Avec 14 millions de budget et dans un souci de réalisme – un certain Jeaaaan Claudeuh Gaudehein refusant farouchement de céder la propriété du stade Vélodrome – cette option m’est incontournable. Vous disposerez d’un budget alloué chaque année à cet effet, l’occasion pour moi de déceler des talents d’Amérique Latine encore méconnus à l’heure actuelle – les mexicains Orbelin Pineda et Javier Aquino, les brésiliens Guilherme Nunes et Linnick etc.. – et qui ne manqueront pas de vous rendre de fiers services.
La première saison est assez difficile. Adil Rami se fracture le pied, Dimitri Payet prend 40 kilos, le traditionnel club de 54ème division nous élimine dès les 16èmes de Coupe de France sur un but à la 90 ème minute de l’épaule après une bicyclette ratée de Lucas Ocampos, mais la 2nde place est accrochée. C’est un retour en Ligue des Champions idoine pour les finances du club et l’orgueil des supporters. Adrien Thomasson rejoint gratuitement nos rangs, Andréa Petagna et Geronimo Rulli aussi. L’OM est relancé. C’est le début pour moi d’une série formidable de succès.
Il n’est guère nécessaire pour moi de développer outre mesure sur le système de Football Manager, leader absolument incontestable et incontestable en matière de simulation sportive. Permettez moi simplement de conclure sur le véritable rôle que je confère à ce jeu.
Le football a passionné nos vies. Il a été le moteur de notre jeunesse et pour d’autres, comme moi, une source de souffrance à l’heure de réaliser notre échec à devenir un joueur de football professionnel. C’est aussi l’occasion de restaurer l’honneur de ces clubs que nous aimons tant mais dont le niveau s’étiole aussi vite que ne s’enchaînent les saisons. Grâce à Football Manager, c’est l’histoire que je marque avec un Olympique de Marseille enfin redevenu grand parmi les grands. Grâce à Football Manager, Lucas Ocampos m’a permis de remporter une Ligue des Champions après un quadruplé en demi-finale. C’est un bien bel baume au coeur que ce nouvel opus et il convient simplement de lui dire merci et à l’année prochaine, vieux frère.