[Interview] Limsa d’Aulnay : «Quand vous aimez le foot, il faut vraiment regarder Arsenal»

C’est un rappeur à la technique et la nonchalance qui font tout son charme. À la manière d’un Hatem Ben Arfa. Après quelques années de repos, Limsa d’Aulnay a effectué un retour retentissant en 2020. Avec un freestyle chez Grünt synonyme de mise en bouche (mars 2020), le rappeur du 93 a enchaîné avec deux mini-projets : Logique Partie 1 en juin, puis Logique Partie 2 en décembre. Au travers de ses textes, Limsa d’Aulnay évoque très souvent sa passion pour le football. Ultimo Diez en a profité pour discuter ballon rond avec lui.

Ultimo Diez – Salut Limsa, d’abord comment vas-tu ? Peux-tu te présenter aux lecteurs d’Ultimo ?

Limsa d’Aulnay – Ça va super ! Pour ceux qui ne me connaissent pas, je fais de la musique et mon nom d’artiste est Limsa d’Aulnay. Tout simplement car je m’appelle Salim et je viens d’Aulnay-sous-Bois. J’ai sorti deux projets en 2020 : Logique Partie 1 et Logique Partie 2. Et en 2021, il y aura Logique Partie 3.

Es-tu surpris des bons retours sur tes projets ?

Je suis super content et agréablement surpris. Quand j’ai envoyé le premier, c’était sans réelles ambitions. J’espérais juste que les gens trouvent ce projet bon. Sans être disque de platine, ça a quand même pris des proportions que je n’imaginais pas.

«À l’Inter Milan, il y avait Ronaldo…»

Tu es connu dans le rap pour ton excellence lors des freestyles, notamment chez Grünt. Si on te dit que tu es un peu le Ben Arfa du rap français, c’est flatteur ?

Ouais, c’est flatteur de ouf. En plus, j’adore courir sur la plage comme lui (rires). Quand j’étais petit, j’étais vraiment fasciné par ce type de joueurs. Les mecs qui étaient plus forts que les autres, mais qui ne foutaient rien. J’étais fanatique de Recoba, Guti, Riquelme. Et Ben Arfa la même chose, il est génial. Mais je ne sais pas si ça me fait autant plaisir maintenant.

Justement, d’où vient ton amour pour le ballon rond ?

C’était à la cité, on jouait toujours au foot dehors. Au début, j’étais archi guez donc j’étais toujours au goal mec (rires). Après, j’ai commencé à être pris dans les premiers. J’étais content.

Dans le morceau Le Ptit Limsa, tu dis : «Le petit Limsa, wallah il était bizarre. Il se prenait pour Riquelme, pour Recoba et Zidane alors qu’il était tout guez.» T’étais vraiment nul au foot ?

Non en vrai, j’étais pas mauvais. Les gens qui m’ont vu jouer, ils te diront que Limsa était chaud. Je dis cette phrase car je n’aurais jamais pu être professionnel. Mais sinon j’ai joué en U18 DH à Villepinte.

Tu joues toujours au football en club ou même au five ?

En club, non du tout. Je joue souvent au five oui. Mais ils sont fermés à cause du Covid, ça me manque énormément.

Sur la pochette de ton projet Logique Partie 2, tu portes le maillot de l’Inter Milan. C’est ton club de cœur ?

Je suis pour Marseille, le Real Madrid et l’Inter Milan. Ce sont mes trois clubs de cœur.

Pourquoi ces trois clubs ?

Franchement, je me suis éveillé au football vers 1997-1998. Et à cette époque-là, les trois clubs que je préférais, et qui entre guillemets étaient les plus forts, c’étaient ceux-là. À l’Inter il y avait Ronaldo, Marseille c’était l’équipe des Ravanelli et tout le bazar. Et le Real, tu connais, il y avait Raul. Cette année-là (1998), ce sont eux qui remportent la Ligue des champions contre la Juve avec un but de Mijatovic.

C’était qui l’idole du petit Limsa ?

C’est trop dur. Mais comme j’ai dit tout à l’heure : Recoba, Riquelme, Guti et Zidane évidemment. Je n’ai même plus besoin de le dire celui-là. Ces joueurs me faisaient rêver. Et R9 aussi, mais il est hors-catégorie.

«Cela doit être dur d’être supporter d’Arsenal»

Ton plus beau souvenir de ballon rond ?

Franchement, je vais en dire plusieurs pour des raisons différentes. La France championne du monde 2018, l’Algérie qui remporte la CAN (2019). J’étais trop content mec. Quand j’étais plus petit, l’Olympique de Marseille avait battu Manchester United à domicile (1999). C’était fou pour moi et l’un des premiers exploits de l’OM que j’ai connu. En vrai, ils ont juste battu Manchester (rires). Mais aussi le Barça l’année dernière qui s’est fait détruire par le Bayern en Ligue des champions (8-2). J’étais comme un dingo mec (rires), je n’y croyais pas.

Dans ton freestyle Grünt, tu dis : «Je fume une chicha devant Nice-Angers.» Ce sont seulement les mordus de football qui s’infligent ce genre de match ?

Même les matches moches, ils sont trop beaux. Il y a vraiment de la beauté dans les matches de Ligue 1. En vrai c’est dur, car Nice ce n’est pas l’équipe la plus dégueulasse à regarder jouer. Mais Nice-Angers, ça rimait trop bien avec la phrase d’avant et c’est tombé sur eux (rires).

Dans le football actuel, quelle équipe ou joueur tu apprécies ?

Il y en a beaucoup mec. Franchement ça dépend et les raisons sont différentes. J’adore regarder les matches d’Arsenal car je sais que je vais me divertir. Soit il va y avoir un but casquette, soit certains joueurs vont finir avec les mains sur les hanches. J’aime bien regarder un match où je sais qu’il va se passer quelque chose. Quand vous aimez le football, il faut vraiment regarder Arsenal. Cela doit être dur d’être supporter d’Arsenal. En ce moment, l’Inter c’est stylé aussi. Ils viennent de torturer la Juve (2-0). Barella, il est trop fort.

«Le Barça de la grande époque, je le trouvais vraiment chiant à regarder jouer»

T’es plus tiki-taka ou kick and rush ?

J’aime bien les équipes qui jouent verticales. Pas nécessairement le kick and rush, mais par exemple le Real d’Ancelotti, je kiffais. Ce n’était pas une équipe spécialement de possession,au contraire de la philosophie du Barça qui est une équipe qui fait plein de passes en largeur pour débloquer un demi-espace, etc. Ce style de jeu, ça m’énerve. Le Barça de la grande époque, je le trouvais vraiment chiant à regarder jouer. Ils avaient des séquences géniales, mais aussi de longues séquences de possession vraiment casse-couilles. J’aime quand ça joue rapidement. Les Invincibles d’Arsenal étaient trop stylés. Ce n’était pas du kick and rush, mais ils allaient vite avec des transitions rapides.

Limsa d'Aulnay : «L’Île-de-France, c’est le deuxième meilleur vivier de talents au football derrière São Paulo.»

Limsa d’Aulnay : «L’Île-de-France, c’est le deuxième meilleur vivier de talents au football derrière São Paulo.» Crédit photo : Antonin N’Kruma

Tu viens d’Aulnay-sous-Bois, qui sont les ambassadeurs de ta ville dans le football ?

Moussa Sissoko, c’est un mec des 3.000 (quartier d’Aulnay, ndlr). Il y a Adrien Gasmi qui est en Équipe de France de futsal que je connais bien, Boukary Dramé ancien latéral gauche du PSG et du Chievo. Quand j’étais plus petit, il y avait aussi Olivier Dacourt. Son neveu était dans ma classe. Il avait des stylos FFF, on était trop jaloux.

Il me semble que tu es proche de Sefyu qui aurait pu jouer à Arsenal ? Tu te rappelles de cette époque ?

J’ai commencé à rapper avec ses petits frères. Sefyu m’a même invité sur son album Yusef (sorti en 2019, ndlr). Mais je ne me rappelle pas du tout de cette période où il aurait pu signer à Arsenal. Sefyu, je l’ai vu une seule fois jouer au football. C’était à un tournoi de «rappeurs». Il l’avait organisé à la cité et il avait invité Alibi Montana. Et franchement, il était chaud. Mais Arsenal, je l’ai appris comme tout le monde lors de son interview à RMC Sport. Je ne connaissais pas du tout cette histoire.

«Le standard de niveau dans la rue, dans le 93, il est élevé»

Dans le football ou même le rap, le 93 et plus généralement l’Île-de-France est l’un des meilleurs viviers à talent au monde. C’est quoi la recette pour toi ?

L’Île-de-France, c’est le deuxième meilleur vivier de talents au football derrière São Paulo. Je pense, en tout cas dans le foot, que si tu es entouré de mecs qui sont chauds, cela te pousse à devenir plus fort. Et le standard de niveau dans la rue, dans le 93, il est élevé. Je pense que ça répond à une problématique sociétale. Beaucoup de mecs jouent au foot dehors donc le niveau augmente. Si tu es un pauvre gars, dans un village perdu en France, tu peux que jongler dans ton jardin et ne pas te confronter aux meilleurs. Mais il n’existe pas un espèce d’ange au-dessus du 93 (rires).

La Ligue des champions reprend dans un mois. Un prono ?

C’est compliqué. Il y a toujours les ogres habituels. Je vois quand même le Bayern un tout petit peu au-dessus, et moins fragile que les autres équipes. Barcelone n’est plus aussi impressionnant, la Juve et le Real pareil. Liverpool, on dirait qu’ils sont un peu descendus de leur piédestal sur lequel ils étaient depuis 2-3 saisons. Toutes les équipes, elles ont des faiblesses et les grands clubs sont un peu moins impressionnants. Cette année, il n’y a plus vraiment 3-4 équipes qui écrasent tout le monde.

S’il y avait de l’argent à mettre et si je ne parlais pas avec le cœur, je dirais le Bayern. C’est l’équipe que je vois la moins se faire éliminer. Et ça sert à rien de venir dans les commentaires et dire «Ouais regardes gros ***, je t’avais dit quoi.» (rires)

Merci à toi Limsa, on peut te souhaiter quoi pour cette année ?

Déjà, que tout continue comme ça se déroule. Pourquoi pas un petit feat avec Angèle, avec Aya Nakamura (rires). En football, inch’Allah je signe à Boca Juniors (rires). Sinon, que l’Inter et le Real soient champions, que Marseille règle ses problèmes. Que la France, l’Algérie et l’Argentine se portent bien. Et aussi que Barcelone et Lyon perdent un maximum de matches, et je me sentirai bien (rires).

Un grand merci à Limsa d’Aulnay pour la confiance accordée. Ses deux projets sont toujours disponibles sur toutes les plateformes de streaming. 

Crédit photo : Antonin N’Kruma

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