C’est (enfin) la fin de la saison en Segunda espagnole, après qu’Elche ait gagné le dernier match de playoffs et se soit qualifié pour la montée. Une excellente saison de Liga 2 avec du niveau, du suspense et qui n’a vraiment pas à rougir par rapport à sa grande sœur, la Liga.
La montée en Liga est restée disputée jusqu’au bout, avec au moins 8 clubs capables de faire partie des 3 heureux élus. Des oppositions de style, des équipes surprenantes, des rebondissements à n’en plus finir, c’était assurément une belle saison de Segunda. Certains journalistes espagnols s’accordent même à dire qu’il s’agissait d’un des meilleurs exercices que la Liga 2 ait connus.
Des joueurs de grands calibres, dévoués au futbol
Cristhian Stuani
Meilleur buteur de Girona cette saison, malheureux lors du match de montée (on y reviendra), le buteur uruguayen a inscrit 60% des buts de son équipe, soit 29 buts et 2 passes décisives. Lui qui avait décidé de rester coûte que coûte à Gérone, lorsque l’équipe catalane est descendue, est largement récompensé. À voir si son avenir se jouera toujours du côté de la Catalogne la saison prochaine, après son échec si près du but.
Pedri
Signé à la mi-saison par le FC Barcelone, le jeune milieu de terrain de 17 ans a été brillant du côté de Las Palmas, qui galère pourtant à produire du beau jeu sur l’ensemble de sa saison. Un beau bilan pour un milieu offensif de son genre : 36 matches joués en Segunda, 4 buts et 7 passes décisives, et le joueur le plus influent dans le jeu. Devant le grand Jonathan Vieira. Pedri reste sur une saison complète qui lui sert de référence pour l’avenir, lui qui va devoir se faire une place au sein du milieu de terrain barcelonais déjà bien chargé.
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Yuri
Un vieux briscard de Liga 2 avec ses 38 balais, mais il affiche un bilan incroyable quand on sait qu’il jouait dans une des pires équipes de cette saison de Segunda : Ponferradina. 32 matches en championnat, 18 buts, c’est carré. Pas le plus beau des buteurs mais redoutablement efficace, dans une équipe où chaque but était une lueur d’espoir vers le maintien (spoiler : ils sont descendus malgré tout). Désormais joueur d’un club de Segunda B, pas sûr qu’il y reste très longtemps…
Luis Suarez
À chaque division son Luis Suarez, et son mangeur d’asados. Celui-ci est colombien, prêté par Watford à Saragosse en juillet dernier. Et le peu que l’on puisse dire, c’est qu’il a cartonné. À 22 ans, il est auteur de 19 buts en 37 matches et Zaragoza ne peut plus s’en passer. Malheureusement, Suarez n’est pas à vendre et il devra même rentrer au bercail avant la fin de la saison de Liga 2 (et ses interminables matches de barrages), rappelé par le devoir anglais. Et son manque a été crucial pour le club d’Aragon, qui n’a pas réussi à monter en Liga alors qu’il faisait partie des favoris.
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Fuenlabrada, la révélation de cette saison
Grande surprise de cette saison. Fuenlabrada, petit club de la banlieue madrilène tout juste monté en Segunda, a démarré sa saison très très fort. Premier pendant un petit moment, le club a su s’appuyer sur un projet sportif solide et un collectif à toute épreuve. Si, évidemment, le budget reste limité et les tribunes du stade quelque peu bancales, Fuenlabrada a su fédérer facilement autour de lui, avec de nombreux supporters du barrio (quartier) se réunissant le soir sur le pavé orangé de la ville de banlieue.
Le club a failli se qualifier pour les barrages d’accession à la Liga (plus de détails ici), mais s’est finalement incliné lors du match joué quasiment 1 mois plus tard, contre le Deportivo. Si de premiers joueurs ont déjà quitté le club, le projet semble assez solide pour penser qu’on les retrouvera à nouveau en haut de tableau la saison prochaine. Avec, à la clé, une montée ?
Huesca, Cadiz et Elche : les nouveaux arrivants en Liga
Du côté des montées, on trouve une véritable opposition des styles entre les différentes équipes retenues pour rejoindre l’élite. Si Huesca et Cadiz se sont qualifiés très facilement, bien avant les autres équipes, pour Elche ce fut une surprise qui mit un terme au grand suspense des playoffs. Retour sur chacune des équipes.
Huesca
À Huesca, on ne va pas se mentir : à part jouer au foot, il n’y a pas grand-chose à faire. C’est sans doute pour ça que Monaco et Dortmund ont décidé d’y envoyer leurs cracks Jordi Mboula et Sergio Gomez. Et l’engagement pour le football se ressent sur le terrain.
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Huesca était une des plus équipes espagnoles à voir jouer cette saison. Un jeu qui, sur ses plus belles phases, fait penser au (vrai )Barça. Un jeu de passes, de combinaisons toujours vers l’avant avec un bon pressing collectif. Aussi une équipe très bien organisée, composée de jeunes talents et de vieux briscards qui guident les plus petits sur le terrain et les font progresser. Huesca a remporté la Segunda alors que le club a longtemps été dans les places de barragistes de playoffs. Symbole de la montée en puissance d’une équipe riche de Pedro Lopez, ancien joueur de Valence, Shinji Okazaki, ancien joueur de Leicester et champion d’Angleterre, et Rafa Mir, le jeune crack espagnol prêté par les Wolves.
La montée du club vient récompenser un bon travail sportif, avec de bonnes saisons de joueurs formés au club, d’un plan de jeu ambitieux pour une montée réputée difficile en Liga. À la tête de l’équipe : Michel, l’ancienne légende du Rayo, qui fait monter Huesca en Liga après avoir échoué avec son club de coeur.
Cadiz
Cadiz est la deuxième équipe à se qualifier d’office pour la montée, et ce sans trop de difficultés après avoir longtemps été leader. La logique est respectée et Cadiz fait son grand retour en Liga, 14 ans après avoir été relégué loin de l’enfer D3 espagnole, vécu entre 2008 et 2016.
Cadiz est une équipe, un collectif qui se serre les coudes en toutes circonstances. À l’image de ses supporters, assidus malgré les tristes nouvelles des dernières saisons, mais qui feraient n’importe quoi pour encourager le sous-marin jaune andalou. Le jeu de Cadiz, assez physique, direct et jouant sur les erreurs de ses adversaires en contre-attaque, lui a parfois été reproché. Dans une Espagne amatrice du beau jeu, cette équipe a du mal à avoir les éloges qu’elle mérite, alors qu’au niveau spectacle global, c’est une des plus belles équipes à voir.
On lui trouve néanmoins de beaux joueurs tels qu’Alex, meilleur buteur du club avec 13 réalisations et formé au Real, Fali et Alberto Perea, anciens joueurs du Barça B et qui se retrouvent aujourd’hui en Liga. C’est même trois anciens Blaugranas qui quittent la Liga 2, puisque Choco Lozano était prêté par Girona à Cadiz, et son option d’achat automatique a été levée.
Cadiz va continuer la montée en puissance de l’Andalousie dans l’arrivée en Liga, avec des supporters remontés à bloc et qui n’ont pas pu fêter la montée, contexte sanitaire oblige. Ils piaffent d’impatience à l’idée de rejoindre les tribunes de Ramon de Carranza (un nom qui fait débat, mais c’est une autre histoire).
Elche
La dernière équipe à monter en Liga, après une fin de saison compliquée et une montée in-extremis « grâce » au Covid-19. Victorieux des très longs barrages de Segunda à l’issue de deux matches quasi-stériles contre Girona (0-0, 0-1), Elche se qualifie sur un but de Pere Milla à la… 96e minute.
À l’issue du championnat, Elche est 6e et se qualifie donc pour les playoffs, en prenant la dernière place disponible. Et cela en partie grâce au Covid-19, puisque Fuenlabrada, son adversaire direct, ne joue pas son dernier match suite à une forte contamination de l’équipe (plus de détails ici). Après une très longue bataille sur qui mérite quelle place, Elche s’est vu attribué ce dernier ticket. Au final, le club remonte en Liga 5 ans après l’avoir quittée sur une relégation administrative, et sera la 4e équipe de la communauté de Valence dans l’élite, avec Valence, Levante et Villarreal.
Côté jeu à Elche, ce n’est pas football total ou tiki-taka. C’est plutôt actions poussives, vices et centres-têtes du jeu vidéo FIFA. Peu de tirs cadrés, mais un football efficace. Du côté de l’effectif, on ne retrouve pas de noms connus. Le jeu collectif et solidaire prédomine. On note quand même les belles performances de Calvo en défense, Juan Cruz au milieu et Fidel, le meilleur buteur du club avec 9 buts.
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Une remontée express en Liga, après avoir connu la D3 en 2017-18 : on ne peut que se réjouir pour cette équipe, son projet et de nouveaux investisseurs qui ont… évincé Pacheta, le coach qui les a pourtant amenés de la D3 à la D1. Terriblement déçu d’être mis à la porte ainsi, Pacheta a tenu à remercier ses joueurs, son staff (« des putains de crack ») et les supporters, « les seuls à savoir ce que nous avons vécu ». L’Argentin Jorge Almiron lui succède pour la saison prochaine en n’ayant jamais entraîné en Europe. Affaire à suivre…
C’est donc la fin pour cette saison de Liga 2 qui aura duré une éternité, ayant débuté le 17 août 2019 pour s’achever ce match entre Gérone et Elche le 23 août 2020, soir de la finale de Ligue des champions. Une saison qui aura régalé les amateurs de beau football, mais aussi épuisé joueurs, staffs et directions avec la difficile reprise post-Covid.
Crédit photo : Pressinphoto/Icon Sport