[Ligue 1] Bruno Génésio : le doute légitime

Mardi, Jean-Michel Aulas annoncera s’il prolonge ou non Bruno Génésio au poste d’entraîneur de l’Olympique lyonnais. Malgré le désaveu d’une partie des supporters, une prolongation est dans les tuyaux. Pourtant, après plusieurs saisons à la tête de l’équipe, le coach de l’OL semble avoir atteint ses limites.

«Je sais déjà ce que mon président vous dira». Bruno Génésio l’a assuré vendredi dernier après la victoire de l’Olympique lyonnais 0-1 face au Stade rennais : il connait de quoi son avenir sera fait. Jean-Michel Aulas doit rendre sa décision mardi, à l’issue de la demi-finale de Coupe de France face à cette même équipe de Rennes. Un secret de polichinelle selon le journal L’Équipe. Samedi dernier, le quotidien sportif affirmait que, sauf catastrophe sportive, le coach des Gones devrait prolonger pour deux saisons.

Cette prolongation, si elle se confirme, ne manquera pas de faire grincer des dents sur les bords du Rhône. À Lyon, nombreux sont les supporters à souhaiter le départ de l’entraîneur à la tête de l’équipe depuis presque quatre ans. Car malgré des résultats honorables, la question de sa capacité à faire passer un cap au club se pose. Parfois extraordinaire, souvent inconstant, mais toujours dans les clous fixés par son président, difficile de cerner le niveau du coach Génésio. Les raisons de sa probable prolongation restent, à bien des égards, un mystère. Pas une absurdité non plus comme on peut l’entendre ici ou là. Mais un point d’interrogation, cela est certain.

Gone pur-sang

Une chose est certaine : il demeure l’homme d’un club. Né à Lyon, Bruno Génésio est un Gone pur-sang et l’OL est pour lui une seconde maison. En tant que joueur, il y évolue durant la quasi-intégralité de sa carrière. À partir de 2005, il grimpe les différents échelons au sein du staff lyonnais jusqu’à devenir entraîneur de l’équipe première en décembre 2015. Garder Bruno Génésio, c’est l’assurance pour Jean-Michel Aulas de laisser les clés du camion à une personne de confiance, qui connait parfaitement les rouages du club. C’est aussi la garantie d’une vie de groupe au beau fixe. Apprécié des joueurs et bon formateur, l’homme de 52 ans fait l’unanimité au sein du vestiaire comme auprès de ses dirigeants. De quoi assurer une précieuse atmosphère de stabilité et de sérénité.

Son bilan sportif plaide aussi pour lui. Quoi qu’on en dise, Bruno Génésio a cette capacité à remplir, même à l’arrachée, les objectifs fixés par son président. Seule ombre au tableau, une saison 2016-2017 ratée. L’OL termine quatrième à 11 points de Nice, troisième, et rate la qualification pour la Ligue des Champions. Pour le reste, les résultats sont conformes aux exigences du club. Cette année encore, Lyon reste en course pour accrocher une deuxième place en championnat et a atteint les huitièmes de finales de Ligue des Champions. Toujours en lice en Coupe de France, le club pourrait même s’offrir un premier titre depuis 2012 s’il parvient à aller au bout de cette aventure.

Colère des supporters

Pourtant, son maintien à la tête de l’équipe pose question. Cette éventualité déchaîne les passions chez les groupes de supporters. Certains, comme les très influents Bad Gones vont même jusqu’à réclamer le départ de l’entraîneur. Le 20 mars dernier, le groupe prenait position publiquement sur cette question et écrivait sur sa page Facebook : «Nous estimons, comme nous l’avons déjà affirmé la saison passée, que seul le départ de Bruno Génésio pourra permettre un climat plus serein autour du club.» Face à la pression des supporters, le président Aulas refuse de céder. «Ce ne sont pas les supporters qui décident de la gouvernance des clubs» avait-il sèchement rétorqué. Ambiance…

Les raisons de la colère sont pourtant légitimes. Plus qu’un bilan acceptable, c’est une forme d’inconstance qui caractérise le mieux l’ère Génésio. Certes, l’OL ne laisse personne indifférent. Capable de se sublimer lors des grands rendez-vous, le club peut se targuer d’aligner Manchester City et le PSG à son tableau de chasse. D’authentiques exploits vecteurs d’incroyables émotions, et qui tournent en dérision son ironique surnom de «Pep Génésio» par la même occasion. Mais l’OL c’est aussi huit matchs nuls et six défaites en championnat. C’est également deux matchs nuls face à Hoffenheim concédés dans le temps additionnel en phase de poules de Ligue des Champions.

Le règne de l’inconstance

Ces résultats en dents de scie relèguent le club à 24 points du Paris Saint-Germain. Ils contraignent l’OL à lutter jusqu’au bout pour s’assurer une deuxième place dont il devrait être le pensionnaire incontesté. Ils empêchent l’équipe d’espérer concurrencer un jour le PSG, à l’image de ce qu’a réalisé l’AS Monaco il y a deux ans. On comprend mieux la frustration des supporters pour qui les exploits retentissants ne font pas tout dans une saison. Cela fait presque quatre ans que Bruno Génésio et ses hommes soufflent le chaud et le froid et un besoin de régularité est né chez les fans : l’envie de voir cette équipe tenir son rang en toutes circonstances. La conviction aussi qu’elle peut encore progresser et que retomber, bon an mal an, sur ses pattes ne suffit plus quand on s’appelle Olympique lyonnais.

D’où cette question fondamentale : Bruno Génésio peut-il faire passer un cap à cette équipe ? Au bout de presque quatre saisons, rien ne nous l’assure. Le coach de l’OL ne mérite certainement pas les critiques incessantes et parfois violentes dont il fait l’objet. Qu’il soit un bon entraîneur, cela ne fait même aucun doute. Mais n’aurait-il pas atteint un certain plafond de verre avec cette équipe ? À bien des égards, il ne semble pas capable de faire mieux que ce qu’il fait déjà. La question mérite en tout cas d’être posée et bien malin est celui capable d’y répondre aujourd’hui. Le mystère Génésio reste donc entier.

Ambitions et frustration

En attendant, la frustration des groupes de supporters ne fait que s’amplifier. Une frustration d’autant plus compréhensible compte tenu du standing de l’Olympique lyonnais. Nous parlons tout de même d’un club avec 285 millions d’euros de budget. C’est déjà trois fois plus que Lille, cinquième budget de Ligue 1. Au regard de ses moyens et de son effectif, l’OL peut légitimement être considéré comme faisant partie des vingt meilleurs clubs du continent. N’oublions pas non plus que le nouveau stade est livré depuis maintenant trois ans. La cure d’austérité est terminée et l’OL peut nourrir des ambitions légitimes. Et personne ne sait si Bruno Génésio est à la hauteur de celles-ci.

Jean-Michel Aulas rendra donc sa décision mardi. Le timing lui aussi pose question. Demain soir, les objectifs de l’OL cette saison ne seront pas tous remplis, même en cas de victoire contre Rennes synonyme de qualification. Le président devra donc soigner sa communication pour justifier son choix auprès des supporters. L’exercice pédagogique s’annonce aussi indispensable que délicat. En attendant que les résultats remplissent définitivement leur rôle de juge de paix.

Crédit photo : JOSE BRETON / NurPhoto

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