[Copa America] Messi, l’Argentine et la malédiction

L’Argentine débute aujourd’hui sa Copa America face à la Colombie. Parti il y a quelques mois, Lionel Messi a décidé de réintégrer la sélection pour disputer cette campagne brésilienne. Avec en tête un objectif : briser la malédiction pour enfin remporter un titre avec l’Albiceleste.

Un choc pour commencer. Ce soir à l’Itaipava Arena Fonte Nova de Salvador au Brésil, l’Argentine affronte la redoutable Colombie de James Rodriguez et Radamel Falcao pour son premier match de Copa America. Une entrée en matière loin d’être aisée pour Lionel Messi et ses coéquipiers. À 31 ans le génie argentin court toujours après un premier titre majeur avec sa sélection nationale. Probablement l’une de ses dernières occasions (si ce n’est la dernière) de gagner avec le maillot ciel et blanc. Et d’écrire le seul chapitre manquant de son incroyable carrière.

Maudites finales

Jusqu’à maintenant, l’histoire d’amour entre la star du FC Barcelone et sa sélection laisse un goût d’inachevé. Un vide même, car si l’on excepte le titre olympique de 2008, il n’est pas parvenu à garnir l’armoire à trophées de l’Albiceleste. Ce n’est pourtant pas faute d’avoir essayé. Leo Messi reste sur quatre finales perdues avec l’Argentine. Une véritable malédiction. Il y eu la défaite face à l’Allemagne lors du Mondial 2014. Mais aussi les deux échecs aux tirs au but face au Chili lors des Copa America 2015 et 2016, en plus de celle perdue 3-0 face au voisin brésilien en 2007. La désillusion de 2016 a bien failli avoir raison de l’aventure entre Messi et l’équipe nationale. Meurtri, il décide de dire stop, avant de revenir, cédant aux sirènes de la Coupe du Monde 2018. Bis repetita en juin 2018, au lendemain de la défaite contre les Bleus en Russie. Leo met sa carrière internationale entre parenthèses puis revient finalement début 2019, pour mener son équipe au Brésil.

Certes, remporter la Copa America ne remplacera jamais une victoire en Coupe du Monde. Les deux titres sont incomparables et c’est bien avec l’or mondial que se forgent les plus belles légendes de la planète football. Mais on aurait tort de minimiser un éventuel succès continental des hommes de Scaloni. 14 fois championne d’Amérique (soit une fois de moins que l’Uruguay, recordman de l’épreuve), l’Argentine n’est plus montée sur le toit du continent depuis 1993. Une éternité. Un premier titre depuis 26 ans dans la compétition, en terre brésilienne qui plus est, ne représenterait pas rien dans ce pays où le football est roi. Messi le sait. Nul doute qu’il rêve encore de remettre l’Argentine tout en haut de l’affiche. Et enfin conjurer la malédiction.

« Nous voulons un titre »

Bien sûr, l’enjeu est aussi individuel pour la star du FC Barcelone. Dix Ligas, quatre Ligues des Champions, cinq Ballons d’Or et encore bien d’autres : Messi a tout gagné. Tout, sauf un titre majeur avec l’Albiceleste. Une anomalie au regard de son importance au sein de la sélection. Une cruelle réalité qui l’attriste aussi, si l’on en croit les propos de son coéquipier en équipe nationale Sergio Agüero. Interrogé par Fox News début juin, El Kun a confié: «Je veux gagner la Copa America plus pour Messi que pour moi-même.» Et d’ajouter à propos de son capitaine: «Cela fait longtemps qu’il ne gagne rien avec nous et il en souffre.» Remporter la Copa America donc, pour écrire en lettres d’or une nouvelle page de sa légende. Et rentrer un peu dans le cœur des supporters au pays d’El Pibe de Oro, Diego Maradona.

La Pulga ne manque pas d’ambition. «Cela fait longtemps que l’Argentine ne gagne pas et nous voulons célébrer de nouveau. Nous voulons un titre», a-t-il insisté sur la chaine argentine TyC Sports le 5 juin dernier. L’envie de Leo Messi est d’autant plus forte qu’il s’agit peut-être de sa dernière compétition avec l’Albiceleste. Le joueur laisse planer le doute sur sa participation au Mondial 2022, organisée par le Qatar. Il sera alors âgé de 35 ans.  «Je veux terminer ma carrière en gagnant quelque chose avec ma sélection, ou du moins essayer autant de fois que possible. Je ne sais pas si je serai au Mondial 2022», a-t-il déclaré sur la chaine Fox Sports. Cette année, il peut toujours compter sur une équipe à 100% derrière lui. Et comme d’habitude, l’Argentine s’engage dans la compétition dans la peau d’un favori à la victoire finale. Elle reste sur une dynamique positive après sa victoire 5-1 face au Nicaragua. Leo Messi a marqué un doublé.

Reconstruction et incertitudes

La mission du gamin de Rosario s’annonce pourtant bien compliquée. La sélection argentine n’offre aucune garantie quant à son niveau de jeu face aux meilleures formations du continent. L’équipe a même entamé une phase de reconstruction depuis son échec en huitième de finale de Coupe du Monde. Des 23 joueurs présents en Russie, seuls neuf ont été retenus par Lionel Scaloni pour participer à la campagne brésilienne. Et si l’attaque peut compter sur ses stars pour faire la différence, certaines lacunes aperçues l’été dernier ne semblent pas avoir été comblées. La défense et l’entrejeu par exemple, restent de véritables chantiers à ciel ouvert. Surtout, l’omnipotence de Lionel Messi ne constitue peut-être pas la solution aux maux de l’Argentine. Lui avoir laissé les clés du camion lors du Mondial russe, au point qu’il apparaisse presque parfois comme le vrai manager de cette équipe, n’a pas empêché un nouvel échec.

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Si le match contre la Colombie est important pour emmagasiner de la confiance, son résultat ne sera pas nécessairement déterminant. Le tirage au sort est fait de telle sorte que, paradoxalement, l’Argentine ne rencontrera pas forcément un adversaire plus fort en quart de finale si elle termine deuxième du groupe B. Finir premier aurait pour conséquence un choc dès les quarts de finale, contre le deuxième du groupe C, soit, en toute logique, l’Uruguay ou le Chili. Une deuxième place serait, elle, certainement synonyme de match contre le Pérou ou, pourquoi pas, le Venezuela. Mais Leo Messi n’a plus le temps de se risquer à ces calculs d’apothicaire. Maillot ciel et blanc sur le dos, le génie argentin n’a plus qu’un seul objectif en tête : gagner. Et ramener, enfin, à son pays natal, un titre tant attendu.

Photo crédits : Jose Breton / NurPhoto

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