Pedri, prince héritier de Barcelone

À quelques jours de l’épisode IV de la série Barcelone-PSG format Ligue des champions, Barcelonais et Parisiens retiennent leur souffle pour ce choc tant attendu. Si la rencontre entre ces deux cadors est l’occasion de voir nos stars habituelles briller, ce sera aussi le moment pour un jeune talent de se montrer sur la scène continentale. Du haut de ses dix-huit ans, Pedri impressionne la Catalogne et l’Espagne depuis le début de saison. Portrait d’un gamin prodige.

Des Îles Canaries au Camp Nou

Pedro Gonzalez Lopez de son nom complet, c’est l’histoire d’un enfant né dans la petite ville de Tegueste sur les Îles Canaries et refusé par le Real Madrid car il n’avait pas le niveau. L’histoire aurait pu s’arrêter là, mais le jeune espagnol rejoint rapidement à 16 ans le gros club de l’île, l’UD Las Palmas. Passant quelques rencontres avec la réserve, Pedri monte dès l’été 2019 dans l’équipe première des Pío-pío. Pourtant, c’est avec seulement trois petits matches de Segunda que le jeune crack est vendu au FC Barcelone en fin d’été 2019. Pourquoi ? Car Las Palmas, en grosse difficulté économique, est dans l’obligation de trouver des liquidités, et doit donc vendre ses pépites du centre de formation. La Union Deportiva tire 6M€ (plus 16M€ de bonus) de la vente de Pedri et surtout le droit de garder son espoir un an de plus en prêt.

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Et c’est à Las Palmas que le jeune crack va se construire une petite renommée. Sans être impressionnant dans les chiffres (4 buts – 6 passes décisives), il devient rapidement le joueur indispensable du onze. Tantôt attaquant gauche, tantôt milieu offensif, on retrouve un homme qui influence le jeu de son équipe en donnant une véritable impulsion au collectif canari. Avec Jonathan Viera, l’autre homme fort de l’équipe, il forme le duo gagnant faisant avancer Las Palmas.

Pepe Mel, son ancien coach canarien, ne cesse de le complimenter : «Pedri est un pur talent […] Il a la qualité de rendre plus facile les choses autour de lui et de voir le jeu mal où les autres ne le voient pas.» Cependant, malgré cette locomotive Pedri-Viera et un bon effectif de Segunda, Las Palmas ne réalise pas une grande saison, loin de là. Le club termine neuvième, distancé dans la course aux play-offs pour accéder en Liga.

Le premier but de Pedri en Ligue des champions

Un air d’Iniesta

C’est donc avec une bonne saison en seconde division dans les pattes que Pedri plonge dans le grand bain de la Liga avec le Barça . Directement, le numéro 16 arrive à se faire une place au sein de l’équipe catalane. Sur le banc lors des premières rencontres, Pedri va rapidement acquérir la confiance de Ronald Koeman, qui va rapidement en faire un titulaire presque indiscutable, dès le mois d’octobre. Confronté aux regards des observateurs européens, le petit brun impressionne, et dégage l’allure d’un ancien numéro 8 de la maison blaugrana, un certain Andrès Iniesta.

Même ses anciens coaches s’accordent à le dire. Pepe Mel voit en lui les mêmes qualités que Don Andrès, tandis que Ruben Delgado, son ancien entraîneur chez les jeunes, déclarait pour le site The Athletic : «Quand Pedri avait neuf ans, il m’a rappelé Iniesta. Je dis toujours que la première fois que je l’ai vu, je savais qu’il avait quelque chose de spécial […] sa façon de jouer, tout est très simple.» Une simplicité si spéciale, voilà l’oxymore parfait pour résumer le joueur qu’est Pedri.

Effectivement, on observe chez lui un jeu épuré, d’une légèreté déconcertante, toujours en deux ou trois touches de balle maximum. Avec des appuis petits et un centre de gravité relativement bas, on retrouve un joueur qui aurait pu sortir tout droit de la Masia. Ses aptitudes en témoignent : contrôles qui collent au pied, prises de balle de trois-quarts pour se mettre rapidement dans le sens du jeu, demi-tour sur lui-même pour se sortir du pressing, crochets courts pour se libérer de l’espace…

Une fois le jeu face à lui, l’espoir espagnol fait parler son excellente qualité de passe. Là encore, on a l’impression de voir Xavi ou Iniesta resurgir de l’écran. Outre sa précision et une bonne alternance entre jeu long et court, sa faculté de claquer plusieurs fois dans le match une passe qui fait mal -dans le bon timing et dans la bonne zone – demeure impressionnante.

Avec ses 60kg et son physique svelte, à l’instar d’un Phil Foden à Manchester City, Pedri remet l’intelligence et l’élégance sous le feu des projecteurs à une époque où les jeunes joueurs sont plus admirés par leurs forces physiques que leur impact sur le jeu. Loin d’avoir des statistiques clinquantes ou des highlights de dix minutes de passements de jambes, Pedri brille par une compréhension du jeu largement au-dessus de la moyenne.

Son temps d’avance par rapport aux autres et sa capacité à se rendre disponible dans les espaces lui permettent de passer ses adversaires tout en évitant le duel. Encore une preuve que physique imposant et réussite ne sont pas automatiquement corrélés : tout se passe dans les pieds et dans la tête.

Chouchou de Koeman

Avec ce descriptif, Pedri aurait facilement pu s’intégrer dans le Barca de Guardiola, dans le cadre d’un jeu de position léché. Cependant, l’époque du grand Barca est révolue. Mais la pépite s’insère parfaitement dans le Barcelone couleur Koeman et en devient, comme à Las Palmas, une pièce essentielle. Les complications que rencontrent les Catalans sans lui peuvent attester en sa faveur.

Aligné comme milieu gauche sur la feuille de match, ces derniers temps son positionnement relève plus d’un troisième milieu en tant que relayeur gauche. Avec sa simplicité, Pedri devient véritablement le catalyseur du système Koeman. Il est avec De Jong et Messi l’une des pierres angulaires de l’équipe. En effet, ses qualités offrent plusieurs avantages aux Blaugranas.

D’abord, grâce à ses facilités techniques, on voit apparaître une relation naturelle entre Messi et lui. Leur aisance à combiner dans les très petits espaces apporte un vrai danger aux abords de la surface adverse. Pedri permet de soulager, en partie, le rôle «d’homme à tout faire» que portait la Pulga ces dernières années mais aussi de compléter le profil plus «box-to-box» de Frenkie de Jong. Ensuite, contrairement à un Philippe Coutinho constamment dans la recherche de l’explosivité, Pedri arrive à jouer en rythme avec ses coéquipiers.

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Résister au pressing en gardant un petit peu la balle, ou jouer rapidement vers l’avant, le droitier espagnol jongle admirablement entre ces deux tempos. Enfin, son imprévisibilité donne une dimension supérieure à l’équipe, à qui on a reproché d’être parfois trop stéréotypée en début de saison.

Si Pedri est loin d’être un produit fini puisqu’il possède encore plusieurs axes de progressions notamment dans le choix du dernier geste, il est avec Ansu Fati et Frenkie De Jong, le symbole de ce Barcelone en pleine reconstruction. Un gamin jeune, bourré de talent et qui redonne envie de se poser 90 minutes devant les Blaugranas.

Crédit photo : Icon Sport.

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