Paris, Munich. Munich, Paris. Deux vieilles dames majestueuses, opulentes, scintillantes. Le monde entier les envie, les observe avec une certaine jalousie teintée d’une pointe de désir. De la Marienplatz aux Champs Elysées il n’y a qu’un pas. Tous deux sont symboles de cette richesse débordante qui n’en finit plus de s’accroître, les touristes se pressent, s’émerveillent, et s’agglutinent pour ne rien louper. Chacun veut sa Tour Eiffel miniature ou sa petite figurine portant l’habit bavarois. Au milieu de cet amoncellement de souvenirs, des maillots de football se distinguent, le Paris Saint-Germain pour l’un, le Bayern Munich pour l’autre. Et là non plus on ne résiste pas à la tentation, tout se vend comme des petits pains, tant l’image de ces deux clubs est imposante dans nos sociétés modernes. Et ce même si l’un d’eux est parfois pointé du doigt et qualifié de « nouveau riche », ça ne l’empêche pourtant pas de briller.
Argent « content »
Sur la planète football, le PSG comme le Bayern Munich représentent des titans au niveau financier comme marketing. Bien que le second soit un cran au dessus, de par son passé et un plus grand nombre d’années passées au-devant de la scène, les deux clubs restent bien plus imposants qu’une vaste majorité. Toutefois, cet été, le club parisien a décidé de montrer les crocs, de montrer que lui aussi pouvait chambouler l’ordre établi, en s’attachant les services de Neymar.
Avec un plan globalement parfaitement échafaudé, la clause de 220 millions d’euros fixée par le FC Barcelone a été levée, faisant du Brésilien le joueur le plus cher de l’histoire. Sur le plan sportif comme marketing c’est un coup de maître. Avec ce transfert, le PSG a encore davantage attiré les lumières sur la capitale. Pour le joueur, cela représente concrètement un nouveau challenge : en quittant un club où il a tout gagné, où il était l’une des trois stars d’un trio offensif hors norme, il rejoint un club où il sera la pierre angulaire du projet. Il est arrivé dans un club où tout peut encore être gagné au niveau continental, ce qui n’est pas négligeable. Plus tard dans l’été, c’est Kylian Mbappé qui a été ajouté à cet effectif. Du haut de ses 18 ans, il représente l’avenir. Un peu comme l’ex barcelonais à vrai dire.
Cependant, ils ne sont pas les deux seuls joueurs à composer cette armada offensive. On trouve également Julian Draxler ou encore Edinson Cavani, qui sont loin de déteindre à leurs côtés. Ce quatuor a déjà fait des ravages en championnat comme en Ligues de champions, et il effraye la concurrence qui n’apprécie toujours pas que le PSG ait dépensé autant en un été.
C’est d’ailleurs le cas du Bayern Munich. Les dirigeants sont montés au créneau pour demander sur le champ une enquête aux instances du football. Mais le club munichois, et surtout Uli Hoeness qui a été le plus virulent, sont-ils bien placés pour s’insurger contre le club parisien ? Pas vraiment, surtout l’actuel président compte tenu de son passif… Donner des leçons quand on a soi-même été condamné pour fraude fiscale n’est pas franchement judicieux, même quand on a payé sa dette.
Qui plus est, le Bayern Munich se permet aussi d’user de prêt avec option d’achat (pour James Rodriguez par exemple), afin de limiter ses dépenses après avoir déjà versé une grosse somme comme ce fut le cas pour Corentin Tolisso. Bien que la somme du transfert ne soit pas comparable, le geste reste similaire dans l’exécution. Le Bayern accepte également des soutiens financiers en provenance du Qatar en signant notamment un contract avec l’aéroport de Doha dont le nom est présent sur le maillot des joueurs. Cela permet au club de recevoir approximativement sept millions d’euros. Ce qui rend encore un peu plus fragiles leur critiques puisqu’eux aussi profitent bien de tout ce que l’Etat a à offrir.
Finalement, les -très- grands européens, dont font partie le Bayern Munich s’exaspèrent des agissements de ce nouveau riche mais ne sont pas pour autant blancs comme neige.
La gueule de bois du titan bavarois
A quelques heures de la rencontre de phase de groupe de Ligue des champions, les différends qui sont apparus au cours des dernières semaines vont surement resurgir. Mais cette fois, seul l’aspect sportif va comper. Et à ce jeu-là, les Munichois peuvent difficilement se pavaner. D’apparence, si on ne regarde que les résultats, ils sont loin d’être dans la panade. En interne et sur le terrain c’est autre chose.
Comme l’an dernier, le Rekordmeister étale ses problèmes sur la place publique. Robert Lewandowski a été le premier à tirer à vue en indiquant que le club avait un problème en privilégiant les tournés en Asie ou en Amérique plutôt que de se concentrer sur les fans munichois. S’il juge ces tournées épuisantes et peu utiles, l’avant-centre a aussi fustigé le recrutement du Bayern Munich qu’il ne juge pas suffisant. Ce à quoi Uli Hoeness a répondu que si Robert faisait son travail correctement, tout se passerait mieux. Les coéquipiers du Polonais tout comme Karl-Heinz Rummenigge l’ont aussi critiqué pour ses déclarations.
En outre, ce n’est pas l’amour fou au sein du vestiaire bavaroisCertains joueurs ont montré plus ou moins ouvertement qu’ils n’étaient pas franchement convaincus par Carlo Ancelotti. C’est le cas, par exemple, de Franck Ribéry qui n’en finit de plus de faire des gestes d’humeur à chaque fois que son coach décide de le sortir. Suite au match nul concédé contre Wolfsburg ce weekend, Mats Hummels y est aussi allé de son commentaire après que son équipe a lâché prise alors qu’elle menait 2-0. A la fin de la rencontre, il a indirectement critiqué son coach « On voulait presser, presser, presser, mais tactiquement nous n’avons pas été préparés pour ça« . Thomas Müller, qui n’a pas la garantie d’être toujours titulaire, n’est pas non plus son plus grand fan. Et d’ailleurs il se murmure qu’il pourrait même envisager un départ. Que cette rumeur soit vraie ou non, cela en dit long sur l’ambiance actuelle. Le groupe semble globalement divisé, à voir si cela aura un impact sur la saison dans sa totalité.
Au niveau du jeu, personne n’est convaincu par ce qui est demandé par l’Italien, et on est encore très loin de ce qui est attendu. Poussif, parfois peu inspiré, il est difficile d’apprécier ce qui est proposé. Les situations sont souvent débloquées grâce à un coup de génie. Et cette illumination arrive souvent par l’intermédiaire d’Arjen Robben qui reste vital, tout comme Ribery. L’équipe est toujours très dépendante des deux trentenaires qui ne trouvent pas franchement de successeurs. Bien que remplacer des joueurs de ce calibre ne soit pas une tâche aisée, ce n’est pas non plus impossible, surtout lorsque l’on a les moyens du Bayern. Finalement, quand ils ne sont pas sur le terrain, ça se voit, et c’est assez problématique.
Ce n’est pas le seul problème. On peut par exemple citer Manuel Neuer qui s’est encore blessé au pied gauche, Rafinha qui a des problèmes musculaires, tout comme David Alaba. Ce dernier a d’ailleurs toujours du mal à revenir à son meilleur niveau, à l’instar de Boateng qui depuis sa longue blessure n’a toujours pas retrouvé sa place. Ceci dit les bonnes performances de Niklas Süle et Javi Martinez ne lui sont pas d’un pas d’un grand secours. Ainsi la charnière centrale de la Mannschaft gagnante de la Coupe du monde reste pour le moment sur la touche. Du côté des latéraux c’est également la pagaille, et le seul a vraiment faire ses preuves c’est Joshua Kimmich qui n’en finit plus d’impressionner.
Si l’on compare la forme actuelle des deux équipes, il est donc plus ou moins clair que les Parisiens possèdent un certain avantage. Sur la forme du moment tout du moins, car encore une fois ce qui est vrai aujourd’hui ne le sera pas forcément demain. Ceci dit la rencontre de ce soir, qui sera la première depuis la saison 2000-2001, pourrait bien mettre à nu les difficultés actuelles du Bayern Munich. Les deux formations ont montré un visage radicalement différent contre, respectivement, le Celtic Glasgow et Anderlecht. Si les bavarois rééditent la même performance, il se pourrait qu’ils soient bien plus mis en danger.
Mais finalement, c’est peut-être ce dont ils ont besoin – au moins sur le terrain : une claque pour se réveiller, se remettre dans le droit chemin avant que le printemps ne pointe le bout de son nez. Car la crise larvée qui secoue actuellement le Bayern Munich ne se règlera pas en une soirée.
Carlo Ancelotti, qui fera son retour au Parc des princes, n’aura pas d’autre choix que de réveiller ses joueurs. Encore faut-il que cela fonctionne.
La ville lumière portera elle haut ses couleurs, ses plus beaux bijoux seront de sortie, sa tour de fer brillera de mille feu en gardant un œil sur le Parc. Le monde entier aura les yeux posés sur la capitale française qui n’aura qu’une seule envie : montrer à sa rivale allemande qui est la plus sulfureuse.
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