Memphis Depay, une trace orange indélébile à l’OL (Partie 2/2)

Oui, ces articles sont semblables à une rupture amoureuse. Pas souhaitée par les deux âmes d’ailleurs. Mais parfois, il est l’heure de se dire au revoir. Après avoir évoqué dans un premier article les grands moments de Memphis Depay sur la pelouse du Groupama Stadium et de ses victimes, il est temps de se rappeler celui qui était arrivé dans le Rhône comme un gamin et qui le quitte comme un homme.

À LIRE AUSSI – Salut Memphis, il faut qu’on parle… (Partie 1/2)

Un match qui révèle un homme

Le 15 décembre 2019, la carrière de Memphis Depay prend un virage compliqué : les ligaments croisés. Quatre jours avant cette foutue blessure, Lyon joue son futur en Ligue des champions. Déjà auteur de 4 buts sur les 5 premiers matches, Memphis Depay espère pousser l’OL a obtenir au moins un nul, à domicile, face à Leipzig. Et pourtant, après 45 premières minutes insipides, le club allemand mène 2-0 et élimine virtuellement la capitale des Gaules. Après un très joli but d’Aouar, le peuple lyonnais reprend espoir. Et qui mieux que son capitaine pour le délivrer, à la 82e minute ? L’OL arrache finalement sa qualification (2-2) et pourtant, personne n’a le cœur à la fête. Une attitude maladroite des joueurs, une banderole à destination de Marcelo et une échauffourée entre Memphis et ses supporters. Bref, le Néerlandais a le cœur lourd. Et laisse tomber la carapace qu’il porte durement, constamment.

Autant durant le match qu’après, Memphis Depay a fièrement porté le brassard de capitaine. Jamais il ne s’était autant comporté en leader au sein du vestiaire. «Memphis Depay a démontré son immense caractère et qu’il était un capitaine incroyable. Il a fait ce que j’aurais fait», avait déclaré Jean-Michel Aulas à l’issue de la partie. Pour Sofiane, consultant pour WinamaxFC, cette réaction spontanée montre que le gamin de Moordrecht a bien grandi : «L’apogée de son évolution humaine, elle est là. C’est devenu un homme.»

Un bad boy, vraiment ?

Cet homme, il ne l’a pas toujours été. Parfois agacé, parfois agaçant, ses excès d’individualisme ne plaisent pas à tous les coups. Ses irrégularités non plus. Plusieurs fois, il est même puni par Bruno Génésio, qui le laisse 90 minutes sur le banc ou même pire, l’envoie en tribune. Et pourtant, au fur et à mesure du temps, le capitaine lyonnais s’est transformé en coéquipier respecté et apprécié. «Il avait l’étiquette du bad boy en arrivant de Manchester, mais de l’avis de beaucoup de gens au club, il montre l’exemple à l’entraînement, il parle beaucoup aux jeunes, même en N2, tempère Yannis, chroniqueur au Club des 5. Pour un joueur de sa trempe, c’est très important.» 

Rappeur, écrivain, styliste, mannequin et même prêcheur, Memphis est un cas unique à l’OL. «Dans toute l’histoire du club, c’est très difficile de trouver un personnage aussi particulier, atteste Sofiane. C’est un OVNI, mais qui correspond très bien à Lyon.» Si parfois il a pu se montrer agaçant sur le terrain, il a fini par se faire définitivement adopté de l’ensemble de son club, comme des supporters, par son sérieux et son envie de vaincre.

Quelle place dans l’histoire de l’OL ?

De par son aura et ses performances sportives, Memphis Depay s’est fait une place de choix dans l’histoire de l’OL. Et pourtant, il ne bénéficie pas de la légitimité des Juninho ou des Cris, présents dans les plus grandes heures de l’histoire du club, ou même de Benzema, Lacazette, Fekir et Tolisso, les gones qui ont franchi les étapes, du centre de formation aux pelouses de Gerland. 

À LIRE AUSSI – Benzema, le gone que le Rhône n’oublie pas

Auteur de son 76e but contre Nîmes dimanche dernier, le Néerlandais est devenu le 13e meilleur buteur de l’histoire du club (à égalité avec André Guy). Si le top 10 est inatteignable pour lui, il se classe devant des joueurs du calibre de Nabil Fekir (69 buts), Karim Benzema (66) et Alain Caveglia (63). «Il a toujours prouvé qu’il était indispensable. Depuis son arrivée, je ne peux pas imaginer un 11 type sans lui, assure Yaman, abonné au virage Sud du Groupama Stadium. Le fait qu’il soit toujours au top des joueurs de l’OL depuis son arrivée, qu’il se soit montré très décisif et qu’il nous ait fait vivre beaucoup de grands moments le place extrêmement haut dans la hiérarchie du club.» 

Car oui, dissocier le footballeur de l’homme n’est pas vraiment possible avec Memphis Depay, tant il semble être le même sur les terrains qu’à la ville. «Dans l’histoire complète du club, c’est très dur de trouver un personnage si particulier. Sur l’impact qu’il a eu à l’OL, il me fait penser à Lisandro Lopez», juge Sofiane. 

À LIRE AUSSI – Il était une fois : Lisandro Lopez, l’idole par-delà les frontières 

Habitué à ses couleurs blanche, bleue et rouge, voire à des variantes faites de vert et jaune, l’OL s’est mis au orange pendant ces quelques saisons. «Le club a rarement, peut-être même jamais, eu un jour aussi charismatique et fort à l’international», constate de son côté Yannis. De par son impact sur et hors des terrains, Memphis Depay a donc marqué l’Olympique Lyonnais, comme peu de joueurs avant lui.

Un goût d’inachevé

Mais pourtant, à l’inverse d’autres grands joueurs passés par Lyon, son départ a de quoi laisser un goût amer dans la bouche des supporters lyonnais. S’il n’est pas tombé dans la bonne période de l’OL, il repart avec un palmarès désespéramment vide. «Quand je regarde derrière moi, c’est un trophée qui me manque, déclare Memphis Depay, dans l’édition de l’Équipe d’hier. C’est très difficile pour moi de me dire que je n’ai rien gagné à Lyon.» Et pourtant, il n’était pas loin, avec la finale de la Coupe de la Ligue 2020, perdue au tirs au but face au PSG (0-0).

https://twitter.com/FabrizioRomano/status/1395864304008810497?s=20

Ce départ, probablement au FC Barcelone selon l’insider Fabrizio Romano, aurait pu arriver bien plus tôt. Sans sa grosse blessure à l’hiver 2019, il ne serait probablement déjà plus au club depuis une saison. Mais Memphis Depay ne s’en est jamais caché : il vise plus haut que l’Olympique Lyonnais. Dès qu’un micro lui ait tendu, le Néerlandais rabâche, en anglais, son envie de jouer dans un plus grand club. «Ce sont des déclarations sans langue de bois, qu’on a pas l’habitude d’entendre. Il est ambitieux, mais il a toujours respecté le jeu et son club», nuance Yaman. Si lui aussi comprend l’ambition débordante du Néerlandais, Yannis regrette certaines de ses déclarations : «Tu peux dire que tu veux jouer dans un très grand club, c’est normal de viser plus haut. Mais peut-être que parfois, il l’a trop dit, même si souvent ses propos étaient mal interprétés.» De son côté aussi, Sofiane se montre indulgent : «Je préfère un mec honnête, si sur le terrain et dans son attitude il se montre irréprochable. Surtout que c’était aussi assumé du côté du club.»

Dans quelques jours ou semaines, Memphis Depay aura ce qu’il a toujours cherché : une place dans un des plus grands clubs du monde. Malgré ses irrégularités sur le terrain, ses déclarations pas toujours bienvenues et son bilan collectif mitigé, le Néerlandais a laissé une trace indélébile à l’Olympique Lyonnais. «J’avais à peine 23 ans quand je suis arrivé. J’ai changé, j’ai grandi. Ici, je suis devenu un homme. C’était ma maison», a-t-il déclaré dans son interview d’adieu, pour l’Equipe. De Benzema à Umtiti en passant par Jimmy Briand, les supporters lyonnais savent accueillir comme il se doit leurs anciennes idoles. Nul doute que, même au-delà des frontières, la trace de Memphis Depay restera bien présente dans les travées du Groupama Stadium.

Crédit photo : Icon Sport

0