En cette journée internationale du droit des femmes, focus sur celles que les supporters lyonnais préfèrent en cuisine. Et quoi de mieux pour célébrer cette journée que de donner la parole à la nouvelle petite coqueluche du PAF sportif (et pas que …) français : Agathe Auproux. Entretien.
Bonjour Agathe, on te voit depuis quelques temps sur nos écrans mais on ne sait pas grand chose de toi avant ton arrivée sur Canal. Présente-toi en quelques mots.
Depuis le tout début ? Je suis née à Guéret, préfecture de la Creuse. J’y suis restée jusqu’à mon bac (ES), que j’ai obtenu avec mention. Puis par facilité, je suis allée à Toulouse, en fac d’anglais. J’avais envie d’être journaliste. Mais le journalisme me paraissait loin, un peu inaccessible, un petit milieu très parisien dans lequel je ne me sentais pas de débarquer, je ne savais même pas par où commencer. Donc Toulouse. La licence LLCE (langues littératures et civilisations étrangères) anglais se transforme en double licence avec un cursus Marketing et Communication internationale à l’ISEG. Car j’ai réalisé qu’en restant en fac de langue/lettres, je me dirigeais vraisemblablement vers les métiers de la traduction ou le professorat… Je bosse à côté comme vendeuse et serveuse pour payer mon loyer. Arrive le fameux stage obligatoire de fin de licence. Et donc ma première vraie opportunité de mettre un pied dans le journalisme. Je débarque aux Inrocks, pour 3 mois, l’été 2013, en plein 11e. Ça se passe hyper bien, me conforte dans l’idée que c’est vraiment ce métier que je veux faire, puis je découvre et adore Paris. Je fais quelques petits boulots (serveuse, hôtesse en vernissage) et quelques piges pour me prendre un appart et payer mon loyer (devenu vraiment indécent comparé à ma vie toulousaine). Je me renseigne sur les écoles de journalisme et intègre le CFPJ, qui proposait deux années de master en contrat de professionnalisation au sein d’une rédac. Parfait. Aucune envie de retourner à une approche très théorique. Je fais donc mes deux années de contrats pro à Livres Hebdo, le mag pour les professionnels du monde de l’édition, et pige de temps en temps pour les Inrocks. Toujours rien à voir avec le foot, je sais. Mais globalement, l’avant Canal, c’était ça.
Et là, tu débarques à Canal, dans l’émission « 19h30 Sport ». Comment se passe ton recrutement pour la chaîne cryptée ? Et comment est née ta pastille « Culture Foot » ?
A la base, je devais arriver dans l’émission de Pierre Ménès. Pierre devait avoir, à la rentrée 2016, enfin son émission à lui. Il allait enfin être l’animateur, le chef d’orchestre, et non plus le chroniqueur et le consultant. Il m’a mise dans son projet dès le début. Nous nous étions rencontrés par hasard à Canal en 2014 alors que le Grand Journal m’avait contactée pour un casting (sauf que j’avais 22 ans et étais en plein dans mes études !). Et on s’est adoré, avec Pierre. Donc j’étais ravie d’avoir la chance de travailler avec lui. Sauf que sa santé lui a fait défaut. Qu’il n’a pas pu faire sa rentrée à la télé. Marie Portolano a donc hérité du créneau du vendredi soir laissé vacant sur Canal+ Sport, dont elle s’occupe brillamment. La chaîne et Marie ont décidé de me garder, même sans Pierre. Ils m’ont fait confiance alors que jamais je n’avais fait de télé.
Pour ma pastille, j’avais rencontré la direction des sports de Canal pour discuter de mon rôle sur leur antenne. Je leur ai immédiatement dit que je ne pourrais pas m’improviser experte football et parler dans le détail de la Coupe du monde 82. Mon créneau, c’est la culture. Je suis journaliste culture/société. C’est donc ça que j’allais pouvoir amener. Car ce qui me touche par dessus tout dans le sport, le foot en premier, c’est quand il transcende sa dimension purement sportive pour investir le champ culturel. Comment la culture s’empare du foot, comment le sport est devenu une culture à part entière, avec un grand C, comme peut l’être la littérature ou le cinéma. La chaîne était d’accord avec moi sur cet axe, dans lequel elle m’a encouragée. J’étais trop contente. Chaque semaine donc, depuis fin août 2016, je cherche des sujets pour écrire ma chronique, où le foot croise l’art et la société. J’adore.
Donc le foot et toi, c’est une véritable histoire d’amour ?
J’aime le foot d’amour oui. J’ai encore du mal à exprimer toutes les émotions qu’un match peut me faire ressentir, mais c’est assez semblable à ces émotions exacerbées lors d’une relation amoureuse. Où tu t’énerves très vite, où tu hurles, où tu pleures de joie, où tu passes d’un sentiment à son contraire tout le temps. Je me suis même décidée récemment à acheter mes premiers crampons pour jouer de temps en temps.
Si tu devais citer un souvenir de supportrice ? Un moment footballistique qui te restera gravé ?
J’aime le foot depuis la première coupe du monde que j’ai pu suivre. Je suis née en octobre 1991. Donc le 12 juillet 1998, j’avais 6 ans et demi. Mes parents et leurs amis étaient dans le salon devant la télé pour la finale, à Guéret donc. Moi j’avais mon petit frère sur les bras, qui a 4 ans de moins que moi, et on avait été autorisé à regarder les 20 premières minutes du match avant d’aller nous coucher. J’ai protesté, je me rappelle avoir dit “Mais Maman j’ai vu aucun but!!!”. Je ne sais plus trop si on a eu le droit de rester ou si on s’était planqué derrière le canapé. Mais premier but à la 27e sur une tête de Zidane, explosion de joie. Un deuxième but juste avant la fin de la première période, toujours sur une tête de Zidane, explosion de joie. Tout le monde hurle. On termine le match à 10, mais à 3-0 grâce à Petit. On est tous sorti dans la rue, moi à 6 ans et demi, mon frère à 2 ans, à Guéret donc, et on chantait, on était tellement heureux. C’etait magnifique.
Après quelques recherches, on a pu voir que tu étais une grande suppotrice du PSG. C’est parce que dans ton QG natal, la Creuse, y’a aucune équipe sympa à supporter ?
(Rires) C’est vrai que la Creuse est davantage un terre de rugby ! J’aime ce club d’abord comme j’aime la ville dans laquelle je vis aujourd’hui. Et pardon de choquer mais j’aime Nasser. J’aime l’aura qu’il a donnée au club, j’aime l’état d’esprit qu’il a insufflé, les stars qu’il a fait venir, la dimension internationale qu’il a permis. J’en parlais avec mon mec, supporter historique du PSG, né en 1983 en région parisienne. Il me disait que jamais il n’aurait imaginé le PSG à un tel niveau. Encore une fois, je ne suis pas journaliste sportive (pour l’instant, rires), donc je n’ai aucun mal à parler de Paris élogieusement. Toutefois je reconnais la qualité de Monaco cette saison, j’adore les voir jouer. Et j’aime aussi le jeu du Real. Je suis allée voir un match du Real à Bernabeu l’an dernier. J’étais dans le stade, j’avais donc une vision globale de ce qui se passait sur le terrain, et j’étais absolument ébahie devant les déplacements de Cristiano Ronaldo. Il a une capacité d’anticipation, une vision du jeu phénoménale. Zlatan aussi m’a profondément marquée. Par sa personnalité, son charisme, son intelligence, et ses fulgurances sur le terrain. Je suis ses prouesses à Man Utd. Et puis je lis beaucoup, je me documente. Donc l’équipe du Danemark qui remporte l’Euro 1992 après une épopée complètement dingue et à la surprise générale est certainement l’une de mes équipes préférées.
Chez UltimoDiez, on a instauré notre classement niveau style, l’UltimoFlow. Toi, en tant que journaliste style, t’en penses quoi du flow de nos footeux ?
Très très très gros souci stylistique chez la plupart des joueurs de foot. Difficile de déterminer d’ailleurs la plupart du temps si c’est du mauvais goût ou de l’absence de goût. Mais je t’avoue que je ne suis pas vraiment groupie, donc j’ai pas une idée très précise de la façon dont ils s’habillent hors des terrains. Juste, 80% du temps, quand je les vois en plateau ou sur les réseaux sociaux, je me dis que le tee-shirt est trop long, le jean trop brillant ou trop troué, les baskets trop pleines de strass… Toujours too much.
Aujourd’hui, c’est la journée internationale des droits des femmes. Quel regard portes-tu sur le football féminin et son traitement médiatique ?
Le foot féminin, comme le sport pratiqué par des femmes plus généralement, souffre d’une sous-médiatisation contre laquelle je m’insurge souvent. Mais pour le foot, ça tend à changer. Cstar diffuse en ce moment les matchs de l’équipe de France féminine lors de la She Believes Cup, et W9 diffusait en 2015 la Coupe du monde. Qui a d’ailleurs été un succès d’audiences pour la chaîne, qui a engrangé un bénéfice d’un million d’euro net en publicités. C’est ça le pire. C’est que l’intérêt est là. Les gens ont envie de regarder nos joueuses françaises sur les terrains. Mais on ne leur montre pas assez. En France, historiquement, c’est Lyon qui a la main mise sur la discipline. L’OL féminine est une très grande équipe. Que le PSG commence à pouvoir un petit peu challenger… Ça se développe. C’est en plein essor. Et c’est tant mieux.
Nouvelle arrivée à la télévision, ressens-tu encore les clichés « femme qui parle de foot = bimbo » ? Existe t-il encore une sorte de discrimination à ce niveau ?
Sur Internet, oui, évidemment. Quand je poste un tweet sur le foot j’ai forcément quelques mecs qui vont me faire comprendre qu’ils me préfèrent quand je parle de bouffe ou je ne sais quel autre cliché sexiste. Mais dans le milieu, franchement non. A Canal en tout cas, que ce soit par l’équipe qui travaille autour de 19h30 Sport, par mes collègues en plateau, et par les autres journalistes de la chaîne, je ne me suis jamais sentie rabaissée ou cantonnée à mon physique. Les mœurs évoluent petit à petit. Le foot n’est pas ce sport de beauf regardé exclusivement par des mecs qui se grattent les couilles et boivent des bières sur leur canapé. Le foot touche tout le monde. Marie Portolono l’a incarné bien avant moi. Tout comme Estelle Denis ou Nathalie Iannetta.
Tu as acquis une nouvelle notoriété, grâce à ta pastille sur Canal, puis de manière plus conséquente, via Touche Pas à Mon Poste, où tu es régulièrement chroniqueuse. Comment gères-tu ça ?
Euh je ne le gère pas du tout. C’est assez déstabilisant, tout à coup tu t’adresses à des dizaines de milliers de gens quand tu postes un tweet ou une photo sur Insta. J’essaie de ne rien changer, de garder le même ton, de répondre à tout le monde autant que je le peux quand on me laisse un commentaire ou me mentionne sur Twitter. J’espère juste que je ne vexe personne, que je ne donne pas l’image d’une meuf inaccessible ou qui se la raconte de fou. C’est tout ce que je ne suis pas.
On te sait active sur les réseaux sociaux ; es-tu, comme certaines autres de tes collègues femmes, victime de « dérives » ? Pas encore de demande en mariage ?
Tellement de demandes en mariage haha ! Mais bon je passe ma vie sur les réseaux, donc je sais quels sont les codes, je sais surtout que la hate est aussi inévitable que les déclarations d’amour en 140 caractères. Je ne me formalise pas. Si le mec m’insulte à plusieurs reprises, par contre, évidemment je finis par le bloquer. Châtiment irréversible pour tout ceux qui sont agressifs et ultra vulgaires. Mais très franchement, pour la grande majorité, les gens qui me sollicitent sur Internet sont très gentils et bienveillants. Par contre, apparemment, mon Facebook est saturé ! On ne peut plus m’envoyer de friend requests. Je reçois aussi des tonnes de messages privés sur Insta, je n’arrive même pas à les lire.
Pour terminer, ce soir, Barcelone-PSG, un pronostic ? Un gage à lancer à la rédac si le Barça sautait finalement Paris ?
Pas de pronostiiiiic. Je suis hyper superstitieuse. Bon allez, je vois Paris marquer 2 buts. Et le Barça en mettre 3. Donc 3-2 Barça. Mais ce ne sera pas suffisant. Si j’ai vraiment tout faux et que Messi en met 12 et qualifie son équipe, merci de tweeter chaque jour jusqu’à la fin de la LDC : “Agathe Auproux est vraiment une fille sympa”, pour me remonter le moral.
Retrouvez Agathe sur Canal+Sport, dans « 19h30 Sport » chaque vendredi, et sur C8, dans « Touche pas à mon poste ».
Pour lui faire à votre tour une demande en mariage, c’est ici : @agatheauproux
Crédits photos : forher.com