Beckenbauer, le dernier empereur d’Allemagne

Le 11 septembre 1945, après la Seconde Guerre mondiale, l’Allemagne est en ruine. Tout est à reconstruire. A ce même moment à Munich, capitale de la Bavière, un enfant voit le jour. Un enfant qui aura une vie bien remplie. Si l’on vous dit pilier, défenseur, « Der Kaiser »… Vous l’avez ? En effet, nous parlons de Franz Beckenbauer. Figure du football allemand, adoubé par tous que ce soit politiques ou sportifs, il aura marqué les années 1970 de son poste de libéro, si particulier et de plus en plus rare de nos jours. Retour sur la carrière du dernier empereur allemand en tant que joueur et entraîneur.

La légende se construit

Le petit Franz commence sa formation dans un petit club de quartier à Munich : le SC 1906 Munich, aujourd’hui dissout. Il entre ensuite à 14 ans chez les jeunes du Bayern. La légende se construit doucement. Lors de la saison 1964-1965, du haut de ses 19 ans, il fait ses grands débuts en pro, mais en seconde division, autrefois appelée Regionaliga Sud. Aujourd’hui, la Regionaliga Sud représente la quatrième division allemande. Il suffit d’une saison pour accéder à la Bundesliga, le jeune Beckenbauer marque 16 buts sur 31 matchs joués en championnat. L’équipe gagne les play-offs d’accession et rejoint l’élite allemande.

Lorsqu’il arrive en première division, plusieurs clubs se partagent le titre de champion dont le rival Munich 1860 durant la saison 1965-1966. Franz continue son chemin vers le plus haut niveau et est appelé très tôt en sélection avec la RFA dès 1965. L’Allemagne de l’Ouest peine à se qualifier pour la Coupe du Monde en Angleterre. Le 26 septembre 1965, quelques jours après son vingtième anniversaire, le futur Kaiser joue son premier match international face à la Suède et s’impose 2-1. N’ayant toujours obtenu aucun trophée avec le Bayern, il dispute tout de même sa première Coupe du Monde en Angleterre. Beckenbauer se distingue dès le début de la compétition en s’offrant un doublé contre la Suisse pour une large victoire 5-0. Il continue en marquant un but face à l’Uruguay en quarts de finale et termine à quatre buts, le dernier étant une belle frappe face à Lev Yachine en demi finale. La RFA perd en finale 4-2 après prolongations contre l’Angleterre, pays hôte. Le jeune Franz avait pour tâche de marquer Bobby Charlton, voilà sa première déception.

Ci-dessous un petit condensé de ses actions lors du mondial 1966 ainsi que ses buts face à la Suisse, l’Uruguay et l’URSS.

Le sacre : le Kaiser à son apogée

Tout commence à prendre de l’ampleur. Les années passent, le jeune Franz ne cesse de progresser et obtient son premier titre de champion d’Allemagne en 1969. Nous entrons dans l’ère où le Bayern et le Borussia Mönchengladbach se disputent le titre national chaque année. Beckenbauer continue d’être appelé avec la RFA mais ne gagne toujours pas de trophée majeur international. Cependant, lors de la coupe du monde 1970, Beckenbauer est couronné empereur face à ceux qui l’ont écoeuré quatre ans plus tôt. Quel joueur en a des plus grosses que Cavani lors de son but contre Marseille ? Franz Beckenbauer évidemment. C’est un des faits marquants de cette coupe du monde 1970. Lors du match contre l’Italie, il se blesse à l’épaule mais il veut à tout prix finir la rencontre. Chose faite, un bandage et c’est réglé. Le bras en écharpe, le Kaiser n’abdique pas mais l’Italie gagne la demi-finale. Toujours aucun trophée en sélection. Sur le plan national, les titres s’enchaînent. La grande équipe du Bayern notamment composée de son grand gardien Sepp Maier, joueur le plus capé du club, Beckenbauer ou encore Gerd Muller en attaque, gagne le championnat trois ans d’affilée en 1972, 1973 et 1974. Sur le plan européen, le premier titre en sélection arrive pour Franz avec l’euro 1972 gagné par la RFA. Deux ans plus tard, il est sacré champion du monde à domicile. Avec le Bayern, il glane trois coupes d’Europe des clubs champions consécutives en 1974, 1975 et 1976. Enfin, sur le plan individuel, il obtient deux ballons d’or en 1972 et 1976.

De la Terre au Cosmos, redescente

En 1977, à 32 ans, le Kaiser quitte sa Bavière natale et traverse l’Atlantique pour rejoindre les New York Cosmos, club où Pelé est passé. L’équipe attire des stars européennes comme l’attaquant phare de la Lazio Giorgio Chinaglia ou encore Carlos Alberto, capitaine de la Seleçao victorieuse de la coupe du monde 1970. Loin du choix sportif, il prend sa retraite internationale, cumulant 103 sélections et devenant le premier joueur allemand à passer les 100 capes. Cependant, sa vitrine de trophées continue à s’étoffer. Il remporte la NASL à trois reprises lors de sa première saison en 1977, puis en 1978 et 1980. Après trois saisons en Amérique, il rentre en RFA et rejoint Hambourg durant deux saisons. Le Bayern domine toujours autant mais Franz remporte un autre titre de champion d’Allemagne avec le HSV à la fin de la saison 1981-1982. Il revient en Amérique pour une dernière pige avec les Cosmos où il remporte un dernier trophée : une coupe transatlantique. Le Kaiser range finalement les crampons à l’âge de 38 ans.

Le Kaiser sur le banc, la seconde carrière

Après une année de repos et après avoir marqué le football profondément, Beckenbauer enfile le costume d’entraîneur. Et la barre est déjà mise très haute : il prend les rennes de la Mannschaft. Pendant six ans, il dirige des joueurs tels que Matthaüs, Völler, Schumacher ou Rummenigge. Les débuts sont mitigés avec une élimination dès les phases de poule lors de l’Euro 1984 en France. Deux ans plus tard en 1986, le Kaiser emmène sa sélection jusqu’en finale de la coupe du Monde au Mexique, en éliminant le pays hôte et la France. Lors de la finale, l’Argentine mène 2-0, la RFA revient au score en fin de match grâce à Rummenigge et Völler. Burruchaga scelle le destin du match et fait gagner l’Albiceleste 3-2. Il faut attendre quatre ans. Coupe du monde 1990, Italie, l’apothéose. Terminant premier de son groupe devant la Yougoslavie, la Colombie et les Emirats arabes unis, la RFA se qualifie logiquement pour les huitièmes de finale de la compétition. Le plus dur reste à venir. Le Kaiser mène son équipe d’une main de maître, éliminant la Hollande, la Tchécoslovaquie puis l’Angleterre. La finale ? on prend les mêmes (presque) et on recommence. Revanchard, Beckenbauer retrouve l’Argentine de Carlos Bilardo, qui l’avait battu quatre ans auparavant. Cette fois, le sort en décide autrement. Andreas Brehme transforme un penalty en fin de match et la RFA remporte sa troisième Coupe du Monde. Le Kaiser est de retour, cette fois-ci sur le bord du terrain. Mario Zagallo et lui sont les deux seuls personnalités du football à avoir remporté une coupe du monde en tant que joueur puis entraîneur.

Après ces six années, Franz relève un nouveau défi chez les voisins français. Qui dit grande équipe dit grand coach. Bernard Tapie, qui avec Marseille règne depuis deux saisons sur le championnat de France, s’offre le technicien allemand. Il y passe une saison et remporte le championnat de France de première division pour la saison 1990-1991. Après une nouvelle pause de trois ans, le Kaiser revient au Bayern, en 1994 et 1996. Lors de son premier passage, il remporte un nouveau titre de champion, puis une coupe de l’UEFA deux ans plus tard, la seule du club bavarois.

Franz Beckenbauer a donc été un joueur hors normes et un grand entraîneur. Il aura marqué le monde du football à tout jamais ainsi que plusieurs générations. Il est une personnalité très importante et immensément respectée en Allemagne. Capitaine honoraire de l’Allemagne et du Bayern ainsi que président d’honneur du club bavarois, vice-président de la Fédération Allemande de football à la fin des années 1990. On lui a décerné l’Ordre bavarois du Mérite, la Silbernes Lorbeerblatt, plus haute récompense sportive allemande ou encore la croix fédérale du mérite, une récompense des plus élevées en Allemagne, les récompenses parlent d’elles même. Il reste et restera dans les mémoires, en Allemagne comme dans le monde entier.

 

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Nissart, Scouser. Xabi Alonso est l'essence même de la classe sur le terrain comme en dehors.