Les hommes d’un seul club sont une espèce en voie d’extinction. Maldini, Totti, Zanetti, Xavi, Carragher ou encore Lahm, ces joueurs ont été fidèles durant la majorité de leur carrière. Moins connu que les noms cités, il y a également Gianpaolo Bellini, défenseur ayant fait toutes ses années à l’Atalanta Bergame. En Angleterre, un autre joueur a joué toutes ses gammes dans un seul club. Par ses qualités offensives, il a illuminé la First Division puis la Premier League à partir de 1992, bien que son club eut été majoritairement dans la seconde moitié du classement. Il est anglais, bien que la consonance de son nom soit française. Il s’agit de Matthew, dit Matt Le Tissier. Durant seize ans, il porta le maillot de Southampton. Une carrière heureuse, bien qu’il n’ait jamais remporté un seul trophée avec son club. Portrait de ce joueur qui a fait répéter bon nombre de fois « what a goal » aux commentateurs.
Les débuts et la déification
14 octobre 1968, Saint-Pierre-Port, île de Guernesey. Le God Matthew voit le jour. Petit, il se prend d’admiration pour les Spurs et son joueur vedette Glenn Hoddle. Coïncidence, à 13 ans, il va voir un match de son équipe favorite face à Southampton, futur unique club de sa carrière. Il commence vers ses 15 ans sur son île natale. Un jour de match U15, des recruteurs de Southampton sont déjà présents. Le pari est réussi, des tests lui sont proposés. Tout est en marche. Le jeune Matt commence chez les pros lors de la saison 1986-1987. Le premier bilan est convaincant à 18 ans. Championnat et coupes incluses, il dispute 31 matchs pour 10 buts. Southampton finit douzième sur vingt-deux.
Les saisons suivantes, le club végète dans le bas de tableau et les deux saisons suivantes de Le Tissier sont légèrement irrégulières. À partir de 1989-1990, à 21 ans, « Le God » se construit. Pourquoi Le God ? Au vu de son nom sonnant français, les supporters saints ajoutent l’article « le ». À la fin de la saison, en 35 matchs championnat, le natif de Guernesey compte un total de 20 buts. Il termine troisième ex-aequo avec Kerry Dixon, joueur de Chelsea, au classement des buteurs derrière John Barnes et Gary Lineker en pôle position.
Une première offre est déjà transmise. Tottenham, équipe favorite de l’enfance du natif de Guernesey, lui proposent de signer à North London. Bien heureux dans son club, le jeune Matt décide de rester. Il continue sa lancée et gagne en maturité. Les saisons passent et la régularité s’installe. Au début de la saison 1993-1994, le mythe s’intensifie. Un but d’anthologie vient marquer les esprits. Contre Newcastle, il n’y a pas de mots pour décrire cette action.
En 1995, une nouvelle proposition de transfert est transmise à Southampton. Il s’agit de Chelsea, entraîné par l’idole de jeunesse du God : Glenn Hoddle. C’est à nouveau un refus, Le Tissier restera à Southampton. Petit à petit, après 1995, les performances faiblissent un peu. L’intensité n’est pas la même et l’Anglais marque moins de buts. Les saisons passent et à l’issu de la saison 2001-2002, Le God tire sa révérence après 200 buts en un peu plus de 400 matchs, devenant le second meilleur buteur de l’histoire de Southampton.
Les penaltys et la sélection anglaise
Le Tissier, doué pour ses qualités offensives, savait également très bien tirer les penaltys. Il ne compte que huit sélections en équipe d’Angleterre entre 1994 et 1997. Il ne marque aucun but durant ses matchs et n’est pas retenu dans le groupe de Terry Venables pour l’Euro 1996. Durant sa carrière, sur un total de quarante-huit penalty tirés, il en marqua quarante-sept. L’incompréhension est grande puisque l’Angleterre n’est pas experte en séances de tirs aux buts. Les Anglais sont éliminés en demi-finale de l’Euro 96 contre les hôtes allemands et à la Coupe du Monde 1998 face à l’Argentine en huitièmes de finale.
Ces deux défaites sont concédées lors d’une séance de tirs au but. Peut-être qu’avec le Tissier en renfort, ces deux séances auraient été remportées par les Three Lions. Il prend sa retraite internationale en 1997. Fait marquant, lors de sa dernière sélection, en qualification pour le mondial en France, les Italiens mènent 1-0 sur un but de Gianfranco Zola. Le natif de Guernesey met une tête qui touche malheureusement le poteau. Le sort en aurait peut-être décidé autrement s’il avait marqué. Peut-être aurait-il été rappelé l’année suivante.
Matt Le Tissier est donc connu pour avoir été l’homme d’un seul club. Southampton visait le maintien chaque saison et pourtant, il n’est jamais parti. Il est le premier milieu de terrain à dépasser les 100 buts. Les supporters de Southampton et d’autres clubs anglais se souviendront longtemps de ce magicien qui fut capable de passer bon nombre de défenses adverses. Il est à ce jour l’idole de jeunesse du grand Xavi Hernandez. Pour conclure en beauté voici quelques uns de ses nombreux buts inscrits en Premier League.
Crédit photo: Reuters