Le football au cinéma

Bien qu’il soit l’un des sujets les plus populaires dans les discussions, le football est rarement mis en avant au cinéma. Et si, de plus en plus, on voit apparaître sur nos écrans des films parlant de football avec un ton particulièrement juste, c’est certainement parce que certains réalisateurs ont pris conscience de la dimension sociale du football et de la place qu’elle occupe chez beaucoup de spectateurs.

En 1979, Jean-Jacques Annaud signe sur un scénario de Francis Weber le film Coup de Tête qui met en scène un Patrick Dewaere mué en joueur de foot amateur dont le destin est totalement bouleversé après qu’il ait bousculé le meilleur joueur de son équipe. Accusé de viol et renié par tous ceux qui étaient pourtant un jour ses amis, Dewaere finit en prison avant que la vérité n’éclate et qu’il n’en profite pour se venger. A travers cette histoire aux allures de spirale négative puis positive, Annaud porte un éclairage sur les dérives qui animent son époque et qui entourent le football. Ce film inspiré par l’épopée de Guingamp en Coupe de France en 1973 et tourné avec l’aide du club de l’AJ Auxerre (créditant à l’occasion Guy Roux comme conseiller technique) sera bien isolé dans la liste des films qui ont tenté d’élargir la vision du football au-delà d’un simple sport et de cette vision réductrice d’hommes qui courent après un ballon.

Avant 2005 et Hooligans les films sur le football se succèdent et se ressemblent. Certains jouent la carte de la comédie, d’autres celle d’une fausse dimension sociale et parfois la carte de l’histoire. Un film tel que Joue-là comme Beckham tente par exemple de délivrer un message d’émancipation mais ne réussit pas à cause de sa naïveté et de sa construction banale à véritablement toucher ceux (où en l’occurrence celles) qui devraient être concernés par son histoire. De même, la trilogie Goal! que les personnes ayant grandies durant les années 2000 connaissent sûrement, ne réussit pas, au-delà du mérite qu’elle a eu de faire rêver une génération, à apporter une réelle plus-value sur l’intérêt du football dans la société.

En 2005 sort Hooligans, tourné par la réalisatrice allemande Lexi Alexander. La force de ce film réside surtout dans un point crucial : les personnes qui sont prises dans la sphère footballistiques, dans le supportérisme et dans sa tranche extrémiste ne sont pas tous issues du même milieu. Dans le film, Pete, leader d’un groupe de Hooligans est dans la vie de tous les jours instituteur dans une école primaire. Bien qu’il s’agisse ici de hooliganisme, il représente presque à lui tout seul une diversité trop peu célébrée autour du football et qui pourtant joue un rôle majeur dans le succès de ce sport.

Mais c’est en 2009 que sort le plus grand film sur le football et loin d’être une surprise, il est réalisé par un cinéaste engagé dans une idéologie visant à défendre les classes populaires : Ken Loach. Le réalisateur britannique double lauréat de la Palme d’Or signe un film où l’on ne sait pas réellement s’il s’agit d’une histoire d’amour sur fond de football où d’une histoire de football sur fond d’amour. Ce qu’il montre en tout cas dans une simplicité et une honnêteté dont il a le secret, c’est un facteur de Manchester à la peine dans sa vie sentimentale comme dans sa vie de père. Il n’est en réalité plus que l’ombre de lui-même et ne parvient même plus à remplir ses tâches de facteur.

Sa rédemption ne pouvait venir que d’un seul homme, celui que comme beaucoup il a admiré, Eric Cantona. Petit à petit, on comprend le nombre de repère que le football représentait pour lui et avec l’aide du King, il surmonte son début de dépression et commence à renaître. Vient alors le meilleur moment de football au cinéma, celui qui peut expliquer à n’importe qui pourquoi le football occupe une place importante dans la vie de nombreuses personnes. Au milieu des souvenirs des plus belles actions de Cantona, on entend un homme qui raconte à quel point le stade lui manque, à quel point cet espace de défoulement total dans lequel plus personne n’a d’autre identité que celle de son club donne à chacun la liberté d’oublier son quotidien le temps d’un match.

Cet extrait en dit aussi long sur la relation entre le supporter et l’idole. Quand on voit ce facteur énumérer les grands moments de Cantona, on se rend compte de l’importance et de l’influence que peut avoir une star comme l’est Cantona sur de simples individus. Enfin, on comprend à la fin toute l’admiration qui est porté vers le King et que ce dernier entretient par cette sentence magistrale : « I’m not a man, I’m Cantona ».

Quoi qu’il en soit, le cinéma a souvent abordé le football d’une manière épique avec une situation et mal embarquée et un happy-ending attendu. Il reste tout de même quelques films uniques qui ont réussi à prendre en compte toute la dimension non-sportive du football et à évoquer avec justesse les différentes facettes de ce sport.

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Quand les gens sont d'accords avec moi, j'ai toujours le sentiment que je dois me tromper.