[RETRO] Ole Gunnar Solskjær, à tout jamais le « super sub »

Luis Arconada, Rabah Madjer, Antonín Panenka, Fernando Redondo… Nombreux sont les footballeurs qui ont donné leur nom à des gestes techniques plus ou moins gratifiant. D’autres, à l’image d’Ole Gunnar Solskjær, ont aussi enrichi le vocabulaire footballistique sans que leur patronyme  n’y apparaisse. Ce nom ne parlera sans doute pas aux plus jeunes car l’histoire a en effet surtout retenu son pseudonyme : « Supersub », littéralement « super-remplaçant ». Aujourd’hui encore, son surnom sert à désigner celui qui fait vaciller une rencontre en sortie de banc. Mais qu’en est-il de la légende de cet ancien joueur de Manchester United ?

Quand on est joueur, il n’existe sans doute pas de rôle plus cruel ou amer que celui de remplaçant. Ce constat vaut certainement pour tous les adeptes du ballon rond, peu importe le niveau et l’âge. Rien de plus glaçant que de devoir cirer le banc par toutes les météos possibles en attendant qu’un fait de jeu, qu’un choix de tactique ou que la bienveillance de l’entraîneur nous appelle à rejoindre les partenaires sur la pelouse. Rien de plus perturbant que de prendre part à la rencontre bien après les autres. Et presque aussi frustrant que de ne pas avoir la moindre opportunité de toucher le ballon du match, une fois entré en jeu.

Mais ce serait oublier que dans le football, toute « vérité » est cependant faite pour être démentie. Si un schéma tactique doit être appliqué à la lettre, le génie et le talent individuel priment parfois sur la force collective. Si les clubs les plus riches gagnent toujours, des équipes surprises arrivent à glaner un titre. Si le football est un sport qui se joue à 11 et qu’à la fin c’est l’Allemagne qui gagne, il y a de nombreuses compétitions que la Mannschaft n’a pas inscrites à son palmarès.

Si bien qu’il existe forcément des joueurs qui sont faits pour entrer en cours de match et délivrer leur équipe lorsque le score est négatif ou n’a pas encore été départagé. Des joueurs pour qui l’expression « un match de football dure 90 minutes » frise l’hérésie. Ils sont la marque de ceux qui sont capables de changer la dimension d’une rencontre, qui rentrent en jeu pour enfiler leur costume de héros, qui font lever les foules et qui portent le stade ailleurs.

Le Norvégien en est la preuve. Il est l’antithèse du remplaçant malheureux.

Natif de Kristiansund, l’attaquant fait ses gammes du côté de Clausenengen FK, en troisième division. Avec des statistiques éloquentes -115 buts marqués en 109 matches joués- le joueur fait parler la poudre et se forge rapidement une réputation de goleador, au point d’être convoité par le Molde FK. Après deux saisons dans l’un des meilleurs clubs du pays (marquant 31 buts en 42 matchs), il s’envole pour l’Angleterre en 1996 et signe à Manchester United.

En l’espace de onze saisons chez les Red Devils (jusqu’en 2007), le Norvégien inscrit la bagatelle de 126 buts en 366 apparitions. Même si les statistiques ont montré qu’il marquait plus de buts quand il était titularisé, Alex Ferguson pensait qu’il était meilleur lorsqu’il venait du banc, les jambes des joueurs adverses fatiguées. Là où la plupart auraient préféré jouer les premiers rôles dans un club moins huppé, lui s’est contenté du statut de remplaçant, quitte à ne disputer que des bouts de matchs. De l’ombre à la lumière, plutôt que l’inverse, Solskjær se colle l’étiquette de la dernière carte que l’on abat pour faire chavirer la rencontre en faveur de son équipe. Le joker caché sous la manche du costard de Sir Alex.

Des entrées fracassantes

Auteur de 17 buts lorsqu’il est entré en cours de jeu, les anecdotes ne manquent pas.

Il faut attendre la troisième journée de championnat face à Blackburn pour voir pour la première fois le Norvégien sous le maillot rouge. Manchester mené 2-1, l’entraîneur décide de lancer son attaquant dans le grand bain. Cinq minutes après son entrée, Solskjær plante et son équipe arrache le match nul. Le public d’Old Trafford ne le sait pas encore, mais il vient d’assister à la naissance de celui qui deviendra le remplaçant le plus prolifique de l’histoire du club.

L’exemple le plus mythique reste la finale de la Ligue des Champions 1999 contre le Bayern Munich. Alors menés 1-0, Teddy Sheringam permet aux Red Devils de décrocher l’égalisation dans le « Fergie Time ». Dans la foulée « Baby-faced assassin », de son autre surnom, entré en jeu 10 minutes plus tôt à la place d’Andy Cole, dévie une tête du même Sheringam sur l’ultime corner et permet aux Mancuniens de soulever la Coupe aux grandes oreilles.

Quelques mois plus tôt contre Nottingham Forrest, il ne fait certainement pas la plus décisive de ses entrées, mais assurément la plus prolifique. Dans une rencontre où le score s’élève déjà à 4-1 pour United, Solskjær est lancé par Ferguson pour grappiller un peu de temps de jeu. Le Norvégien en profite pour inscrire un quadruplé en l’espace de 12 minutes. Tarif.

Bref, une vidéo vaut mieux que mille mots.

Crédit photo : PAUL ELLIS / AFP

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