PSG : les médias, marchands de peur ?

« Il faut arrêter de vendre la peur. » Par ces mots, Kylian Mbappé a donné du relief à sa réaction d’après-match, mardi, au sortir de la victoire des Parisiens contre Manchester United (2-0). Une phrase adressée aux médias qui s’étaient empressés de tirer la sonnette d’alarme avant même de voir ce que pouvait donner ce PSG, certes affaibli, sur la pelouse d’Old Trafford. Mais a-t-on vraiment été si pessimiste dans les colonnes de la presse française ? Les journalistes s’étaient-ils tous accordés pour piquer la formation de Thomas Tuchel avant l’un des matchs les plus importants de la saison ? Et n’avaient-ils pas des raisons de le faire ?

Avant toute chose, il n’est pas là question de critiquer la déclaration de Kylian Mbappé. Son opinion est probablement partagée par de nombreux observateurs. Cette maxime, « il faut arrêter de vendre la peur », a tout son sens et pas seulement dans le domaine du sport. Néanmoins, elle invite à la réflexion. Car il faut nuancer le fait d’avoir – peut-être pour certains – vendu la peau de l’ours parisien avant de l’avoir tué, du simple rappel de circonstances pour faire monter la température avant la phase finale de la Champions.

« Y croire malgré tout ». Effectivement, en regardant le titre choisi par Le Parisien pour présenter la rencontre, mardi matin, on pouvait penser que les affaires étaient mal embarquées pour le club de la capitale. Voire même, qu’il avait déjà perdu le match aller. Le Figaro se contentait d’un très factuel « Affaibli, le PSG défie Manchester » quand L’Équipe osait « Mais si, c’est possible ». Déjà, les ténèbres s’éclaircissent. Dans son édito pour le quotidien sportif majeur en France, Vincent Duluc prenait la distance qui s’impose pour évoquer le rendez-vous mancunien : « Dans l’histoire d’un club, l’année ou jamais n’existe pas. C’est toujours cette année, ou alors un autre jour ». Objectif, tempéré. Mais pas alarmiste.

Pour mieux comprendre les propos de Kylian Mbappé, il faut remonter au jeudi 7 février. Nous sommes le lendemain de la difficile qualification des Parisiens contre l’équipe de Villefranche Beaujolais, en coupe de France (0-3 a.p.). En dépit du fait que Marquinhos et Cie ont ramené l’essentiel, à savoir un ticket pour les quarts de finale, L’Équipe titre son compte-rendu « En avant, doutes » et choisit, tel un professeur de fac mal réveillé, de tailler par les notes. Moyenne du collectif parisien : 4,3/10. Un peu sévère quand on sait qu’en face, il y avait onze joueurs qui disputaient le match de leur vie et, par ailleurs, sont pensionnaires du respectable championnat de National 1.

Une peur aussi présente au sein du club

Alors oui, on peut entendre qu’on a « vendu la peur ». Mais les journalistes ont-ils été les seuls à laisser transparaître leur inquiétude ? Non. Au sein même du club parisien, des voix se sont élevées pour alerter sur un effectif limité dès lors que ses cadres connaissent des pépins physiques. À commencer par celle de l’entraîneur, Thomas Tuchel, qui déclarait la semaine dernière : « On manque de joueurs fiables, de top qualité ». Il ne fait aucun doute que le technicien allemand n’a pas eu tous les renforts qu’il attendait lors du mercato hivernal, notamment au milieu de terrain.

Et quand ce n’est pas le coach qui prend la parole pour avertir des remous qui agitent le navire, on peut compter sur Gianluigi Buffon, l’homme aux trois finales de Ligue des Champions, pour recadrer son effectif sur le contenu. Comme ce fut le cas après le match contre Bordeaux : « Ce soir, j’ai apprécié la victoire mais je n’ai pas aimé le match […] Mardi, on devra faire plus. »

On peut même pousser le raisonnement plus loin : la « peur » que l’on peut deviner dans les médias n’est-elle pas, finalement, justifiée par les ambitions titanesques du PSG ces dernières années ? Comment ne pas céder aux démons de l’angoisse quand une équipe investit plus d’1,5 milliard d’euros pour ne pas dépasser le stade des quarts en LDC depuis 2011 ? À une autre échelle, le raisonnement peut s’appliquer au « Champion’s project » de l’OM. En effet, les médias n’auraient pas autant de raisons de s’embarrasser de la situation du club phocéen, après deux ans de McCourt, si la communication et les sommes consacrées à certains transferts avaient été, dès le début, mesurées.

Finalement, Kylian Mbappé, en très bon communiquant, a trouvé les mots pour vaporiser les braises toujours incandescentes du traitement médiatique de son équipe. Mais le rôle des journalistes sportifs, justement, n’est pas de se transformer en organe de communication d’un club. Il est de rapporter des faits, de participer modestement à l’émulation des acteurs du football. Et de temps en temps, il est vrai, d’ajouter un peu d’huile sur le feu.

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