Manchester United : miracle et mirage

Après un début 2019 canon, Manchester United n’y arrive plus. Le scénario d’une non qualification pour la prochaine Ligue des Champions parait de plus en plus probable. Il serait synonyme de saison ratée. L’épilogue tragique d’une saison en trompe-l’œil après l’exploit contre le PSG.

Et Manchester devint bleu. Mercredi soir, Manchester United avait la possibilité de jouer un bien mauvais tour à son voisin de City. Au final, la bande à Pep Guardiola l’a logiquement emporté 0-2 à Old Trafford. Et si les Citizen reprennent la main, et peut être bientôt la couronne, les Red Devils, eux, se retrouvent sixièmes. Sixième, c’était exactement le rang du club quand José Mourinho a été licencié le 18 décembre dernier. Sixième, c’est aussi deux places trop loin pour espérer accrocher une qualification pour la Ligue des Champions en septembre prochain. L’engouement suscité par l’arrivée de Solskjaer aura redonné espoir aux fans. Mais le rêve ressemble de plus en plus à un mirage. Et ne nous y trompons pas : Manchester United se dirige tout droit vers une nouvelle saison ratée.

« La chose la plus simple, c’est de courir »

Depuis le miracle du Parc des Princes et l’élimination du Paris Saint-Germain (0-2, 1-3) en huitième de finale de Ligue des Champions, le parcours des Red Devils ressemble à un chemin de croix. Défaits dans le derby, humiliés 4-0 à Goodison Park face à Everton dimanche et sèchement écartés de la scène européenne par le FC Barcelone, les hommes d’Ole Gunnar Solskjaer restent sur sept défaites lors des neuf derniers matches. Pire, cela va bientôt faire deux mois que l’équipe n’a pas gagné à l’extérieur en championnat. C’était le 27 février dernier et une victoire 1-3 sur le terrain de Cristal Palace. Pas vraiment un rythme de prétendant à la Ligue des Champions.

Au-delà des résultats, la manière n’a pas de quoi rassurer les supporters des Diables Rouges. Certes l’équipe n’a pas été aidée par les nombreuses blessures qui ont touché des éléments importants de l’effectif (on pense notamment à Matic, Lingard, Martial ou Herrera), mais cela n’explique pas tout. Depuis plusieurs semaines, les joueurs ne semblent pas mettre la même intensité qu’au début de l’année. Le coach lui-même a fustigé le manque de cœur de son équipe après la cinglante défaite à Everton : « La chose la plus simple dans une performance collective, c’est de courir. » Sans ce « Fergie spirit » un temps retrouvé, l’équipe est incapable de dicter sa loi à ses adversaires. Pas vraiment mieux que quand Mourinho était sur le banc diront certains. Sans réel fond de jeu, le système mancunien ne tient souvent qu’aux fulgurances de Paul Pogba. Et quand le maître à jouer est en dedans, c’est tout l’édifice qui s’effondre tel un vulgaire château de cartes.

Emballement général

Alors que le rêve s’étiole, impossible de dédouaner Solskjaer de ses responsabilités tant l’arrivée de coach norvégien a constitué un tournant dans la saison des Red Devils. Sa nomination en décembre n’avait d’ailleurs rien de la mauvaise idée. Face à un vestiaire éparpillé, rien de tel qu’un gars de la maison pour repartir du bon pied. Il avait d’ailleurs brillamment relancé la machine comme en témoigne cette série de 12 matches d’invincibilité en Premier League entre le 22 décembre et le 11 mars. Mais depuis cette date, l’effet Solskjaer s’est bel et bien dissipé. Et si le renouveau entrevu cet hiver est indissociable de l’arrivée du « Supersub », son incapacité à relancer son équipe dans le sprint final pose elle aussi question. Quand l’état d’esprit insufflé au départ s’estompe, difficile de distinguer ce que l’ancien avant-centre a réellement apporté.

Pour autant, difficile de juger l’apport d’un entraineur sur une demi-saison. Il lui faudra du temps pour développer une véritable identité. Le temps justement, ses dirigeants lui en ont donné. Quelques jours après le miracle parisien, il a été confirmé dans ses fonctions pour trois années supplémentaires. Mais une fois encore, la stratégie sportive des Red Devils est difficile à lire. Paradoxalement, derrière ce bail à long terme se cache le culte de l’immédiateté. Ébloui par l’improbable exploit du 6 mars, les dirigeants mancuniens se sont empressés de prolonger l’ancien buteur. L’emballement des supporters a certainement pesé, mais rien ne forçait le club à prendre une décision aussi précipitée.

Perpétuel chantier

Quoi qu’il en soit, le choix a été fait : c’est autour du héros de 1999 que Manchester United va se reconstruire. Fini le temps de l’euphorie, l’heure est aux grands travaux du côté d’Old Trafford. Un chantier jamais achevé depuis le départ de Sir Alex Ferguson en 2013. L’intersaison s’annonce d’ores et déjà mouvementée. Les nombreux départs annoncés (Sanchez, Herrera, Valencia, Mata, en autres) devraient provoquer une petite révolution au sein de l’effectif. Des changements d’autant plus radicaux que certaines pièces maitresses risquent de quitter le navire. Paul Pogba, bien sûr, pourrait céder aux sirènes du Real Madrid mais aussi Romelu Lukaku et David De Gea.

Avec autant de changements, il y a fort à parier que les Diables Rouges ne seront pas de retour au sommet dès la saison prochaine. En cas de résultats moyens, les supporters n’auront plus qu’à prier pour que Solskjaer ne soit pas débarqué aussi promptement qu’il fut prolongé. Les dirigeants, eux, feraient mieux d’avoir une chose en tête : même Sir Alex Ferguson a eu besoin de temps pour faire des Red Devils un grand d’Angleterre et d’Europe.

Crédit photo : Oli SCARFF / AFP

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