Après deux ans de bons et loyaux services, Malcom a quitté Bordeaux et la Ligue 1. Après une bonne dose de drama, le talent brésilien s’envole donc pour Barcelone (sans escale à Rome). Un choix osé qui peut s’avérer payant pour le joueur.
Le référentiel de Bordeaux
Bordeaux est le terrain de l’explosion de Malcom Felipe Silva de Oliveira en Europe mais les fondations du joueur ont eu lieu chez lui. Nommé par son père en hommage à Malcolm X, il débute la Copa Carioca (compétition des moins de 20 ans) à 17 ans avec les Corinthians. Débutant sur le banc, il se fait sa place dans le onze et s’y révèle. De plus, le Brésilien montre un degré de leadership et de maturité qui détonnent pour un joueur de son âge. Juste après, il intègre l’équipe première et participe au titre de son club formateur en 2015 avec 5 buts.
Le 31 janvier 2016, Malcom signe à Bordeaux en même temps que Arrambari et Bernardoni pour cinq millions d’euros. Contrairement aux critiques du mouvement au Brésil, ses agents avaient été séduits par l’idée de voir le joueur progresser en L1 et la tradition des réussites brésiliennes au club. Deux ans ont passé, le choix s’est révélé être judicieux. Le Bordelais a probablement été la seule lumière continue du côté du Matmut Atlantique. Après six mois d’acclimatation, il a progressé durant ses deux saisons à Bordeaux au point d’y devenir le seul catalyseur. Dans des conditions parfois difficiles, le jeune Brésilien part avec le statut de leader d’équipe et de star de la Ligue 1. Il a également ramené le club aux portes de la Coupe d’Europe avec sa saison à 12 buts et 10 passes décisives.
Pour Bordeaux, le manque d’exposition européenne a forcément joué sur le prix de vente. Avec une gestion d’effectif mieux pensée et une non-élimination face à Videoton en tour préliminaire de l’Europa League, le prix de l’ailier aurait probablement atteint une autre hauteur. Mais finalement, pour sa production et son investissement réalisé, ce transfert est une réussite.
Un changement de dimension risqué
Ce que proposait la Roma était au final une progression logique par palier. Une évolution qui lui aurait permis de conserver son rôle de protagoniste important au sein d’un collectif. Pourtant, le Pauliste a changé son fusil d’épaule dès qu’il a eu vent de l’intérêt catalan. La challenge est plus grand mais également plus risqué. Barcelone ne lui promet en rien un grand rôle, c’est même tout le contraire. Malcom arrive avec l’étiquette de gros outsider, de promesse sans réel risque vu le coût de l’investissement. Mais Barcelone pour un joueur est une opportunité qu’il est difficile de laisser passer. Surtout quand on se sent champion comme l’ancien Bordelais.
Le Brésilien y devient un joueur parmi tant d’autres, mais un joueur avec des qualités qu’a recherché le Barça toute l’année dernière. L’équipe de Valverde s’appuyait sur un bloc défensif très solide mais offensivement, elle s’en remettait trop aux différences réalisées par Messi. Cette approche a permis au club catalan de reconquérir la Liga et de flirter avec l’invincibilité. Une fois que les choses sérieuses arrivent en Ligue des champions, c’est une autre histoire. Face à des équipes préparées à la double confrontation, la seule menace de Leo (entre autres) ne suffit pas pour retrouver le toit d’Europe.
Comme Dembélé et Coutinho avant lui, Malcom apporte une forme de déséquilibre et de changement de rythme qui n’existait plus à Barcelone en dehors du maître argentin. Coutinho et Dembélé, pour des raisons diverses, n’avaient pas pu prendre part à la campagne de Ligue des champions l’an dernier. Quand les trois possibles concurrents peuvent chacun apporter à leur façon plus de capacité de déséquilibre au club catalan, concentrons-nous sur le Brésilien de 21 ans.
Quel rôle pour Malcom ?
Si l’on suit les matches amicaux, l’idée d’Ernesto Valverde est de repasser en 4-3-3. Dans cette configuration, Malcom a occupé à la fois le flan droit et le flan gauche. Si, en France, on connaît surtout l’ex des Corinthians pour les sueurs qu’il a fait subir aux latéraux gauches de Ligue 1, il a débuté sa carrière en tant qu’ailier gauche. Au contraire de Dembélé et de sa capacité à pouvoir utiliser presque sans différence ses deux pieds, le prodige brésilien préfère utiliser son pied gauche.
Cette préférence explique son positionnement sur la droite à Bordeaux. C’est la zone où sa propension à créer le danger est la plus importante. Tout d’abord, c’est un dribbleur explosif, plein d’intensité dans son jeu. En situation de un contre un, il est très dur à arrêter. Sa vitesse couplée à sa capacité de dribble le rendent intenable quand il reçoit le ballon en isolation avec de l’espace. Dans cette situation, Malcom a des possibilités énormes. Toujours dans la recherche du but, l’ailier peut éliminer son adversaire et conduire vers l’intérieur à l’approche de la surface. À partir de là, il offre “une triple menace” : sa qualité de frappe de loin est évidente (son but au Parc OL en atteste), mais il peut également servir par-dessus la défense un joueur faisant un appel ou encore changer de direction pour déposer un centre du droit. Oui, car tout au long de sa carrière, le Brésilien a également travaillé son pied droit.
Mais Malcom n’aura clairement pas la même liberté dans son nouveau club. Il était le point de référence à Bordeaux et devient un électron à Barcelone. Néanmoins, face au Milan, le Brésilien a montré qu’il était capable de faire ces appels vers la surface alors qu’il les exigeait de Kamano fut un temps. Sa vitesse lui permettra alors d’offrir la profondeur lorsque Suárez jouera en pivot pour faire avancer le ballon. En Gironde, il a paru parfois soliste mais c’est aussi dû au contexte qui l’entourait. Une équipe pas forcément équipée pour l’entourer de la meilleure des façons. Jouer au milieu de meilleurs joueurs lui fera gommer certains de ses défauts comme ses frappes forcées.
Rien ne dit que Malcom se transformera en superstar au Barça. Mais vu l’investissement réalisé et le talent du joueur, l’optimisme est de mise. Le club fait au final une bonne affaire. Malcom à 35 millions d’euros aujourd’hui, c’est d’un côté 100 millions que les catalans ne dépenseront pas s’il était devenu un phénomène ailleurs mais aussi une solution supplémentaire de qualité pour Valverde afin de mettre en place son équipe. Une solution qui diffère à la marge de ce qu’il a déjà, mais une nuance qui peut compter une fois arrivée la phase finale de Ligue des champions.
Crédit photo : Lluis Gene / AFP