Marega : la maturité, doucement mais sûrement

Critiqué depuis son arrivée au FC Porto pour son manque d’intelligence ainsi que sa tendance à utiliser à outrance ses capacités physiques pour s »imposer dans le jeu plutôt que de jouer de manière plus simple, plus propre et finalement plus efficace et moins incertaine, Moussa Marega semble avoir en partie réglé ces problèmes en jouant un jeu épuré et réfléchi. Alors qu’il devait quitter le club pour West Ham, moyennant 35 millions d’euros l’été dernier, son coach Sergio Conceição s’est opposé à son départ car il voyait en lui un début de progression. Comme souvent, l’ami Sergio avait vu juste.

Comment Marega est devenu le « dragster des Ulis »…

Originaire de la même ville de l’Essonne que des certains Anthony Martial, Thierry Henry ou encore Patrice Evra, il a également joué au CO Ulis, club dans lequel ont évolué ces mêmes joueurs. Il a toutefois connu une carrière bien différente. De l’Espérance Tunis à Guimarães, en passant par Amiens et Marítimo, son parcours était effectivement peu glorieux avant ce mercato d’hiver de la saison 2015-2016 qui le voit signer au FC Porto pour un peu moins de 4 millions d’euros après avoir réalisé une grosse première partie de saison avec Marítimo. Prêté rapidement au Vitória Guimarães lors de l’exercice 2016-2017, il retourne à Porto après cela pour peu à peu s’imposer comme un titulaire indiscutable.

Il a alors 26 ans, en pleine fleur de l’âge, lorsqu’il rejoint de manière vraiment définitive Porto mais Marega conserve toutefois d’énormes carences qui font justement que sa carrière ne parvient pas à décoller, qu’il ne parvient pas à viser un top club européen malgré des caractéristiques qui font de lui un sportif et même un athlète d’une grande qualité. Il dispose en effet d’une pointe de vitesse largement au-dessus de la moyenne avec très souvent des pics à plus de 35 km/h quasiment à chaque match. Cela cumulé à une endurance hors-normes qui lui vaudrait sans doute de rivaliser avec un Blaise Matuidi pour le concours du « joueur aux trois poumons », il est capable d’enchaîner les accélérations pendant 90 minutes ainsi que de faire les efforts défensifs autant que nécessaire. De même, il est extrêmement puissant dans ses accélérations, ce qui lui permet de posséder des qualités du point de vue de la percussion particulièrement dévastatrices pour les défenses adverses ; c’est d’ailleurs cela qui lui a valu le petit surnom de « dragster ».

Vous l’aurez compris, Moussa Marega ne brille – ou du moins ne brillait – pas spécialement par ses qualités purement footballistiques, concernant l’intelligence de jeu et l’adéquation dans la prise de décisions notamment. Jusqu’à la saison dernière, les critiques à son égard se concentraient effectivement sur ces deux points-ci. Oui, Marega rushait sur 50 mètres balle au pied ; oui, Marega ne prenait que trop rarement la bonne décision une fois arrivé dans les vingt mètres adverses. Oui, Marega récupérait des ballons dans son camp ; oui, Marega rendait le ballon à l’adversaire dès la récupération. Il n’y a qu’à voir les clubs qui s’intéressaient à lui l’été dernier : des clubs du milieu de tableau de Premier League, qui raffolent de joueurs athlétiques en raison de leur bonne adaptabilité au ventre mou du championnat anglais.

… pour ensuite se transformer en « dragão de Bamako »

Ce début de saison 2018-2019 s’est trouvé être compliqué pour l’international malien puisque son non-départ à West Ham l’a quelque peu mis en rogne à tel point qu’il décide de pratiquer la fameuse grève de l’entraînement jusqu’au mois de septembre. Cela lui coûte d’être plus ou moins mis à l’écart jusqu’à un événement : la blessure de Vincent Aboubakar en octobre qui lui vaut un éloignement des terrains d’au moins six mois (il n’est d’ailleurs toujours pas revenu). Depuis son retour, il ne cesse de s’améliorer match après match notamment sur le plan de l’intelligence de jeu. Finie la précision de passes de moins de 50%, les deux tirs cadrés sur dix tentés, la perte des trois-quarts de ses ballons. Place maintenant aux déviations en une touche, aux remises en pivot, aux percussions qui se concluent par un centre en retrait pour se transformer en passe décisive. Place, surtout, à une science du placement et du déplacement dont le but le plus emblématique est peut-être celui contre l’AS Roma pendant le match retour des huitièmes de Ligue des Champions.

Grâce à cela, Marega est aujourd’hui l’un des cadres du FC Porto et est ce que l’on peut qualifier de « chouchou » de son coach puisqu’il est sans doute la plus belle réussite individuelle depuis qu’il est arrivée en bords du Douro. Que Porto joue en 4-4-2 ou en 4-3-3, il est toujours présent dans le onze de départ en étant positionné respectivement ailier droit ou en pointe. En pointe, justement, il s’avère particulièrement intéressant puisque ses qualités physiques lui permettent d’être très fort dos au but, il peut donc jouer en pivot. De plus, son intelligence de placement et de finition l’habilitent également à être parfois une pointe fixe avec un autre 9 qui tourne autour de lui. Ce rôle d’électron libre, il peut aussi le jouer comme lorsqu’il est associé à Tiquinho Soares en attaque. De même, sa « clutchitude » et sa progression font qu’il est apprécié par une grande majorité de supporters, un autre bon point pour lui. L’on a vu depuis environ un an se développer un nombre de memes incalculables sur les réseaux sociaux dont l’égérie est l’attaquant malien (souvent à dos du dragon de Daenerys de Game of Thrones).

Malgré cette progression fulgurante sur ce temps finalement assez court, il semble néanmoins que Moussa Marega ait atteint un certain plafond de verre depuis quelques mois, qui pourrait l’empêcher de rejoindre un top club européen. Mais prudence, il nous a habitué à bien des surprises…

Crédit photo: Paulo Oliveira / DPI / NurPhoto

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4-4-2 losange et presunto comme exutoires.